Affiche de campagne sur les "boomers" : EELV au cœur d'une nouvelle polémique

V.M
Publié le 26 avril 2021 à 18h53
Julien Bayou, en janvier 2021.

Julien Bayou, en janvier 2021.

Source : GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

BIS REPETITA - Une affiche mettant en scène des seniors, qualifiés de "boomers", pour encourager les électeurs à s'inscrire sur les listes pour les élections régionales a semé la pagaille ce week-end. Critiqué de toutes parts, le secrétaire national d'EELV, Julien Bayou, a fait son mea culpa.

"Les boomers, eux, ont prévu d'aller voter." Cette affiche de campagne pour les élections régionales en Ile-de-France, mettant en scène quatre seniors souriants sur une plage de sable fin - les fameux "boomers", accusés d'avoir profité des joies de la consommation au point de détruire la planète -, vous ne la verrez plus. 

Censée encourager les jeunes électeurs franciliens à s'inscrire sur les listes électorales pour "défendre le climat" dans la perspective du scrutin des 20 et 27 juin, elle a tout simplement été supprimée après un tweet en forme de mea culpa publié dimanche par le secrétaire national d'EELV et tête de liste régionale, Julien Bayou. 

Le visuel de campagne écologiste ciblant les "boomers".
Le visuel de campagne écologiste ciblant les "boomers". - DR

À l'origine, cette image des quatre "boomers", dévoilée vendredi par Julien Bayou, s'inscrivait dans une série de visuels ayant le même objectif. "Les chasseurs, eux, ont prévu d'aller voter", ciblait une autre affiche. D'autres visuels visaient "les fachos" (avec une illustration d'une action du groupe Génération identitaire), le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et le philosophe Alain Finkielkraut. 

Si cette campagne ad hominem a suscité de nombreuses réactions négatives, c'est bien celle dédiée aux seniors qui a engendré le tollé du week-end, principalement chez les opposants des écologistes, mais aussi, via les réseaux sociaux, chez les premiers concernés : les seniors franciliens, dont certains paraissaient outrés d'être associés à des pollueurs. "Les boomers ainsi raillés, ce sont nos parents et amis nés entre 1945 et 1965. Qu’ont-ils fait, que font-ils de mal pour être pointés collectivement ?", a ainsi répondu à Julien Bayou le socialiste Jérôme Guedj, rappelant au passage que les seniors "sont plus de 2 millions en Ile-de-France". Sous-entendu : fustiger une partie des électeurs à deux mois d'un scrutin n'est pas la meilleure méthode de campagne qui soit. "On ne regarde pas des gens comme des citoyens, on les regarde comme appartenant à une catégorie, une communauté, et c'est la catégorie et la communauté qui font le vote", a fustigé de son côté le maire Modem de Pau, François Bayrou. Sur LCI, lundi matin, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a également dénoncé "du sectarisme" et "une volonté de communautariser en permanence"

Concurrente de Julien Bayou, mais potentielle alliée de second tour, la tête de liste de gauche Audrey Pulvar s'est elle-même étonnée "qu'on désigne une catégorie de population" de cette manière. "Je ne connais pas un seul grand-parent boomer qui ne s'inquiète pas du sort des générations futures", a ajouté cette proche d'Anne Hidalgo. 

L'initiative gêne aussi dans les rangs écologistes. "Quand on a fait une connerie, ce qu'il y a de mieux à faire, c'est de s'excuser. Quand on plaide l'indéfendable, on ne fait que s'enfoncer un peu plus", s'agaçait-on au sein du mouvement, selon un courriel interne dévoilé par Playbook ce lundi. 

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"Maladroit et blessant"

Après plus de 48 heures de polémique et d'attaques, Julien Bayou a fini par mettre un terme à cette campagne. Dans un tweet assumant partiellement l'erreur, le patron d'EELV a évoqué un visuel "maladroit et blessant", assurant qu'il serait "immédiatement retiré". "Je ne l'avais pas validé, mais j'en prends la responsabilité", a-t-il précisé. "Ma conception de l'écologie, c'est de rassembler l'ensemble des forces et des générations pour répondre aux défis qui nous attendent", a-t-il assuré. 

Cette déconvenue est d'autant plus ennuyeuse pour la campagne écologiste - les Verts sont actuellement crédités de près de 10% des voix en Ile-de-France - qu'elle fait suite à une série de polémiques parfois alimentées par les écologistes eux-mêmes, parfois par leurs opposants.

Par ordre d'apparition : les propos du maire de Grenoble, Eric Piolle, sur la 5G qui sert "à regarder du porno en HD dans l'ascenseur", ceux du maire de Lyon, Grégory Doucet, au sujet du Tour de France "machiste et polluant", la décision du maire de Bordeaux, Pierre Hurmic, de supprimer le sapin de Noël dans sa ville, la subvention de la municipalité de Strasbourg à un projet de mosquée conduit par une organisation islamiste, le choix de la maire de Poitiers, Léonore Moncond'huy, de sucrer une subvention aux clubs d'aviation en arguant du fait que "l'aérien ne doit plus faire partie des rêves d'enfants aujourd'hui", ou encore le refus d'un élu écologiste de Vincennes de subventionner un club de bateaux à voile pour lutter contre la pollution. 

S'il est difficile de prédire les effets de ces polémiques sur les prochains scrutins, il est à peu près certain que leurs opposants, y compris à gauche,  s'appuieront allègrement sur elles pour affaiblir les écologistes. D'autant que ces derniers, dopés par leur succès aux européennes de 2019 puis aux municipales de 2020, peuvent prétendre à une forme de leadership au sein de la gauche dans la perspective de 2022. 


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