Anne Hidalgo, une longue marche vers la présidentielle 2022

Publié le 1 juillet 2021 à 16h47

Source : TF1 Info

LEADERSHIP À GAUCHE - Anne Hidalgo multiplie les signaux avant une possible candidature à l'automne pour l'élection présidentielle. Si cette adepte de la patience en politique assure qu'il est encore "trop tôt", ses soutiens ont bien accéléré la cadence. Première mission : la faire connaître des Français.

En politique, Anne Hidalgo est, de longue date, une adepte du temps long. En 2014, celle qui avait patienté plus d'une décennie dans l'ombre de Bertrand Delanoë avait construit sa candidature et son image à l'occasion d'une longue campagne d'un an et demi, au terme de laquelle elle avait pris les clés de la mairie de Paris. 

Si elle n'est pas officiellement candidate à l'élection présidentielle d'avril 2022, l'édile parisienne est bien engagée dans une lente construction politique qui pourrait se résumer, à nouveau, par ce leitmotiv : l'éloge de la patience. Dans un contexte d'absence de leadership clair à gauche, l'objectif, pour ses soutiens, est avant tout de faire connaître leur possible candidate, cantonnée aujourd'hui autour de 7% d'intentions de vote dans cette perspective et surtout connue des Français pour les polémiques suscitées par ses opposants au sujet de sa gestion de la capitale.  

"Je contribue aujourd'hui, avec bien d'autres, à ce que sa candidature devienne une évidence. Aujourd'hui, ce n'est pas une évidence", a reconnu l'un de ses principaux soutiens, le sénateur PS Patrick Kanner, qui a inspiré la tribune d'élus appelant la maire de Paris à se porter candidate en 2022. "Vous connaissez la fable de La Fontaine : il ne faut pas partir trop vite", a-t-il ajouté, faisant référence au fameux "Le lièvre et la tortue". 

Un long tâtonnement

Interrogée de longue date sur ses possibles ambitions nationales, Anne Hidalgo a longtemps esquivé, assurant qu'elle se consacrerait à sa ville, car "il n'y a pas de plus bel engagement que Paris", comme elle l'affirmait le 3 juillet 2020, après sa réélection. "Je ne serai pas candidate", clamait-elle aussi dans une interview au Parisien, le 23 juillet de l'an dernier. "En revanche, je prendrai toute ma part au débat à partir de mon expérience et de mon action." 

"Je ne pense pas qu'elle veuille être candidate à la présidence de la République", expliquait même au Figaro, à l'époque, son ancien adjoint Jean-Louis Missika, tête pensante de la majorité parisienne et artisan de "Paris en commun", la plateforme qui a conduit Anne Hidalgo à sa réélection dans la capitale. "À chaque fois que j'en ai parlé avec elle, j'ai essayé de la pousser dans ses retranchements pour savoir si son refus était une posture. J'ai le sentiment que ça ne l'intéresse pas."

Et pourtant. Au lendemain des municipales de 2020, plutôt favorables à la gauche et aux écologistes, c'est le même Jean-Louis Missika qui a annoncé la transformation de "Paris en commun" en une "structure politique", de dimension nationale, pour y associer ces élus de gauche victorieux susceptibles de soutenir le même projet. Rebaptisée "Idées en commun", cette "plateforme" à la teneur social-écologique, qui a aussi porté la candidature malheureuse d'Audrey Pulvar aux régionales en Ile-de-France, fédère depuis le début de l'année 2021 un réseau de maires socialistes et défend leur bilan. C'est aussi "Idées en commun" qui héberge l'appel, publié mercredi, à une candidature présidentielle d'Anne Hidalgo. 

Bataille de leadership

Avant de convaincre les Français, la bataille de l'automne va se dérouler à gauche, pour déterminer qui peut assurer le leadership à la présidentielle.  Et pour l'heure, c'est le flou général : Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Fabien Roussel (PCF) sont d'ores et déjà candidats et les écologistes doivent départager trois candidats déclarés - Sandrine Rousseau, Yannick Jadot et Eric Piolle - à l'occasion d'une primaire interne. 

Dans cette bataille, le PS se verrait bien reprendre son ancienne position centrale. Considérablement affaibli depuis 2017, il a vu son blason se redorer à l'occasion des municipales, puis des régionales, à l'issue desquelles il est parvenu, contredisant les pronostics, à conserver ses cinq régions, souvent sans l'aide des pesants alliés écologistes. Une réussite qui s'est traduite par une accélération du calendrier chez les soutiens d'Anne Hidalgo, plus que jamais épaulée par son réseau naissant d'élus, à l'instar de Carole Delga, largement réélue à la tête de la région Occitanie, de la maire de Rennes, Nathalie Appéré, de celui de Montpellier, Michaël Delafosse ou encore celle de Nantes, Johanna Rolland, pour qui Anne Hidalgo a "toutes les qualités" pour la présidentielle. Sans oublier le soutien de Martine Aubry, qui fut jadis son mentor, et celui du patron du PS, Olivier Faure, qui voit en Anne Hidalgo une candidature naturelle, au point de pouvoir zapper l'étape d'une primaire.

De son côté, Anne Hidalgo - également hostile à une primaire - s'est lancée depuis le début de l'année dans un long tour de France des territoires de gauche, première étape logique d'une campagne qui ne dit pas son nom : Nancy le 19 février, Douai le 17 mars, l'Ardèche le 18 mai, Montpellier le 25 mai, Rennes le 9 juin, Quimper le 10 juin... En attendant un grand raout prévu annoncé à Villeurbanne pour le 12 juillet, puis un livre, Une femme française, à paraître en septembre. 

"Une gauche du réel"

L'objectif, assure Anne Hidalgo, n'est pas encore de se déclarer, mais de "rassembler, poser un diagnostic, des solutions", en remettant sur pied "un gauche de gouvernement, qui accepte de mettre les mains dans le cambouis", expliquait-elle mardi soir sur LCI, se revendiquant de la social-démocratie et du président américain Joe Biden.

L'idée est aussi d'en finir avec les polémiques intestines qui ont fracturé la gauche, ces derniers mois, autour de questions identitaires, raciales, de discrimination ou encore de laïcité, pour recentrer les débats sur "la question centrale du travail et du salaire", et plus largement sur les questions sociales, qui préoccupent les Français des villes comme ceux des territoires périurbains et ruraux. Cette fameuse "gauche du réel" vantée par Carole Delga au soir de sa réélection en Occitanie. 

En politique, il faut accepter de prendre des risques
Anne Hidalgo sur LCI

À ce titre, la possible candidate à la présidentielle s'est démarquée à de multiples reprises des autres formations de gauche, notamment sur le terrain des valeurs. À commencer par Jean-Luc Mélenchon, dont elle a récemment dénoncé "les ambiguïtés avec le cadre républicain", mais aussi ses alliés écologistes à la mairie de Paris, auxquels elle demandait sans ménagement, en novembre dernier, de "clarifier" leur position à l'égard des valeurs républicaines après une série de polémiques, dont l'une autour de l'hommage à l'enseignant Samuel Paty. 

"En politique, il faut accepter de prendre des risques", assurait-elle mardi sur LCI, prenant son bilan parisien en exemple. "Il faut assumer, ne pas laisser les gens indifférents, ne pas faire de l'eau tiède, savoir entraîner, rassembler." Ce qui n'interdit pas, manifestement, cette grande prudence tactique dont fait preuve la possible candidate socialiste à dix mois de l'élection présidentielle. 


Vincent MICHELON

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