Business France : tout comprendre à l'affaire qui embarrasse Muriel Pénicaud et Emmanuel Macron

Publié le 12 juillet 2017 à 10h01
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Source : Sujet JT LCI

DÉCRYPTAGE - Le rôle de la ministre du Travail Muriel Pénicaud, en plein débat sur la loi d'habilitation à réformer le code du travail par ordonnances, interroge, dans le cadre de l'organisation d'un déplacement d'Emmanuel Macron à Las Vegas alors qu'il était encore ministre de l'Economie. Retour sur cette affaire.

Muiel Pénicaud le reconnaît elle-même ce mercredi : "Il y a eu une erreur de procédure". Seulement voilà : un an et demi après la désormais fameuse soirée à Las Vegas durant laquelle Emmanuel Macron avait rencontré des dirigeants, l'affaire Business France met des bâtons dans les roues de celle qui est devenue ministre du Travail. Une affaire d'autant plus embarrassante pour la ministre, qui doit défendre ces jours-ci le projet de loi d'habilitation à réformer le droit du travail par ordonnances, principale réforme voulue par Emmanuel Macron. Zoom sur une affaire qui tombe au plus mal pour le gouvernement.

De quoi parle-t-on ?

En mars 2017, Le Canard Enchainé dévoile les coulisses du Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas. Une grand-messe mondiale de l'innovation technologique durant laquelle Emmanuel Macron avait été ovationné par plus de 500 personnalités et dirigeants de start-up français. "Cette opération de séduction, montée dans l'urgence, à la demande expresse du cabinet du ministre, a été confiée au géant Havas par Business France (l'organisme de promotion de la French Tech dépendant de Bercy) sans qu'aucun appel d'offres ait été lancé", précise Le Canard Enchaîné. L'hebdomadaire satirique révèle alors que l’Inspection générale des finances (IGF) s'est emparée du dossier, soupçonnant un délit de favoritisme. Le Canard évoque également le coût de la soirée : "381.759 euros, dont 100.000 rien que pour l'hôtel, où la moindre chambre était facturée plus de 300 euros la nuit".

Le périlleux dossier de la réforme du Code du travail sur le bureau de Muriel PénicaudSource : JT 20h Semaine

Quelle est la défense d'Emmanuel Macron ?

Au moment où l'affaire éclate, en pleine campagne présidentielle, son entourage monte au front : "M.Macron n'est absolument pas concerné par ces soupçons". "Je n'ai pas pris connaissance de cela, mais je ne pense pas que ce soit mon ministère qui ait organisé un événement sans appel d'offres", réagit à l'époque le principal intéressé. Dans la foulée, le ministre de l'Économie et des Finances Michel Sapin dédouane à son tour le candidat En Marche!.

Qu'en pense la justice ?

Le lundi 13 mars, le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire pour favoritisme, complicité et recel de favoritisme. Elle fait suite à un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) du 8 mars. Ce n'est "en aucun cas une affaire Macron. C'est une affaire Business France", insiste alors son entourage, faisant valoir que le choix du prestataire "n'incombait aucunement au ministre ou à son cabinet". "Ma probité n'est pas mise en cause", assure Emmanuel Macron le lendemain.

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Pourquoi l'affaire rebondit-elle ces jours-ci ?

Essentiellement car la justice a passé la vitesse supérieure. Des perquisitions, conduites par des policiers de l'office anticorruption (Oclciff), ont en effet été menées simultanément le 20 juin dans les locaux d'Havas à Puteaux et dans ceux de Business France à Paris.

Mais surtout, depuis que l'affaire a éclaté en mars, la directrice de Business France, Muriel Pénicaud, est devenue ministre du Travail. Pas de quoi inquiéter Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement : "Business France a passé un marché, une commande, il y a eu une irrégularité. Muriel Pénicaud, qui était directrice générale, a provoqué immédiatement un audit, puis une inspection générale, puis l'inspection générale a validé un accord, et c'est elle qui a donné cette information, donc je ne suis pas inquiet sur les conséquences de cette information".

Sauf que, une semaine plus tard, Libération publie des informations qui vont à contre-courant. Le quotidien affirme que le cabinet d'Emmanuel Macron était impliqué dans l'organisation de la soirée, et soutient que Muriel Pénicaud avait "validé" certaines dépenses relatives à l'organisation de cette soirée. Un "contournement des règles" de l'agence publique chargée de faire la promotion de la France auprès des investisseurs étrangers qu'elle dirigeait. 

Mercredi 12 juillet, nouveau pavé dans la mare, par l'entremise du Canard enchaîné, qui révèle un nouvel audit d'Enst & Young, qui laisse lourdement entendre que Business France ne voulait pas entendre parler d'un autre organisateur que Havas pour l'événement.

Que dit Muriel Pénicaud ?

Muriel Pénicaud plaide l'erreur honnête, en se défendant : "J'ai immédiatement déclenché un audit, interne et externe". "Il y a eu ensuite une inspection générale qui a confirmé qu'effectivement il y avait eu erreur et que d'autre part j'avais pris les bonnes mesures. Rien d'autre à dire", a-t-elle conclu. "C'est moi qui ai alerté le conseil d'administration, c'est moi qui ai déclenché l'audit", a-t-elle insisté, qualifiant l'idée qu'elle ait pu étouffer l'affaire de "blague". Sauf que, depuis, de nouvelles révélations, publiées par Libération ou le Journal du Dimanche, l'accusent, au mieux, de néglience, au pis, d'avoir sciemment tronqué une partie du rapport écrit par l'organisme interne en charge de l'enquête sur cette affaire.

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La ministre a à nouveau réagi, après que l'enquête préliminaire pour favoritisme et recel de favoritisme a été confiée à des juges. Dans un communiqué, elle a déclaré "prendre acte" de l'ouverture de la procédure" et assuré "avec la plus grande fermeté [n'avoir] rien à se reprocher. Si Muriel Pénicaud devait être mise en examen dans cette affaire, elle devrait, selon la règle mise en place par le gouvernement, aussitôt démissionner. Ce qui ne serait pas une bonne nouvelle pour l'exécutif, alors que l'intéressée porte sur ses épaules la réforme du code du travail, mais aussi, dans le futur, celle de l'assurance-retraite.


La rédaction de TF1info

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