SEXISME - Suite à l’affaire Baupin, plusieurs collaboratrices parlementaires ont constaté que la parole s’était "libérée" et ont décidé de lancer "une initiative qui montrerait le caractère massif et quotidien du sexisme dans le milieu politique". Elles ont donc lancé Chaircollaboratrice.com, un site internet recensant de nombreuses anecdotes, toutes vécues dans les couloirs du Parlement ou des ministères.
"- Bonjour, je vais prendre un café allongé s’il vous plaît. – Vous n’allez quand même pas vous allonger tout de suite mademoiselle ?" "C’est mieux que ce soit toi qui sois venue, tu es jolie, souriante, c’est parfait, je préfère" "- Tu sais, c’est marrant, je n’ai jamais couché avec une arabe ! – C’est marrant, moi je n’ai jamais giflé un député !"
Des anecdotes comme celles-ci, il y en a des dizaines sur le site Chaircollobatrices.com, lancé ce lundi par des collaboratrices parlementaires victimes de sexisme. Car oui, toutes ces phrases ou ces situations ont été vécues, dans les couloirs de l’Assemblée, du Sénat ou des grands ministères français.
"Vous n'allez pas vous allonger tout de suite, mademoiselle ?" #chaircollab #directan https://t.co/YRKqT8x5lk pic.twitter.com/6jOLLWHARF — Chair collaboratrice (@chaircollab) 17 octobre 2016
Pour les membres du collectif Chair collaboratrice, dans leur travail, le sexisme est quotidien. Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde daté du mardi 18 octobre, quatre d’entre elles expliquent que "l’ambiance générale est mauvaise, disons-le, dans les palais de la République" mais que "pour peu que vous soyez une femme, une collaboratrice qui plus est, vous vous sentirez vite étouffée par les regards lourds, les sous-entendus graveleux et les réflexions humiliantes qui ne font rire que leurs auteurs."
"Attention je vais te Baupiner", "je peux toucher ton épaule ou c’est du harcèlement ?"
Pour elles, les affaires Baupin, Tron et DSK sont "des cas extrêmes de harcèlement ou d’agression sexuelle, mais les propos et les agissements sexistes sont le quotidien des femmes en politique, qu’elles soient élues ou collaboratrices". "A l’issue de l’affaire Baupin, l’ambiance a empiré pour les femmes : ‘Attention je vais te Baupiner’, ‘je peux toucher ton épaule ou c’est du harcèlement ?’, ‘Quand même, les dénonciatrices, elles devaient avoir un mobile politique’, ‘Baupin, mais tu sais, ce n’est pas de se faute, c’est sa mère/sa femme’. Ces réactions sont révélatrices du machisme de ce huis clos politique où les femmes sont souvent perçues comme illégitimes."
Les collaboratrices et collaborateurs d’élus ont un contrat de travail qui ne les protège pas, qui les rend dépendants de leurs employeurs"
Chair collaboratrice
Selon elles, la politique est un milieu masculin où la parité est une utopie. Pour les hommes, le sexisme est un moyen de montrer aux femmes qu’elles n’ont pas leur place dans ce monde. Elles expliquent que tout cela tient à l’impunité en vigueur pour les auteurs de tels actes, à la pression qui pèsent sur les femmes politiques, à la précarité de leur métier.
Elles écrivent dans Le Monde que "le travail de collaboratrice et collaborateur est particulier : il suppose une proximité avec l’employeur (…) Très souvent, la collaboratrice ou le collaborateur travaille tard, fait des déplacements, le tout en tête à tête avec l’élu." "Les collaboratrices et collaborateurs d’élus ont un contrat de travail qui ne les protège pas, qui les rend dépendants de leurs employeurs et qui ne peut pas permettre à des femmes en situation de harcèlement de se sentir en sécurité et de se confier."
Alors que la semaine dernière, la députée Isabelle Attard a accusé Jean-Michel Bayet de "violences"commise en 2002 envers une collaboratrice, l’Assemblée nationale a publié ce lundi un communiqué recensant les mesures prises pour lutter contre le harcèlement dans l’hémicycle. Depuis plusieurs années maintenant, les collaborateurs peuvent faire part de leurs démarches juridiques ou de leur prise en charge psychologique à un référent, habilité à les orienter vers le déontologue de l’Assemblée nationale.