MESURES SANITAIRES - Emmanuel Macron a repoussé vendredi 29 janvier le scénario d'un reconfinement immédiat du pays, allant à l'encontre de plusieurs avis scientifiques. Sur le plan sanitaire, les experts n'en démordent pas : la France sera bien contrainte de se reconfiner.
Un choix politique contre le tout-sanitaire. En décidant, vendredi 29 janvier, de repousser le reconfinement du pays, Emmanuel Macron a assumé le pari, risqué, de laisser un répit à des Français usés par les restrictions sanitaires à répétition. Un choix fondé, selon l'exécutif, sur la relative stabilité des données épidémiologiques - même si la France se situe sur un "plateau haut" - alors qu'une flambée due aux variants était redoutée début février, sur le modèle britannique.
Ce faisant, le chef de l'État a écarté un scénario vers lequel penchaient, depuis déjà plusieurs semaines, les experts, mais également, au sein de l'exécutif, le ministre de la Santé. Des pressions insistantes, d'ailleurs. Les prises de positions du président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, jugeant "urgent" de reconfiner le pays courant janvier, avaient même suscité des crispations avec le sommet de l'État.
"Quand on entend les commentaires, personne ne réalise bien les dégâts que fait un confinement", s'agaçait, auprès de LCI, une source gouvernementale au lendemain des annonces de Jean Castex. "On a l'impression que c'est on/off et que tout redémarre comme avant... Or, ce n'est pas banal. Il y a des dégâts sur les jeunes, sur les écoles, sur l'emploi. Prendre la décision du confinement, c'est être convaincu qu'il n'y a pas d'autre alternative."
Les scientifiques n'ont pas varié
Qu'ils aient accepté le choix du président de la République ne signifie pas pour autant qu'ils s'y soient ralliés. Les experts de la crise sanitaire, en réalité, n'ont pas varié d'un iota, et restent convaincus que la France n'a d'autre choix que de se confiner dans les meilleurs délais, pour anticiper l'inéluctable.
L'infectiologue Karine Lacombe n'a pas hésité à pointer, dimanche 31 janvier sur LCI, "le risque" pris par le gouvernement en décidant de repousser le confinement. "Le risque d'attendre, peut-être, qu'on soit au pied du mur", a-t-elle ajouté. "Il vaut mieux prévenir que guérir. Des mesures très en amont d'une catastrophe sanitaire marchent beaucoup mieux que lorsqu'on est dans l'urgence. Le confinement qui sera décidé [par la suite] sera peut-être plus long, plus difficile et son impact social et économique également."
Si Jean-François Delfraissy ne s'est pas exprimé publiquement sur le choix de l'exécutif, il avait insisté, à la veille des annonces, sur le caractère impératif d'une telle mesure. "Il y a urgence à une semaine", avait-il expliqué devant les députés. "En ce moment, les services de réanimations ne sont pas pleins. On voit bien la tension qu'il peut y avoir entre une vision sanitaire pour éviter un drame en mars, et faire attention à la santé mentale des plus jeunes et à l'acceptabilité dans la population."
Les scientifiques s'en tiennent aux modélisations réalisées face aux variants, notamment britannique, qui font craindre une flambée épidémique. Expliquant ne "pas vraiment comprendre" le choix de l'exécutif, l'épidémiologiste et biostatisticienne de l'Inserm Dominique Costagliola était sur cette ligne, mardi 2 février sur France 5. "A l'heure actuelle, on est sur un plateau très haut", affirmait-elle. "Arrivent par-dessus des variants plus transmissibles. D'ici la deuxième quinzaine de février, ou la première de mars, le variant anglais sera majoritaire. À mesure égale, les modèles sont 'terrorisants'. On est bien au-delà de la première vague."
Une position partagée par l'infectiologue Eric Caumes, pour qui le gouvernement prend "un gros risque". "On est déjà presque à un seuil de saturation des réanimations, on est en train de déprogrammer pour pouvoir accueillir plus de patients. Donc, oui, on est sur dans une phase ascendante de l'épidémie", expliquait-il en début de semaine sur BFMTV. L'infectiologue observait, malgré tout, que l'on a accordé jusqu'ici "trop de place au sanitaire, aux épidémiologistes, aux mathématiciens, qui prévoient des catastrophes", au détriment d'autres approches de la crise.
Une source au sein de l'exécutif a qualifié de "trou de souris" l'option prise par Emmanuel Macron la semaine dernière. Avant la conscience qu'une seule étincelle dans les précieux indicateurs de l'épidémie pourrait conduire l'exécutif à changer de braquet et à rallier la position des scientifiques, comme il l'a déjà fait d'ailleurs au printemps, puis à l'automne dernier.
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