Valérie Pécresse (LR) et Eric Zemmour (Reconquête!) ont débattu ce jeudi sur TF1 et LCI.Un échange de plus d'une heure, pendant laquelle ils ont multiplié les accusations l'un envers l'autre.Passes d'armes sur Poutine, le nucléaire, les logements sociaux ou encore le cannabis, nous avons tranché.
Le débat était houleux. Et ponctué de querelles. Ce jeudi 10 mars, Valérie Pécresse et Eric Zemmour ont ferraillé pendant une heure et demie sur TF1 et LCI. Un "Face à Face" qui devait permettre aux deux candidats au coude-à-coude de se distinguer, à 31 jours du premier tour de l'élection présidentielle. Chacun à son tour a donc accusé l'autre de revirement, d'accointance avec l'islam ou encore de proximité avec Vladimir Poutine... Des mises en cause chaque fois qualifiées de mensonges. Qui a dit vrai ? Notre équipe des Vérificateurs a tranché.
Pécresse a décrit Poutine comme un "démocrate" ? C'est faux
C'est Eric Zemmour qui a ouvert les hostilités. Celui qui prenait en décembre dernier "le pari" que la Russie n'envahirait pas l'Ukraine a accusé à Valérie Pécresse d'avoir changé d'avis sur le président russe. Selon le candidat d'extrême droite, son opposante aurait décrit Vladimir Poutine comme un "démocrate autoritaire", quelques semaines à peine avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie. C'est faux. Comme l'a rappelé l'actuelle présidente d'Île-de-France, celle-ci a simplement décrit Vladimir Poutine comme un "dirigeant autoritaire", le 23 février dernier. Au contraire, c'est le candidat de Reconquête!, qui a lui-même qualifié le président russe de "démocrate autoritaire" le 28 février dernier, sur RTL.
Eric Zemmour partisan d'une légalisation du cannabis ? C'est exagéré
Valérie Pécresse a, elle aussi, ciblé Eric Zemmour. Elle a fait remarquer ses revirements sur plusieurs sujets, à commencer par le cannabis. "Vous avez été pour la dépénalisation du cannabis", a lancé la candidate LR, ce que l'intéressé a nié en bloc. Selon lui, il a seulement évoqué le fait qu'il y "réfléchissait". Qu'en est-il réellement ? Sur le plateau de CNEWS en mai 2021, l'ancien journaliste s'expliquait ainsi : "Vous devinez que spontanément j'ai plutôt un tempérament répressif et que je n'ai pas du tout envie que mes enfants fument du cannabis. Mon premier réflexe est de dire qu'il faut réprimer encore plus".
Dans la foulée, il émettait toutefois quelques réserves : "J'essaye de réfléchir en fonction des faits et des réalités. Je me dis que ça ne marche pas ! Peut-être qu'il faut trouver une autre solution." De là à songer à une possible légalisation ? "Je me demande - oui j'en suis arrivé là - si on ne devrait pas organiser la légalisation ordonnée du cannabis", confessait Eric Zemmour. Il s'agit ici de la sortie que l'on pourrait qualifier de plus favorable à la légalisation du cannabis exprimée par le candidat de Reconquête!. Valérie Pécresse déforme donc sa position, puisqu'il ne s'est jamais prononcé de manière formelle en faveur d'un marché légal.
🔴 @vpecresse a accusé @ZemmourEric de diffuser des "fake news" durant le débat. En réalité, l'un et l'autre ont déjà relayé un certain nombre de chiffres trompeurs, depuis le début de #FaceAFaceTF1LCI . Nos vérifications en live ici 👇 https://t.co/b8486CexDG — verif_TF1LCI (@verif_TF1LCI) March 10, 2022
Un revirement de Pécresse sur le nucléaire ? C'est exact
La question du nucléaire, arrivée très vite dans le débat, a donné lieu à un nouvel échange musclé entre les deux candidats. Évoquant l'Allemagne, Eric Zemmour a souligné que c'était "madame Merkel qui a arrêté le nucléaire alors que madame Pécresse, elle en 2018, disait qu'il fallait sortir du nucléaire et qui pousse les énergies renouvelables". La candidate LR a bien changé son fusil d'épaule et évolué sur cette question, comme l'a souligné son adversaire. Très précisément, voici ce que disait Valérie Pécresse à l'époque, en sa qualité de présidente de région : "Aujourd'hui, la région engage sa responsabilité pour dessiner un chemin de progrès vers une Île-de-France décarbonée en assumant de sortir progressivement du nucléaire." Or, ces derniers mois, l'élue muée en candidate a montré une inflexion sur cette position. Elle plaide désormais pour un "plan de relance du nucléaire", sans lequel il serait impossible d'atteindre "le zéro carbone en 2050". La candidate Les Républicains a également plaidé pour une "réflexion" sur la construction de futurs EPR en France.
"Valérie Pécresse a signé une tribune avec Rokhaya Dialo" ? C'est faux
Les deux candidats se sont aussi écharpés sur une tribune prétendument signée par Valérie Pécresse en 2010 avec Rokhaya Diallo, journaliste et militante antiraciste. Une occasion pour Eric Zemmour d'accuser son opposante de jouer un "double jeu" avec l'islam. Et cette dernière de répliquer qu'il s'agissait en réalité d'une tribune "pour avoir plus de boursiers dans l'enseignement supérieur". "C'est une fake news", a martelé Valérie Pécresse.
De fait, ces accusations à son endroit sont fausses… et ne sont pas nouvelles dans le camp de l'extrême droite. Valérie Pécresse a simplement contribué en 2010 à un ouvrage collectif, dirigé par cinq personnalités : Lilian Thuram, Rokhaya Diallo, Pascal Blanchard, François Durpaire et Marc Cheb Sun. Dans cet ouvrage, les cinq auteurs font un appel "pour une République multiculturelle et postraciale". Et interrogent 100 personnalités de tous horizons, leur demandant à tour de rôle une proposition en matière d'identité nationale et d'intégration. C'est ici que l'on retrouve Valérie Pécresse, alors ministre de l'Enseignement supérieur, aux côtés de 99 autres personnalités, telles Christiane Taubira, Rama Yade, Jeannette Bougrab, ou encore Nicolas Sarkozy. Valérie Pécresse, elle, proposait notamment "d'aider les jeunes à oser" en développant notamment des lycées d'excellence. C'est sa seule contribution à cet ouvrage.
Valérie Pécresse souhaite-t-elle conserver la loi SRU ? Oui, mais pas à l'identique
Eric Zemmour s'en est aussi pris à son adversaire en évoquant les questions liées au logement. Valérie Pécresse, redoute-t-il, "va mettre à proximité de toutes les villes et tous les villages de France des barres HLM, des immeubles avec des immigrés". Pour quelle raison ? Parce que la candidate LR ne "supprime pas la loi SRU", alors que lui s'engage à le faire s'il est élu.
En pratique, Valérie Pécresse n'appelle en effet pas à la suppression totale de cette loi, qui oblige notamment certaines communes à compter un nombre minimum de logements sociaux, proportionnel à la taille de leur parc résidentiel. "Sur la loi SRU, j’ai dit à Chartres que je mettais fin à cette obligation et qu'on fera des contrats avec chaque ville pour que les maires retrouvent la maîtrise de leur urbanisme", a-t-elle rétorqué sans tarder à Eric Zemmour. Depuis le début de sa campagne, elle a réaffirmé son souhait de limiter à 30% la proportion de logements très sociaux. L'enjeu à ses yeux sera de "desserrer l'étau de la loi SRU" pour y intégrer "toutes les formes de logements intermédiaires" ainsi que "l'accession sociale à la propriété".
La candidate affiche une posture libérale, qui se traduit par le désir de "lever les entraves à la construction" dans les villes où souhaitent s'implanter les Français. Elle compte ainsi faire "confiance aux maires", jugeant absurde "dans un territoire rural" la règle "zéro artificialisation nette" des sols. À défaut de vouloir abroger la loi SRU, l'élue LR entend ainsi faire évoluer la législation.
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