Verif'

Législatives : la charte imposée aux candidats de la majorité est-elle légale ?

Publié le 17 mai 2022 à 14h38, mis à jour le 18 mai 2022 à 9h48

Source : JT 13h Semaine

Pour être investis sous l'étiquette "Ensemble", les candidats aux législatives doivent signer 12 engagements communs.
Mais une fois élus, les députés ne sont pas liés par cette charte, qui n’a pas de valeur juridique, selon notre partenaire Les Surligneurs.

Ce sont 12 engagements auxquels doivent souscrire les candidats investis par Ensemble (Renaissance ex-LaREM, MoDem et Horizons). La majorité présidentielle soumet la signature d’une charte à ces derniers en vue des législatives et d’un futur mandat pour certains d’entre eux. Une condition qui était nécessaire pour être investi candidat de la majorité dans sa circonscription.

"Tout mandat impératif est nul"

Si Emmanuel Macron et les anciens Marcheurs en ont décidé ainsi, ce texte est-il pour autant légal ? François Asselineau a été l’un des premiers politiques à s’indigner sur Twitter du caractère inconstitutionnel de cette charte. Ces critiques ont été reprises par d’autres comptes, parfois de manière plus virulente.

Un engagement en particulier irrite les aspirants juristes. Le premier en l’occurrence, qui se trouve inscrit dans les principes généraux de cette charte, que nous avons pu consulter : "Les candidats soutiendront l’ensemble des engagements pris par Emmanuel Macron devant les Françaises et les Français dans le cadre des deux tours de l’élection présidentielle d’avril 2022". Concrètement, les candidats de la majorité doivent une certaine loyauté au président de la République en votant en faveur de ses promesses de campagne, lorsqu’elles seront discutées à l’Assemblée nationale. Mais cet engagement précis pourrait aller à l’encontre de la Constitution et de son article 27, selon lequel "tout mandat impératif est nul". À savoir un mandat dans lequel le pouvoir est délégué et où l'élu est obligé de respecter les directives de ses électeurs.

Sophie Lamouroux, maitre de conférences en droit public à l’université d’Aix-Marseille et membre du collectif des Surligneurs, rappelle effectivement que "c’est le mandat représentatif et non pas le mandat impératif qui prévaut". De plus, un député ne peut être "remis en cause selon qu’il vote dans un sens ou dans un autre, car le vote est personnel", renvoyant là aussi à l’article 27. 

En revanche, il y a une temporalité précise pour que la Constitution soit invoquée, souligne ici Sophie Lamouroux. "L’article 27 s’applique lorsque l’élection est terminée. Avant l’élection, cette charte a une dimension politique et partisane pour le candidat. Après l’élection, le député est tenu par les textes qui régissent le fonctionnement de l’Assemblée nationale." Et plus par cette charte, qui n’a aucune valeur juridique, mais seulement politique.

Concrètement, un député ne sera donc pas tenu par cette charte s’il décide de ne pas soutenir par son vote les engagements de campagne d’Emmanuel Macron, ou encore la loi de finances, peut-être le vote symbolisant le plus son soutien ou non à la politique du gouvernement. En revanche, il peut être exclu de son groupe parlementaire, une décision qui appartient à son président et à ses membres. 

Interrogée sur ce sujet, la majorité présidentielle ne souhaite pas évoquer d’éventuels blocages de députés en cours de mandat : "On est plutôt dans une optique de large rassemblement. C’est ce que vient sceller la charte". En 2017, Emmanuel Macron avait déjà tenu à s’attirer le soutien de la majorité parlementaire en faisant signer un "contrat avec la Nation" aux futurs députés qui allaient la composer. Un texte qui n’avait, là non plus, pas de valeur contraignante, expliquait déjà notre partenaire Les Surligneurs.

Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N'hésitez pas à nous écrire à l'adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur Twitter : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.


Caroline QUEVRAIN

Tout
TF1 Info