POLITIQUE - A moins d’un mois des élections européennes, la tête de liste LaREM Nathalie Loiseau publie une bande dessinée consacrée à l’Europe. L'ouvrage est accusé d'approximations, voire de "banaliser" l'homophobie. Son équipe de campagne la défend auprès de LCI. De quoi parle-t-on ?
La campagne européenne à peine lancée, Nathalie Loiseau doit essuyer de nouvelles critiques. Après les révélations sur sa présence sur une liste d'extrême droite lorsqu'elle était étudiante, c'est une bande-dessinée écrite par l'ancienne ministre des Affaires européennes, et destinée aux enfants, qui est dans le viseur. Des associations et des opposants politiques, notamment au PS, l'accusent de propager des stéréotypes, voire de banaliser l'homophobie à travers cette publication.
De quoi s'agit-il ? Réfugiés, frontières, terrorisme, glyphosate ou encore mariage pour tous... Dans "L'Europe en BD", des éditions Casterman, deux adolescents, Rim et Nathan, vont découvrir le fonctionnement de l'UE sur une cinquantaine de pages . "Nathalie Loiseau a rédigé cet ouvrage, avec son fils, quand elle était au Quai d'Orsay", raconte à LCI Agnès Biltgen, chargée des relations presse jeunesse aux éditions Casterman. "C'est une bande-dessinée qui porte les valeurs de la France et celle de Nathalie Loiseau", ajoute un membre de son équipe de campagne, contacté par LCI.
Sur l'ouvrage et le site de la maison d'édition, la tête de liste de La République en marche (LaREM) aux européennes est présentée comme ancienne ministre chargée des Affaires européennes où elle est restée de juin 2017 à mars 2019, et non comme candidate aux élections. Pourquoi ? "Il était prévu que l'ouvrage paraisse en période d'élections européennes", explique son éditrice. "Son chef de cabinet nous a juste demandé de ne pas le mettre en avant pour ne pas altérer la campagne. Ce n'est pas un outil de campagne électorale, il s'agit seulement d'un livre pro-européen."
Des approximations critiquées
Un livre pro-européen où la question sécuritaire est omniprésente. "Cet ouvrage décrit l'état actuel de l'Europe, de façon vulgarisée pour les enfants", justifie son équipe de campagne. "Elle aborde les grands enjeux du moment, avec des éléments simples à comprendre." Dès les premières cases, les deux protagonistes s'interrogent sur les réfugiés en Grèce. Puis, le personnage de Rim aborde le thème de la libre circulation des personnes. "Tu entres dans un pays comme si c'était chez toi et tu trouves ça normal", lance-t-elle avant d'ajouter deux cases plus loin : "Si tu veux aller, mettons, aux États-Unis, tu demandes la permission d’abord, tu remplis la tonne de papiers, tu achètes des dollars, bref, tu ne l’improvises pas, ton voyage."
Très rapidement, les deux adolescents reviennent sur la Grèce, confondant les termes "migrants" et "réfugiés", ce qui a déclenché les critiques. Un migrant est en effet une personne qui a quitté son pays ou sa région d'habitation pour des raisons économiques, politiques ou culturelles. Le terme "réfugié" indique un statut officiel, celui d’une personne qui a obtenu l’asile d’un Etat tiers, comme le rappelle la convention de Genève de 1951.
Les deux adolescents poursuivent leur conversation sur les différentes politiques des pays européens en matière de droit d'asile et d'accueil des réfugiés. Là encore, matière à une polémique.
"Certains pays n’en ont pas voulu DU TOUT !
- Hein ? Lesquels ?
- La Pologne, la Hongrie…
- Même pas un peu ?
- Zéro, ils ont dit : pas de musulmans chez nous ".
Interrogé sur ce lien entre réfugiés et musulmans, l'équipe de campagne explique que ce sont les propos attribués des pays cités, et non ceux de la candidate LaREM. "Encore une fois, il s'agit d'une BD explicative à destination des enfants sur l'état de l'Europe".
"Deux garçons qui se marient, en Pologne, même pas en rêve"
Un peu plus loin, la planche écrite pour parler de la diversité a beaucoup fait réagir. "Deux garçons qui se marient, en Pologne, même pas en rêve", lance le personnage d'un enfant polonais. Sur l'image, un couple d'hommes, sourire aux lèvres et costumes de cérémonie, est barré d'une croix rouge. Une autre élève affirme que "chaque pays doit pouvoir faire comme il veut". Et le professeur conclue : "Nous avons des différences, c’est sûr, et il faut se respecter. D'ailleurs voici la devise de l’Europe : unis dans la diversité." Plusieurs tweets de politiques ou d'associations ont dénoncé ce qu'ils considèrent comme "une banalisation de l'homophobie", ce dont l'ancienne ministre s'est défendue.
Chère @NathalieLoiseau , Ainsi, dans votre BD sur l'Europe, "le mariage entre deux garcons en Pologne, c'est même pas en rêve". Comprenez-vous que beaucoup jugent indigne de faire passer une hostilité violente aux droits des #LGBT pour de la diversité culturelle? #ViveLEuropeLibre pic.twitter.com/qcTSKq4EJa — Benoît Hamon (@benoithamon) April 29, 2019
Décrire la Pologne telle qu’elle est ne veut pas dire qu’on l’approuve. Quant à la lutte contre l’homophobie, ceux qui me connaissent savent à quoi s’en tenir. Lisez ceci par exemple. pic.twitter.com/69UvlHn8Yd — Nathalie Loiseau (@NathalieLoiseau) 28 avril 2019
"Cet ouvrage est une ode à la tolérance, pas à la tolérance de l’intolérance. Nathalie Loiseau a un engagement de longue date contre l’homophobie, un engagement connu," insiste un membre de son équipe de campagne. "C'est une fausse polémique complète." La tête de liste s'est d'ailleurs expliquée dans un tweet en réponse à Guillaume Mélanie, co-président d'Urgence Homophobie. "Décrire la Pologne telle qu'elle est ne veut pas dire qu'on l'approuve", écrit-elle.
"Faire répondre à un enfant 'chacun fait ce qu'il veut', c'est extrêmement maladroit, c'est accepter les idées ou postures homophobes de nos voisins", insiste Guillaume Mélanie, sollicité par LCI. "Au delà des propos, le visuel pose problème. Que doivent comprendre les enfants quand ils voient un couple de deux hommes barré d'une énorme croix rouge ?"
"Perdu de chez perdu"
Au fil des pages et des dessins qui défilent, difficile de comprendre où l'ouvrage veut en venir. Le Brexit y est abordé de façon très rapide. Puis vient le thème du glyphosate, sur plusieurs pages, renvoyant à la question des lobbies, puis au fonctionnement de l’Union européenne... On est "perdu de chez perdu", commente un personnage au sujet du fonctionnement de l'Union européenne.
Après avoir évoqué la lutte contre le terrorisme et l'accord entre les Etats membres pour bloquer "tous les contenus qui soutiennent le terrorisme", l'ouvrage se referme sur un lexique consacré à l'Europe recensant la Cour nationale du droit d'asile, le député européen ou encore l'acronyme Daesh.
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