SÉNAT – La proposition de loi portée par la sénatrice LR du Val d'Oise Jacqueline Eustache-Brinio visant à interdire le port de signes religieux aux parents accompagnant des sorties scolaires a été adopté mardi, malgré des demandes de retrait de la gauche et l'avis négatif du ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer.
Au lendemain de l’attaque perpétrée par un ancien candidat FN contre la mosquée de Bayonne, attaque au cours de laquelle deux fidèles ont été blessés, il n'était pas question pour la sénatrice LR Jacqueline Eustache-Brinio LR de retirer sa proposition de loi visant à interdire le port de signes religieux aux parents accompagnant des sorties scolaires.
"Cette proposition de loi de dix pages n’a absolument aucun rapport avec l’attentat perpétré à Bayonne lundi. Elle concerne l’école, les sorties scolaires, la protection des enfants dans le cadre des sorties scolaires qui font partie du temps scolaire, ça n’a absolument rien à voir avec le reste. Elle sera donc bien proposée, et examinée dès 14h30" , a assuré Douglas Potier, collaborateur de la sénatrice à LCI ce mardi matin.
Les appels répétés, à gauche, à laisser le texte de côté n'y ont rien fait : le Sénat, à majorité de droite, a adopté mardi soir la proposition de loi par 163 voix contre 114. Les 23 sénateurs LaREM ont voté contre.
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A la suite de l'attaque de la mosquée de Bayonne, la sénatrice (ex-PS) des Bouches-du-Rhône Samia Ghali avait appelé le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau à renoncer à l'examen de cette proposition de loi. "Ce serait un geste de sagesse", a-t-elle dit sur France info, d'autant qu'elle juge la proposition de loi "déjà dangereuse et haineuse".
"Les Républicains devraient peut-être s'interroger sur l'opportunité aujourd'hui d'avoir ce débat-là", avait également estimé sur LCI le député LREM Aurélien Taché, représentant de l'aile gauche de la majorité et farouche opposant du texte.
Dans une tribune paru sur le site du JDD, la sénatrice de Paris Esther Benbassa, membre de la commission des lois, a contesté la présentation du texte, sous ce titre : "N'avons-nous pas mieux à faire? Et si nous pensions plutôt à nos 9 millions de pauvres ?"
Mais le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau leur a opposé une fin de non-recevoir, estimant dans un tweet que mettre le texte "sous le tapis serait la pire des choses à faire".
Le débat peut et doit se passer en toute sérénité au parlement. Sinon il aura lieu dans la rue avec le risque de violences que cela comporte. Les Français sont très majoritairement favorables à cette proposition de loi. La mettre sous le tapis serait la pire des choses à faire. https://t.co/OAlT3UhjJL — Bruno Retailleau (@BrunoRetailleau) October 29, 2019
"Une loi serait contre-productive"
La proposition de loi "tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes qui participent au service public de l'éducation", a été déposée en juillet. Depuis, la polémique sur le port du voile a été relancée par un élu du RN et la droite ne cesse de presser Emmanuel Macron de s'exprimer sur la laïcité. Le chef de l'Etat, tout en refusant de "céder à la précipitation", a exhorté lundi les représentants du culte musulman à "combattre" davantage l'islamisme et le communautarisme.
Le texte voté dans l'hémicycle du Palais du Luxembourg vise à modifier le code de l'éducation pour étendre "aux personnes qui participent, y compris lors des sorties scolaires, aux activités liées à l'enseignement dans ou en dehors des établissements" l'interdiction des signes religieux ostensibles posée par la loi de 2004.
Lors de son intervention dans l'hémicycle, durant l'examen, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer s'est opposé au texte, jugeant qu'une nouvelle loi serait "contre-productive" irait "au-delà du nécessaire". "Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires", a-t-il ajouté, estimant qu'il fallait "envoyer aux enfants le message que leurs parents sont les bienvenus". Après le vote du Sénat en première lecture, le texte sera examiné à l'Assemblée nationale, où la majorité devrait logiquement le rejeter.