"Mieux former et accompagner les professionnels qui entourent les enfants" : la secrétaire d'État Charlotte Caubel présente son plan contre les violences faites aux enfants

Publié le 8 juin 2023 à 12h54, mis à jour le 26 juin 2023 à 12h54

Source : Sujet TF1 Info

La secrétaire d'Etat à l'Enfance a présenté mardi en Conseil des ministres les grands axes d'un futur plan de lutte contre les violences faites aux enfants.
Pour TF1info elle a présenté quelques-unes des mesures, parmi lesquelles une meilleure formation des professionnels ou une campagne choc.

Le constat est alarmant. "Au moins 160.000 enfants chaque année sont victimes d'infraction sexuelle, et un enfant tous les 5 jours décède dans son environnement familial du fait de violence", a détaillé le 8 juin à TF1info la secrétaire d'Etat chargée de l'Enfance Charlotte Caubel, qui présentait mardi en Conseil des ministres les grands axes d'un plan pour faire face aux violences faites aux enfants. "Ces chiffres montrent l'ampleur des enjeux et la nécessité de faire un plan combatif. Des choses ont été faites, mais comment aller plus loin ?"

Dans la continuité du précédent plan 2020-2022, celui prévu pour 2024-2027 sera officiellement annoncé et détaillé à l'automne prochain. Jugé timide par les associations, le gouvernement espère qu'il ouvrira les yeux de la société. "L'enfant ne peut pas être l'objet de nos propres violences, le témoin de nos propres pulsions. Sinon nous créerons une société qui ne sera que de plus en plus violente", prévient Charlotte Caubel.

Face aux chiffres accablants des violences faites aux enfants, quelles mesures vous semblent primordiales à mettre en place ? 

Tout d'abord, il est nécessaire de mieux former et accompagner les professionnels qui entourent les enfants, dans les écoles, les clubs sportifs ou le milieu médical. Encore beaucoup sont mal à l'aise avec ces sujets-là ou n'osent pas dénoncer des faits. Imaginez une institutrice dans un petit village qui a repéré des signaux de violences. Il n'est pas facile pour elle de dénoncer une maman ou un papa qu'elle recroisera à tout moment au coin de la rue. Pour l'y aider, nous mettrons en place une plateforme d'écoute.

Nous aurons un regard attentif aux enfants en situation de handicap qui sont plus que les autres à la merci des violences familiales et sexuelles ; à ceux des outre-mer où les dispositifs de protection sont souvent débordés ; ou aux enfants placés dans des établissements spécialisés, pour qu'ils ne subissent pas de double peine.

Il faut aussi mieux réguler le numérique, où les violences sexuelles et le harcèlement explosent. Nous recruterons plus d'administrateurs ad hoc, chargés de remplacer les représentants légaux auprès des enfants et qui ont une fonction d'accompagnement juridique, administratif et psychologique importante. Enfin, pour sensibiliser la société entière, nous allons démarrer une campagne choc, en commençant par les violences sexuelles dans la famille, celles que subissent le plus les enfants.

Un enfant meurt tous les 5 jours au sein de sa famille, mais ce décompte n'est pas fait, notamment dans les médias."
Charlotte Caubel

Aujourd'hui la société a du mal à regarder ces violences, parce qu'elles se déroulent dans le huis clos familial, pensez-vous qu'elle peut s'améliorer ?

Effectivement, notre société a du mal à regarder ce qu'il se passe dans la sphère familiale, notamment les violences physiques. Nous avons tendance à les agglomérer avec les violences intrafamiliales et à ne pas en faire un sujet à part. Un enfant meurt tous les 5 jours au sein de sa famille, mais ce décompte n'est pas fait, notamment dans les médias, comme peut l'être celui des féminicides. 

Aussi, notre pays n'est pas mature sur la question des violences éducatives ordinaires (violences physiques, psychologiques ou verbales, considérées comme légitimes car exercées dans un but éducatif, ndlr) interdites dans de plus en plus de pays. En France, 8 familles sur 10 (*) reconnaissent y avoir eu recours.

Pourquoi est-il nécessaire pour les adultes d'ouvrir les yeux et de se faire les porte-voix des enfants ?

Les enfants ne parlent pas spontanément, soit parce qu'ils sont très petits et que ce n'est pas possible, soit parce qu'ils sont en conflit de loyauté avec l'ensemble des agresseurs qui sont autour d'eux, membres de leur famille, professeurs ou éducateurs sportifs.

Les viols sur mineurs imprescriptibles ?

Avec ce plan, rouvrirez-vous la question de l'imprescriptibilité des viols sur mineurs ? 

Là-dessus, j'avance avec des interrogations. La première, c'est que je sais en tant que magistrate que les enquêtes très tardives sont difficiles à établir. La deuxième, c'est que quand les victimes ont une date de prescription, cela les pousse à porter plainte. Enfin, même si je ne remets absolument pas en doute la destruction humaine qu'entraînent ces crimes, peut-on les mettre sur la même échelle de valeur que les crimes contre l'humanité qui ont fait l'objet de ce principe d'imprescriptibilité ? De toute façon, l'imprescriptibilité relève du législateur. 

* Selon une étude menée par l’IFOP auprès 1.314 parents d’enfants de 0 à 10 ans pour la Fondation pour l’Enfance publiée en octobre 2022, 79% des parents reconnaissaient avoir eu recours à une forme de violence éducative ordinaire au cours de la semaine précédent l'enquête (mai 2022).


Justine FAURE

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