Afin de lutter contre le non-recours aux prestations sociales, Emmanuel Macron avait promis durant la campagne présidentielle de verser automatiquement les aides aux bénéficiaires.Le gouvernement compte en ce sens instaurer la "solidarité à la source".Calendrier, mise en œuvre... Le ministre des Solidarités, Jean-Christophe Combe, nous détaille ce chantier.
Lutter contre le non-recours aux prestations sociales, voilà l'objectif affirmé par Emmanuel Macron depuis la dernière campagne présidentielle. Pour cela, le chef de l'État souhaitait mettre en place un tout nouveau système : la "solidarité à la source". Ce dispositif doit concerner le RSA, la prime d'activité et les aides au logement, versés chaque année à 18 millions de Français pour un coût de près de 40 milliards d'euros. Une réforme "de justice sociale" confiée au ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe. Il répond à TF1info.
Le président de la République promet depuis sa campagne de réélection de mettre en place la "solidarité à la source". En quoi consiste ce projet ?
Nous souhaitons créer pour les prestations sociales le même dispositif que pour la déclaration d'impôts pré-remplie. Aujourd'hui, notre système de solidarité est complexe, difficile d'accès, et son efficacité est souvent remise en cause. Ce projet doit ramener de la confiance et lutter contre une injustice profonde : une partie des personnes qui devraient avoir droit à certaines aides n'y ont pas accès. Nous estimons par exemple que 34% des bénéficiaires potentiels du RSA n'y ont pas recours. L'objectif premier de la solidarité à la source est de lutter contre ce non-recours et de favoriser l'accès aux droits de nos concitoyens en réduisant les démarches. Elle doit aussi permettre de fiabiliser les déclarations pour éviter les indus et les récupérations des sommes a posteriori qui fragilisent les ménages.
Le "revenu net social" apparaîtra sur les fiches de paie de l'ensemble des salariés dès juillet
Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités
Comment cela va-t-il se concrétiser ?
Comme pour la déclaration d'impôts, nous pré-remplirons les formulaires de demande grâce au recueil d'informations sur leurs revenus que nous connaîtrons au préalable. Nous demanderons simplement aux bénéficiaires de vérifier l'exactitude des informations.
À quelle échéance la solidarité à la source sera-t-elle mise en place ?
Plusieurs étapes doivent être franchies. La première commence dès juillet, avec l'apparition sur les fiches de paie de l'ensemble des salariés d'une nouvelle ligne : le "revenu net social". Pour l'allocataire, cela permettra de connaître le revenu de référence pour le RSA et la prime d'activité. Cette déclaration sera réalisée par les entreprises, à l'image du revenu net imposable. Puis, en 2024, le pré-remplissage sera expérimenté dans une dizaine de départements. La généralisation sera ensuite effective en 2025 : la solidarité à la source deviendra une réalité pour tous les Français.
Dans sa profession de foi lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron promettait le "versement automatique" de ces aides. Ce sera le cas ?
Cela ne sera pas un versement automatique puisque, comme pour le prélèvement de l'impôt, nous allons demander aux bénéficiaires de vérifier les informations que nous avons à notre connaissance. Surtout, il nous faut leur accord avant le versement des prestations. Cela peut paraître contre-intuitif, mais certaines personnes n'ont pas envie d'être aidées, par exemple pour des questions de dignité. La réforme du RSA, qui va demander un engagement afin de bénéficier de l'aide, pourrait aussi être un motif de refus. Il y aura donc toujours une demande, mais les démarches seront considérablement simplifiées.
Avec cette réforme, la fraude sociale sera rendue beaucoup plus difficile
Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités
Emploi, logement, famille... La situation des bénéficiaires peut régulièrement évoluer. Ne craignez-vous pas que cette "simplification" puisse devenir une usine à gaz ?
Au contraire. C'est une grande simplification à la fois pour le bénéficiaire, mais aussi pour l'administration. Aujourd'hui, il faut justifier l'évolution de vos revenus tous les trois mois. Demain, ce sera automatique, sur la base de la déclaration des employeurs. Et nous demanderons ensuite aux bénéficiaires de vérifier l'exactitude de ces informations. En revanche, il appartiendra toujours aux concernés de signaler un changement de situation familiale.
Cette réforme a-t-elle aussi pour objectif de lutter contre la fraude sociale ?
Oui, c'est un choix assumé. Ce dispositif dispose de deux jambes : nous allons à la fois lutter contre le non-recours, mais aussi sécuriser le système en luttant contre les indus liés aux erreurs de calculs et la fraude. Avec cette réforme, la fraude sociale sera rendue beaucoup plus difficile.
Ce projet a-t-il vocation à apaiser le pays, divisé depuis les débats autour de la réforme des retraites ?
C'est une réforme de justice sociale, pas une réforme de circonstances : elle a été portée par le président de la République pendant sa campagne. Nous n'avons pas attendu la réforme des retraites pour lancer ce chantier. Mais il s'agit évidemment d'une réforme sociale majeure de ce quinquennat. Elle permettra à chacun de toucher son juste droit et démontrera de façon transparente que travailler rapportera toujours plus que l'inactivité. Or, aujourd'hui, en tant que ministre des Solidarités, je ne peux pas garantir que l'interaction des différentes aides sociales soit réellement incitative à la reprise du travail dans toutes les situations.
Cette réforme aura-t-elle un coût supplémentaire pour les finances publiques ?
Inévitablement. La lutte contre la fraude ne va pas compenser l'entièreté de la dépense supplémentaire liée à l'accès aux droits. En revanche, à long terme, l'idée est de rendre cette politique sociale efficace. Nous misons sur le plein-emploi pour diminuer considérablement le nombre de bénéficiaires du RSA.
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