La bataille des retraites

Réforme des retraites : "Face aux mouvements durables de jeunes, tous les gouvernements de la Ve République ont calé"

Publié le 28 mars 2023 à 21h31
JT Perso

Source : TF1 Info

La jeunesse a amplifié sa mobilisation ce 28 mars, à l'occasion de la 10e journée d'action contre la réforme des retraites.
Des dizaines de blocages d'établissements universitaires, de lycées ou encore de collèges, ont été organisés avant que ces étudiants prennent part aux manifestations.
Patrice Duhamel, éditorialiste politique, revient sur l'impact de ces renforts... et sur ce que les gouvernements précédents ont constaté à leurs dépens.

Lors de ce 10e round de contestation, le ministère de l’Éducation a fait état de 53 incidents en France devant des établissements scolaires, dont 14 blocages, 27 blocages filtrants, sept tentatives de blocages et cinq autres formes de perturbations, sur un total de 6960 collèges et 3720 lycées. 

Alors que ce 28 mars, les étudiants et les lycéens étaient de plus en plus nombreux à gonfler les rangs des opposants à la réforme des retraites, l'éditorialiste politique Patrice Duhamel revient sur cette catégorie de manifestants que le gouvernement scrute avec attention. À juste titre.

Pourquoi les gouvernements redoutent-ils de voir les jeunes entrer en mobilisation ? 

PATRICE DUHAMEL : D'abord, deux souvenirs : celui de Mai-68 et le souvenir du drame Malik Oussekine en 1986. Et deuxièmement, le fait que la jeunesse suscite de la sympathie. En général, leurs mouvements sont aussi très soutenus par les familles, par l'opinion publique. Ils se mobilisent en premier lieu autour d'un sujet spécifique à l'école ou au lycée, puis ils montent au créneau pour d'autres motifs. Mais attention, dans le cas spécifique de cette contestation de la réforme des retraites, on n'assiste pas, pour le moment en tout cas, à un déferlement de la jeunesse. Même si on constate qu'il y a bien une augmentation. 

On ne peut pas citer un grand mouvement de jeunes qui n'ait pas obtenu satisfaction

Patrice Duhamel

Cette attention portée par ceux qui gouvernent à la mobilisation des étudiants est donc justifiée... 

Face à des mouvements durables de jeunes, tous les gouvernements, même celui du général de Gaulle, ont calé. En 1968, De Gaulle a calé sur le Grenelle et a fini par reculer lors des négociations. C'est aussi ce qu'il s'est passé pour le Premier ministre Jacques Chirac avec le projet de loi Devaquet, en 1986, marqué par le drame de Malik Oussekine, après plusieurs semaines de grèves dans les lycées et les universités. En 1994, le contrat d'insertion profession (CIP) sous Balladur est également retiré après cinq semaines de manifestations estudiantines et lycéenne. En 2006, Jacques Chirac, président, promulgue la loi du Contrat Première Embauche (CPE), mais suspend immédiatement son application face à une contestation sociale menée par les jeunes pendant trois mois. C'est simple, sous la Ve République, on ne peut pas citer un grand mouvement de jeunes qui n'ait pas obtenu satisfaction. 

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Pourquoi, selon vous, sont-ils rentrés si tardivement dans la mobilisation contre les retraites ? 

C'est assez facile à décrypter. Au début, il y a un grand débat en France, une grande polémique et une grande crise autour de cette réforme des retraites. Une réforme qui, spontanément, ne semble pas concerner les jeunes. Mais progressivement, les plus politisés d'entre eux en agrègent d'autres. Il y a ceux qui, ensuite, ont considéré, à tort ou à raison, que l'utilisation du 49.3 était le signe de l'autorité excessive de l'exécutif. D'autres encore se sont engagés parce qu'ils ont considéré qu'il fallait s'élever contre les violences "commises par la police". C'est ce qui, à mon sens, explique qu'ils sont rentrés progressivement dans le mouvement, même si encore une fois, ce ne semble pas massif au niveau national, si l'on considère le nombre de blocages d'universités, de lycées...


Emmanuel BOUSQUET

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