Violences sexuelles : Alexandra Louis (LaREM) demande "des infractions spécifiques pour les mineurs"

Publié le 4 décembre 2020 à 17h44
La députée LaREM Alexandra Louis à l'Assemblée nationale
La députée LaREM Alexandra Louis à l'Assemblée nationale - Source : Philippe LOPEZ / AFP

INTERVIEW - La députée LaREM des Bouches-du-Rhône a rendu vendredi 4 décembre son rapport d’évaluation de la loi Schiappa renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Auprès de LCI, elle revient sur ses principales préconisations.

Mieux protéger les victimes de violences sexistes et sexuelles, mieux sanctionner leurs auteurs : c'était le but de la loi Schiappa, votée en août 2018. A-t-il été atteint ? Chargée de "vérifier l’effectivité de cette loi à travers la manière dont elle est perçue et appliquée sur le terrain ainsi que d’identifier les bonnes pratiques et les difficultés", la députée LaREM Alexandra Louis a rendu vendredi 4 décembre un rapport d'évaluation sur ce texte. Pour LCI, l'élue des Bouches-du-Rhône a fait le tour de ses principales préconisations.

Des associations continuent de réclamer la présomption irréfragable de non-consentement pour les mineurs de moins de 15 ans. Pourquoi ne pas être allée dans ce sens dans votre rapport ? Que préconisez-vous à la place, pour renforcer l'interdiction de tout acte sexuel entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans ?

Lorsqu'on parle de mineurs, ce n'est pas sur l'idée de consentement que nous devons nous interroger, mais sur l'idée de discernement. Pour pouvoir consentir, il faut savoir faire la part des choses et savoir quelle est la portée de ses actes. Or, on considère que des mineurs de moins de 15 ans n’ont pas le discernement pour ça. En recherchant le consentement dans une agression sexuelle ou un viol, on veut protéger la liberté sexuelle. Lorsqu'il s'agit de mineur, on veut protéger l’intégrité physique et psychique. Et cela se fait avec la question du discernement. 

L’idée est donc de créer des infractions de viols et agressions sexuelles spécifiques pour les mineurs. Il faut poser un principe très simple : les rapports sexuels entre un mineur de moins de 15 ans et un majeur sont prohibés, et intégrer des exceptions, notamment pour prendre en compte les couples de jeunes adolescents. Il ne faudrait pas que dans un couple entre deux mineurs de 17, 15 et 14 ans, le jour où le premier devient majeur, il soit automatiquement renvoyé devant la cour d’assises.

Nous devons avoir un nouveau délit d’exhibition sexuelle qui ne sanctionne pas la nudité mais l’obscénité
Alexandra Louis

En quoi consiste la prescription glissante que vous préconisez pour les crimes sériels commis sur les mineurs ?

Il s’agit d’un mécanisme de connexité qui existe déjà dans la jurisprudence mais n’est pas beaucoup appliqué. Le principe : au deuxième crime commis sur un mineur par un même auteur, le délai de prescription du premier est interrompu. Car ce qu'il se passe bien souvent, c’est que, pour un même auteur, certains crimes sont prescrits et pas d’autres. Avec ce mécanisme, les actes d’enquêtes relatifs au second crime vont permettre d’interrompre le premier délai de prescription, s’il n’est pas déjà acquis. Cela permet de limiter la prescription dans le cadre des crimes sériels. 

Vous vous êtes également aperçue que le délit d'exhibition sexuelle était à revoir. Pourquoi ?

Le délit d’exhibition sexuelle ne peut pas s'appliquer à des hommes qui se masturbent dans le métro à travers leur pantalon, parce que leur sexe n'est pas apparent. Par contre, ce même délit permet de poursuivre les Femen qui, à des fins politiques, dénudent leur poitrine. Considérer qu’il s’agit d’une exhibition sexuelle alors que c’est une finalité politique est un problème. L’idée serait d’avoir un nouveau délit d’exhibition sexuelle qui ne sanctionne pas la nudité mais l’obscénité et des gestes et des actes à vocation sexuelle.

Vous faites également des propositions pour libérer la parole des victimes d'inceste. 

Il est très important d'en parler, de nommer les choses. Je remarque que le mot est trop peu utilisé dans les médias. Il faut aussi miser sur la prévention, évoquer le sujet auprès des enfants notamment lors des séances d’éducation à la vie sexuelle ou affective. Il faut leur apprendre un certain nombre de choses. Un enfant qui connait son corps, sait ce qu’on a le droit de faire ou pas avec lui, c’est un enfant plus protégé, qui sera plus à l’aise pour parler. Je propose aussi de faire de l’inceste une réelle circonstance aggravante, ce qui n’est pas le cas aujourd'hui en droit français.

Vous demandez aussi la tenue d'une campagne nationale sur le consentement, notamment dans le cadre privé. Il s'agit d'un sujet encore tabou ?

On imagine que le viol conjugal est violent. Or il y a des tas de sorte de viols. Une psychologue m’a donné un jour un exemple très intéressant d’un conjoint qui empêcherait sa femme de dormir pour avoir un rapport sexuel. Il ne la violente pas physiquement, mais psychiquement ; et ça s’appelle un viol. Je pense qu’il faut être clair sur ce qu’est un consentement. Il y a encore beaucoup d’idées reçues à ce sujet.


Justine FAURE

Tout
TF1 Info