SCRUTIN - Marlène Schiappa a défendu sur le plateau de LCI que le vote électronique par anticipation figurait dans le programme du candidat Macron en 2017. Faux : seul le vote électronique y était évoqué.
Le gouvernement a surpris ces derniers jours avec le dépôt d'un amendement visant à autoriser le vote par anticipation pour l'élection présidentielle de 2022. Une disposition ajoutée tardivement à un projet de loi organique portant sur l'organisation technique du scrutin présidentiel et qui a été accueillie froidement par l'opposition, au Sénat notamment. Invitée de LCI mercredi matin, la ministre déléguée chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, a défendu cette proposition : "Nous souhaitons répondre à la demande des parlementaires de moderniser les modalités du vote", a-t-elle assuré.
"Vous n'en avez publiquement jamais parlé, ça n'a pas été présenté à l'Assemblée nationale dans le texte originel", lui a signalé Jean-Michel Apathie, faisant remarquer que cet amendement a pris tout le monde de court. "On en a parlé", a rétorqué Marlène Schiappa, "puisque ça faisait partie du programme du président de la République en 2017, sur la question de la modernisation du vote". À son interlocuteur, qui a glissé n'avoir aucun souvenir d'une mention de vote par anticipation, elle a répondu de manière ferme : "Ah bah si, moi j'ai le souvenir, j'ai participé à construire le programme du président de la République, je peux vous le dire, reprenons les documents, ça faisait partie d'un certain nombre d'engagements du président de la République."
Le vote électronique, mais pas celui par anticipation
La ministre, sur les réseaux sociaux, a été accusée de mensonge, mais qu'en est-il vraiment ? La première chose à faire est de se pencher sur le programme d'Emmanuel Macron lorsqu'il était candidat. Après vérifications, le vote par anticipation n'est mentionné nulle part. Seul le vote électronique est mis en avant, dans les termes suivants : "Plus d’efficacité, c’est aussi plus de numérique : nous avons besoin de numériser notre démocratie, en instituant un vote électronique qui élargira la participation, réduira les coûts des élections et modernisera l’image de la politique".
Marlène Schiappa, qui souhaite que cette procédure de vote anticipée s'effectue via des systèmes de vote électroniques, n'a donc que partiellement raison. Si les "machines à voter" comme on les nomme parfois étaient bel et bien au programme du président de la République, il est en revanche faux d'assurer que le vote par anticipation était défendu dès 2017. Emmanuel Macron n'a par ailleurs pas exprimé publiquement depuis sa prise de fonction sa volonté de proposer de vote en amont d'une élection. Pas avant le dépôt de cet amendement controversé en tout cas.
Pour le sénateur LR Philippe Bas, il est nécessaire que le gouvernement renonce à cette disposition. Il n'a pas hésité à évoquer "un procès d’intention" fait aux Français, estimant que cela supposerait que les citoyens souhaiteraient partir en week-end plutôt que dans les isoloirs. Son opposition ne porte donc pas sur le fait d'avoir recours à un outil électronique pour le déroulement du scrutin, mais plutôt sur la modification de sa temporalité, qui doit aux yeux de nombreux parlementaires faire l'objet d'un consensus politique.
Notons que si le vote par anticipation commence tout juste à être discuté en France, il a déjà fait son apparition dans une série de pays en Europe. L’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDAE) s'est penché sur le sujet dans une étude mise en ligne en décembre dernier. La procédure de vote anticipé qui a été mise en avant est présentée comme "la possibilité de soumettre son vote en personne dans un bureau de vote avant le jour du scrutin". L'IDAE note que 8 pays sont concernés : la Finlande, la Lettonie, le Danemark, le Portugal, la Suède, l’Estonie, la Norvège, et la Suisse. Une utilisation à l'étranger soulignée à dessein par Marlène Schiappa, bien que l'exemple le plus connu soit celui des États-Unis, où il s'agit d'une méthode assez largement utilisée.
En marge de cette problématique, rappelons que le vote électronique effectué le jour du scrutin est déjà possible en France. Un rapport d'information déposé en octobre 2018 au Sénat stipulait la France s'apprêtait à célébrer "les cinquante ans de l'introduction des machines à voter dans ses bureaux de vote". Notant que l'article L. 57-1 du code électoral dispose que "des machines à voter peuvent être utilisées dans les bureaux de vote des communes". Pour autant, précisaient les auteurs, "il s'agit d'une simple faculté pour les municipalités, non d'une obligation, qui est de surcroît subordonnée à l'accord du préfet". Seules les communes de 3500 habitants et plus peuvent y avoir recours, mais elles demeurent marginales. "Au 1er janvier 2018, seules soixante-six communes en utilisent", apprend-on. Un nombre qui n'évolue pas puisque "depuis 2008, le périmètre de ces communes est gelé par un moratoire : les préfets n'autorisent plus de nouvelles communes à s'équiper de machines à voter".
En résumé, il est donc faux d'affirmer comme le fait Marlène Schiappa que le président de la République avait annoncé dans son programme en 2017 sa volonté de développer le vote par anticipation. Le candidat Macron plaidait en effet pour une adoption plus large des dispositifs de vote électronique, sans qu'il soit fait mention d'une possibilité de voter avant la date officielle du scrutin.
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