On les voit sans savoir ce qu'elles font : qui sont les petites mains de l'Assemblée nationale ?

par Claire CAMBIER
Publié le 28 juin 2017 à 15h31, mis à jour le 28 juin 2017 à 16h48
On les voit sans savoir ce qu'elles font : qui sont les petites mains de l'Assemblée nationale ?

INVISIBLES - Vous les avez peut-être déjà vus, lors des séances à l'Assemblée, assis en haut ou en bas du perchoir. Certains ont une chaîne autour du cou et un nœud papillon blanc, d'autres sont en tailleur ou en costume, stylo à la main. Peu importe les aléas des élections, ils restent fidèles à leur poste, encadrant le Président de la chambre basse. Mais qui sont donc ces travailleurs de l'ombre de l’Hémicycle ?

Ces "fidèles" de la chambre basse sont tout simplement des fonctionnaires de l'Etat. Ils sont chargés d'aider au bon déroulement des séances et du vote des lois, en somme des "assistants parlementaires" d'un autre genre. Ils se divisent en quatre catégories. 

Les huissiers

Les huissiers sont les fonctionnaires les plus emblématiques de l'Assemblée. On les reconnait à leur uniforme bien particulier : queue de pie,  noeud papillon blanc et chaîne au plastron. Leurs fonctions sont multiples au Palais mais, dans l'hémicyle, ils sont chargés de surveiller les entrées et venues et de distribuer amendements et courrier aux députés. 

Les élus n'ont en effet pas le droit de se déplacer comme ils le souhaitent. C'est donc aux huissiers d'apporter les textes à étudier, directement sur les bancs.

Quand les députés souhaitent échanger entre eux, ils notent leur message sur un papier et appellent un huissier pour faire passer leur note au député en question. A l'heure des téléphones portables, la simple feuille et le stylo sont encore d'usage!

Petite anectode, il aura fallu attendre 1997 pour voir une femme accéder à ce poste, il s'agit de Nicole Fournet-Morice. Au Sénat, l'attente fut encore plus longue : ce n'est qu'en 2014 qu'une femme a eu l'honneur de porter la fameuse chaîne.

Les rédacteurs des comptes rendus

En dessous du perchoir, entre les sièges des huissiers, on retrouve les rédacteurs des comptes rendus. Comme leur nom l'indique, ces fonctionnaires sont chargés de rédiger l'intégralité des séances. Et ils n'omettent rien, des joutes lancées par les députés aux fous rires. Ces comptes rendus sont ensuite publiés au Journal Officiel car tous les débats sont publics et peuvent être consultés à tout moment par les citoyens. Au total, ils sont 67 rédacteurs, un nombre conséquent car ils se relaient au pied de la tribune de l'orateur toutes les quinze minutes.

Les fonctionnaires de la division des lois

Ces fonctionnaires se placent derrière le fauteuil présidentiel, sur la gauche. Pendant que les députés discutent d'une loi, ils établissent le texte et font toutes les modifications nécessaires : inscription des articles dès qu'ils sont votés, de même que les amendements. Une fois la séance terminée, la loi est donc (quasiment) prête !

Ils aident également le président de séance à faire respecter le temps de parole accordé à chaque orateur. Tout est chronométré...

Les fonctionnaires de la division de la séance

Eux sont placés derrière le fauteuil présidentiel, à droite. Ils conseillent le président de séance à propos du déroulement de la procédure, comme par exemple l'ordre de passage des orateurs ou celui des amendements déposés. Ces fonctionnaires travaillent sous l'autorité du secrétaire général de l'Assemblée nationale et de la présidence. Quand un incident intervient, c'est à lui que revient la charge de souffler les consignes au président de l'Assemblée. Pour ne pas perturber la séance, il se place à côté du président sur un siège que l'on appelle "miséricorde". Ce nom était donné à l'origine aux stalles contre lesquels les curés s'adossaient pour se reposer pendant l'office.

Corinne Luquiens, qui a occupé le poste de secrétaire général de l'Assemblée et de la présidence de 2010 à 2016, donnait dans une interview accordée à Contexte un cas concret : lors du premier discours de Claude Bartolone comme président de l’Assemblée nationale, un député socialiste a fait un malaise. "C’est assez déstabilisant, car totalement inattendu", racontait-elle. "J’ai expliqué au Président les procédures à suivre dans ce cas, qui visent à permettre l’évacuation, au plus vite, de la personne malade, en évitant que ses collègues ne se groupent autour de lui." Son rôle est donc d'indiquer les dispositions réglementaires qui s’appliquent à chacune des situations qui intervient en séance. Pour s'aider, elle s'appuyait sur une "collection de 'précédents', où sont répertoriés tous les incidents ou faits inhabituels qui se sont produits en séance. Ils remplissent une bibliothèque entière de l’Assemblée".

Fonctionnaires de la division des lois et de la séance travaillent sur ce que l'on appelle "le plateau", c'est le terme désigné pour la rangée située derrière le perchoir.

Des fonctionnaires "avantagés"

Pour accéder à ces postes, il faut passer un concours spécifique et les places sont chères. Pour les plus prestigieux d'entre eux, il faut parfois attendre plusieurs années avant qu'un poste ne se libère ! Au total, on compte environ 1300 fonctionnaires parlementaires : au-delà des quatres catégories présentées ci-dessus, il y a des chauffeurs, des jardiniers, des secrétaires, bref un panel assez large. Mais tous bénéficient d'un statut particulier : ils sont mieux payés que dans n'importe quel autre service de l'Etat. Ils gagnent en moyenne 8000 euros bruts par mois. Un chiffre qui grimpe à 18 000 euros pour les 24 salaires les plus importants, c'est plus que ce gagne le président !


Claire CAMBIER

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