Maltraitance : "D'ici 2022, des lieux d'accueil d'enfants en danger dans tous les départements"

Publié le 19 novembre 2020 à 20h30, mis à jour le 20 novembre 2020 à 9h17
Le secrétaire d'Etat Adrien Taquet annonce un renforcement des moyens du 119
Le secrétaire d'Etat Adrien Taquet annonce un renforcement des moyens du 119 - Source : Alain JOCARD / AFP

INTERVIEW - Le secrétaire d'Etat chargé de l'enfance présente ce vendredi l'état d'avancement du plan de lutte du gouvernement contre les violences faites aux enfants. A LCI, Adrien Taquet explique comment il permettra de mieux les prévenir et les prendre en charge.

Les états généraux de l'enfance auraient dû se tenir ces jours-ci. Mais en raison de la crise sanitaire, ils ont été reportés au début de l'année 2021. En attendant ce vendredi 20 novembre, à l'occasion du 31e anniversaire de la convention internationale des droits de l’enfant, le secrétaire d'Etat chargé de l'enfance présente l'état d'avancement du plan du gouvernement contre les violences faites aux enfants. 

Auprès de LCI, Adrien Taquet précise quelles mesures verront le jour ces prochains mois, et ce sur quoi le gouvernement doit encore mettre l'accent pour protéger les enfants. Il se félicite également de l'engouement des Français pour ce sujet de société. Plus de 67.000 ont émis sur la plate-forme Make.org des propositions pour lutter contre les violences faites aux enfants lors d'une grande consultation organisée jusqu'à la fin de la semaine.

LCI : 4300 propositions pour la protection des enfants contre toutes les formes de violence ont été formulées sur Make.org. Les regarderez-vous avec attention ?

Adrien Taquet : Bien sûr. Il faut faire des violences aux enfants un sujet de société. Le fait que la population et les associations puissent émettre des propositions sur la plateforme y contribue. Nous voyons également quels consensus émergent sur ces sujets.

Parmi les propositions qui reviennent le plus souvent figurent la sensibilisation et la prévention, notamment via des campagnes dans les médias. Est-ce l'une de vos préoccupations ?

C'est un enjeu très important. Via des campagnes de sensibilisation, nous devons faire connaître aux enfants les moyens d’action dont ils bénéficient pour faire valoir leurs droits et être protégés. Nous mettons par exemple l'accent sur le 119, le numéro d'appel pour l'enfance en danger. Il a déjà bénéficié de renforts de ma part ces deux dernières années puisque tous les ans j'ai augmenté son budget. Et en fin d’année nous allons débloquer 200.000 euros supplémentaires pour que le 119 puisse faire face aux afflux d’appels (+50% pendant le premier confinement), qu’il se modernise, se transforme. L’argent va permettre de le rendre accessible aux personnes sourdes et malentendantes, et de développer un tchat. 

Dans la liste des propositions émises sur Make.org figurent la création de structures d'accueil pour les enfants victimes. 

D’ici à 2022, nous souhaitons développer les Unités d'accueil pédiatriques enfants en danger (UAPED). Il s'agit de lieux intégrés aux unités pédiatriques des hôpitaux où les enfants victimes sont accueillis et pris en charge à la fois par des professionnels de santé, des psychologues et des policiers ou gendarmes formés à la libération de la parole des enfants victimes de violences. Les entretiens avec les forces de l'ordre y sont enregistrés pour que l'enfant n’ait pas à témoigner sept à huit fois de ce qu’il a vécu, parce que redire c’est revivre. Aujourd’hui il existe une soixantaine d’UAPED. Nous en avons ouvert huit depuis novembre dernier, douze projets sont encore en cours. D’ici 2022, il y en aura dans tous les départements, soit une centaine.

"Les enfants émettent des signaux faibles difficiles à détecter"

Faut-il aller plus loin dans la formation des personnes en contact avec les enfants pour repérer ceux victimes de violences ?

Assurément, nous devons sensibiliser davantage les professionnels de l'enfance et de la petite enfance à la détection de signes de maltraitance. Les enfants ont des mécanismes de protection et émettent des signaux faibles difficiles à détecter. Il faut aussi aider les médecins à dénoncer ces actes. Ils ne sont à l'origine que de 4 à 10% des informations préoccupantes émises. Nous développons donc la présence de personnes ressources au sein des hôpitaux qui puissent servir de référents sur ces questions à la fois au personnel hospitalier et à l’ensemble des professionnels de santé sur le territoire. Si un médecin familial a des doutes et ne sait pas quoi faire il pourra s’adresser à eux, ils le déchargeront d’une situation complexe. 

Les enfants sont-ils suffisamment protégés dans le monde numérique ?

Non. C'est pourquoi le président de la République m'a chargé de mener une initiative internationale pour élaborer une déclaration portant sur la protection des enfants dans le monde numérique qui vienne compléter la convention internationale des droits de l’enfant. Lorsque cette dernière a été écrite il y a 30 ans, internet n'existait pas. Ce texte doit aborder les questions d’identité numérique, d'exposition à la pornographie, de pédocriminalité, de travail des enfants notamment sur YouTube, ou encore de prostitution infantile. L'ambition est de faire signer ce texte par l'ensemble des pays du monde. 

Des associations continuent de pousser pour que tous les mineurs de moins de 15 ans soient présumés non-consentants à une relation sexuelle avec un adulte. Cela n'avait pas été retenu dans la loi Schiappa contre les violences sexuelles et sexistes en 2018. Le gouvernement est-il prêt à rouvrir le débat ?

La députée Alexandra Louis (LaREM) est chargée d’une mission d’évaluation sur la loi Schiappa. Son travail est en cours, il fera l’objet d’un rapport rendu prochainement.


Justine FAURE

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