De 1984 à 2018, retour sur les précédents grands mouvements sociaux survenus en France 

Devant l’article 49 alinéa 3 brandi par l’exécutif, la colère ne tarie pas, à l’Assemblée nationale comme dans la rue. Depuis, des violences ont émaillé des manifestations organisées spontanément contre la réforme des retraites, depuis vendredi 17 mars. Interrogé sur France Info, Manuel Bombard a considéré que "si les manifestations dans la rue les plus puissantes depuis 50 ans ne donnent pas de résultat politique (…), il ne faut pas s’étonner que des gens commencent à se dire qu’il faut utiliser une autre méthode". Tout en appelant lui-même à faire retirer la réforme des retraites "par des manifestations massives, larges, pacifiques". 

Sur la durée comme sur le nombre de participants, la mobilisation actuelle est bien "puissante", comme le suggère le coordinateur et député de La France Insoumise (LFI). Cela fait deux mois que l’intersyndicale organise des manifestations contre le texte du gouvernement et certaines journées ont connu des taux records. Le 19 janvier, les syndicats revendiquent 2 millions de Français dans les rues et le ministère de l'Intérieur reconnait même qu'il s'agit de "la plus forte mobilisation de ces trente dernières années". Lui compte plutôt 1,12 million de manifestants à travers la France.

Le 31 janvier, le mouvement se renforce avec 1,27 million (Intérieur) et 2,5 millions (syndicats) d’opposants à la réforme dans la rue. Nouveau record le 7 mars, jour de la "France à l’arrêt", où 1,28 million (Intérieur) à 3,5 millions de personnes (syndicats) sont descendues manifester. Revenons maintenant sur les grandes mobilisations sociales depuis 1973 en France.

1984 et la défense de l'école privée. En 1984, des manifestations éclatent dans le pays suite à la volonté de François Mitterrand de créer un "service public unifié et laïc" de l’Éducation nationale avec la loi Savary. Le 24 juin, entre 850.000, selon l’Intérieur, et 2 millions de personnes défendent l’"École libre" dans la rue à Paris. Les semaines précédentes, des centaines de milliers de personnes ont déjà manifesté leur colère, selon La Croix, regroupant 100.000 participants à Lyon à 500.000 à Versailles.

Les grèves historiques de 1995. Les grèves de 1995 contre la réforme des retraites du gouvernement Juppé ont marqué les esprits. Durant l’hiver, une forte mobilisation dans la rue s’ajoute aux transports à l’arrêt. Le 12 décembre, on compte même entre 1 million (Intérieur) et 2 millions de manifestants (syndicats) dans toute la France. Mais, comme nous le rappelions ici, d’autres réformes des retraites ont ravivé la colère de la rue. Comme celle du gouvernement Raffarin, lorsque le 13 mai 2003, 1 à 2 millions de Français se rassemblent dans le pays.

2006, le CPE n'aura pas lieu. Trois ans plus tard, c’est le contrat première embauche (CPE) voulu par le gouvernement de Villepin qui mobilise à nouveau. Organisations lycéennes, étudiantes et certains syndicats s'unissent pour lutter contre ce projet, et jusqu'à 3 millions de personnes descendent dans la rue le 28 mars 2010, selon les organisateurs (1 million selon l’Intérieur). Ici, les blocages étudiants sont tels que la loi votée est finalement retirée. Le parallèle est aujourd’hui fait avec cette époque par les opposants à la réforme, qui espèrent qu’une telle chose se reproduira avec la réforme des retraites.

2010 contre la retraite à 62 ans. Mais c’est en 2010 que l’on connait des niveaux de mobilisation comparables à aujourd’hui, notamment pour un samedi. Avec 3,5 millions de personnes qui manifestent le 12 mars, selon la CGT, et 1,23 million selon l'Intérieur, contre (déjà) le report de l'âge de la retraite de 60 à 62 ans. La réforme voit tout de même le jour. Depuis, d’autres contestations ont réuni des centaines de milliers de personnes dans les cortèges en France, comme la loi Travail de 2016. Après plusieurs journées d’action, le taux de mobilisation culmine le 31 mars, avec 390.000 (syndicats) à 1,2 million de participants (Intérieur). 

2018, les samedis des Gilets jaunes. En 2018, le mouvement des Gilets jaunes est moins important en nombre. Mais il s’inscrit dans la durée, avec des manifestations organisées tous les samedis, et est émaillé de violences, comme lors de l’Acte 3. La mobilisation, née des ronds-points et des réseaux sociaux et étendue aux grandes villes, a été la plus importante lors du premier acte, le samedi 17 novembre 2018, avec 288.000 participants, selon l’Intérieur, et jusqu’à 1,3 million de personnes, selon un syndicat. S’il a ensuite connu des actions agitées qui ont défrayé la chronique, le mouvement n’a cessé de décliner au fil des semaines. 

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