La principale suspecte dans le meurtre de la petite Lola faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) depuis le mois d'août.La droite et l'extrême droite accusent le gouvernement de "laxisme" sur ce dossier.On fait le point sur ce dispositif et son évolution.
Les parents de la petite Lola ne voulaient "surtout pas de récupération politique". Qu'à cela ne tienne, la droite et l'extrême droite ont tout de même accusé le gouvernement d'être responsable de ce drame. C'est d'abord le député Eric Pauget qui a lancé l'offensive, ce mardi 18 octobre. Interpellant le gouvernement, l'élu LR des Alpes-Maritimes a critiqué l'exécutif pour son "laxisme" en matière de "politique d'immigration". "Le défaut d'exécution de ces OQTF rend votre ministère responsable de ces drames !" a-t-il lancé, en référence à la situation administrative de la principale suspecte de ce meurtre, qui était sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Un reproche à l'image de ceux repris depuis plusieurs heures par la droite et l'extrême droite. Sur Twitter, Eric Ciotti a regretté que le "taux d'exécution des OQTF" soit "dérisoire". "6% en 2021 !", a-t-il écrit, quand Stéphane Ravier (ex-RN désormais dans les rangs d'Eric Zemmour) affirmait que cet indicateur a baissé "de 22,3% à 5,6% sur les dix dernières années". Derrière les chiffres et les graphiques en tout genre, on fait le point sur ce dispositif et la manière dont il est exécuté.
Des éloignements en hausse... mais un taux d'exécution très bas
Ces données, c'est le ministère de l'Intérieur qui les enregistre. Mais pour avoir une visibilité sur l'évolution de cet indicateur, il convient de se tourner vers le dernier projet de loi de finances pour 2022, qui reprend les informations de la place Beauvau. Elles sont détaillées avec précision dans le volet "Immigration, asile et intégration". Et effectivement, le taux d'exécution en 2021 est bien de 5,6%, comme l'a souligné Eric Ciotti. Attention cependant, il s'agit de données encore provisoires qui s'appuient sur le seul premier semestre de l'année. Par ailleurs, sur les deux dernières années, le taux est tombé sous la barre des 10% en lien avec la crise sanitaire. En réalité, si l'on prend l'ensemble du quinquennat d'Emmanuel Macron, une OQTF sur dix a été exécutée en moyenne.
Cela ne signifie pas pour autant que ce gouvernement a été plus permissif que les précédents. Bien au contraire. Si le taux d'exécution des OQFT sur les dix dernières années a considérablement baissé, comme le montre le graphique ci-dessus, il faut souligner que le nombre d'éloignements n'a cessé d’augmenter sur le même temps, et particulièrement pendant les deux premières années du mandat d'Emmanuel Macron, entre 2017 et 2019. Leur nombre est ainsi passé en deux ans de 11.535 à 14.777, soit une hausse de 28%. Et sur dix ans, le nombre de départs forcés a explosé de 40% ! Alors comment expliquer que cela ne se ressente pas sur le taux d'exécution ? Tout simplement parce que, en parallèle, le nombre d'OQTF prononcée a, lui aussi, explosé (+43%).
Il n'y a donc pas eu de baisse du nombre de départs forcés sur les dix dernières années. C'est d'ailleurs écrit noir sur blanc dans le projet de loi de finances pour 2022. "Le nombre de retours forcés exécutés n'a pas connu d'inflexion significative depuis 2010." 2019 fut, au contraire, une année record, avec un point haut de 18.906 retours forcés exécutés.
Des raisons structurelles et conjoncturelles
Reste qu'en moyenne neuf OQTF sur dix ne sont pas exécutées. Les raisons d'un tel échec sont nombreuses. D'abord, une raison structurelle, à savoir l'indisponibilité dans les centres de rétention (CRA). Dans un rapport parlementaire qui remonte à 2015, deux députés estimaient même que le "non-placement en centre de rétention administrative", notamment en cas "d'indisponibilité avérée dans les centres", était la cause principale de ce phénomène.
S'ajoute une raison diplomatique, qui se révèle être le refus des autorités du pays d'origine de récupérer leurs ressortissants. La Commission des lois explique que "la faiblesse des taux d'exécution des mesures d'éloignement a des causes structurelles largement documentées, au premier rang desquelles le problème de la délivrance des laissez-passer consulaires", ces documents indispensables pour renvoyer un étranger en situation irrégulière de la France. Les pays d'origine peuvent aller jusqu'à "alourdir les conditions matérielles de mise en œuvre du processus en refusant, par exemple, le recours à des vols groupés". À titre d'exemple, l'Algérie et le Maroc refusent les vols groupés. Résultat : entre janvier et juillet 2021, d'après les données du gouvernement diffusées en septembre, la France avait prononcé 7 731 obligations de quitter le territoire vers l'Algérie. Mais seulement 22 personnes ont réellement été expulsées. Soit à peine 0,2% de taux d’exécution de ces OQTF.
Ce mercredi 19 octobre, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a expliqué que l’exécution des OQTF "à destination de l’Algérie a été multiplié par vingt par rapport à l’année dernière, une année exceptionnelle par rapport à la situation du Covid".
C'est justement ce motif sanitaire qui explique, notamment, la baisse du taux d'exécution. L'épidémie a très nettement interrompu la dynamique démarrée au début du quinquennat Macron, avec une diminution du taux d'exécution de 51,8 % en 2020 (soit 9111 retours forcés). Du propre aveu de la Commission des lois, cela s'explique par le "refus systématique des intéressés de se soumettre à un test PCR, qui conditionne l'admission sur le territoire du pays d'origine". Au-delà de seules personnes frappées d'une OQTF, "certains pays traditionnellement peu coopératifs ont saisi l'opportunité de la crise sanitaire pour durcir encore les conditions de retour de leurs ressortissants", soulignent les parlementaires.
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