Après Valérie Pécresse et Eric Zemmour, Marine Le Pen est la troisième invitée de l'émission "Mission convaincre", diffusée ce mercredi sur LCI.L'occasion pour la candidate de porter ses thématiques de prédilection, et notamment la question de l'immigration.Retour sur les erreurs du Rassemblement national autour de ce sujet.
En meeting, comme en plateau, Marine Le Pen aime à dérouler ses sujets de prédilection. Troisième invitée ce mercredi 16 février de l'émission "Mission convaincre", la candidate du Rassemblement national devrait notamment parler d'immigration. Notre équipe des Vérificateurs a décidé de passer au crible quelques-uns des arguments préférés de la candidate et ses soutiens.
"La France compte un million de clandestins" : un chiffre surévalué
Principal argument avancé par l'ancienne cheffe du Rassemblement national : la France serait "full", pour reprendre son expression du 30 novembre dernier. Preuve selon elle, il y aurait "probablement un million de clandestins" en France à l'heure actuelle. Un indicateur difficile à évaluer, par nature, ces personnes étant présentes en toute illégalité. Pour avoir un ordre d'idée sur ce phénomène, associations et autorités ont cependant tendance à s'appuyer sur le nombre de bénéficiaires de l'aide médicale d'État (AME), aide sociale destinée aux soins urgents des personnes en situation irrégulière. Pour l'année 2020, l'Hexagone comptait 368.451 bénéficiaires de l'AME.
Cependant, ce chiffre représente l'estimation la plus basse, étant donné que "la plupart des migrants ont peu de connaissances de l'AME et n'ont pas tous la capacité à se saisir d'un dispositif complexe", comme l'expliquait l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) en novembre 2019. Selon ce groupe de chercheurs "seules 51%" des personnes sans titre de séjour et résidant en France depuis plus de trois mois étaient effectivement couvertes par cette aide. Dès lors, l'un des co-auteurs de l'étude, Jérôme Wittwer, évaluait que l'on pouvait multiplier par deux le nombre de bénéficiaires de l'AME. Ce qui donnerait plus de 736.000 clandestins en France à ce jour. Soit un chiffre similaire à celui communiqué par Gérald Darmanin, le dimanche 21 novembre, qui estimait que 600.000 à 700.000 personnes se trouvaient dans le pays sans papier.
Si ce chiffre est difficile à mesurer, celui de la présidente du RN apparait comme surévalué. Pour en savoir plus, retrouvez notre article sur la question ici.
Non, "un tiers des occupants" des logements sociaux ne sont pas "immigrés"
Un constat, aussi faux soit-il, qui pèserait sur le quotidien des Français. Et notamment sur leur droit au logement. Selon Jordan Bardella, le bras droit de Marine Le Pen, "un tiers des occupants" des logements sociaux seraient des immigrés. Un chiffre, encore une fois, surévalué. La dernière grande enquête de l'Insee sur "les conditions de logement en France", qui remonte à 2017, indiquait que sur un total de 4,6 millions de ménages locataires dans le parc social, 918.000 étaient des ménages immigrés. Ce qui correspond à 19,9% des occupants de logements sociaux à l'époque, et non à 31% comme avancé par Jordan Bardella.
Alors à quoi faisait référence l'eurodéputé ? En fait, il a confondu la part des logements sociaux loués par des immigrés avec la part de personnes immigrées en location dans le social. Ce qui change tout. Ainsi, selon un document du ministère de l'Intérieur renvoyant à la situation en 2017, 31% des immigrés occupaient effectivement un logement HLM. Vous pouvez lire toute notre analyse sur le sujet dans notre article.
Un effet de l'immigration sur la base des salaires, vraiment ?
Enfin, selon la candidate à la présidentielle, une fermeture des frontières serait également bénéfique pour le pouvoir d'achat des Français. Elle en veut pour preuve la situation au Royaume-Uni où, avec le Brexit, l'arrêt de l'immigration a provoqué "une hausse des salaires de 8%", selon elle. Le constat est véridique, mais la candidate effectue un raccourci trompeur. Il est vrai qu'il y a bien eu une hausse des salaires observée dans le pays, notamment pour attirer les travailleurs. Seulement, celle-ci est légèrement moins élevée que le chiffre de la candidate.
Selon les chiffres très officiels de l'Office national des statistiques britannique (ONS), arrêtés au mois d'août, ce chiffre est à prendre "avec précaution". Car il intervient au moment du retour au travail après les temps de chômage partiel, mais aussi au moment d'une hausse de l'inflation et d'une pénurie de travailleurs. Or, l'absence de "petites mains", s'est accompagnée d'un certain nombre de "primes" aux nouveaux arrivants. En ôtant le rôle de l'inflation et celui des primes, la "rémunération totale et régulière" des travailleurs britanniques croît plutôt de 5,2%, encore selon l'agence des statistiques. Par ailleurs, il faut souligner qu'un départ de "petits salaires" venus de l'étranger fait automatiquement monter la moyenne des salaires, portés par ceux qui restent.
🔴ÉVÉNEMENT ▶ #Presidentielle2022 : @MLP_officiel est l'invitée de "Mission Convaincre" 🗣️La candidate répondra aux questions de @ruthelkrief & @DavidPujadas et sera confrontée au panel LCI de ceux qui ne croient plus à la politique. ⏰CE SOIR 20h40 #MissionConvaincreLCI pic.twitter.com/jJJ8IoeaDf — LCI (@LCI) February 16, 2022
Ceci dit, une hausse de 5% reste conséquente. Ceci dit, comme nous l'expliquions ici, tous les experts s'accordent à dire qu'il s'agit d'un effet "temporaire et transitoire". Car les patrons savent qu’ils ne pourront pas se le permettre sur le long terme. On ne peut donc pas conclure, comme le font les souverainistes, d'un tel effet. Ni isoler ce phénomène sans le remettre dans son contexte.
Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N'hésitez pas à nous écrire à l'adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur Twitter : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.