SÉCURITÉ - Le candidat LaREM aux municipales à Paris, Benjamin Griveaux, veut axer sa campagne sur la sécurité, avec une proposition choc visant à sanctuariser des wagons et à assurer une présence systématique des forces de l'ordre dans le métro, si besoin avec le renfort de la future police municipale. Une proposition qui s'attire les foudres de ses opposants.
A quatre mois des élections municipales, la campagne parisienne fait à nouveau escale au rayon sécuritaire. Après la polémique sur la création d'une police municipale dans les rues de la capitale, Benjamin Griveaux a choisi ce week-end de prolonger le débat dans le métro. Le candidat LaREM plaide désormais pour que les futurs policiers municipaux soient déployés "en soutien de la sûreté RATP pour assurer une présence systématique dans un wagon par rame, toutes les nuits, de 22 heures jusqu'à la fermeture". Un message faisant écho au Grenelle des violences faites aux femmes, adressé à la RATP, à la SNCF et à la région Ile-de-France, dirigée par Valérie Pécresse, qui conduit la politique des transports.
Un policier ou agent de sécurité par rame : la proposition choc n'a pas manqué de faire réagir, suscitant de nombreuses critiques chez les opposants de Benjamin Griveaux, soit pour dénoncer son manque de réalisme, soit pour y voir une contradiction avec la politique actuellement menée par le gouvernement en la matière.
Je propose à la Région @iledefrance , à @RATPgroup et à @GroupeSNCF de mettre en place des wagons « sanctuaires » dans le métro et le RER : 👉équipés de dispositifs de sécurité (boutons d’alerte et caméras) 👉avec une présence renforcée des forces de sécurité à partir de 22h — Benjamin Griveaux (@BGriveaux) November 23, 2019
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"De qui se moque-t-on ?"
Loin de trouver un terrain d'entente avec Benjamin Griveaux sur ce sujet cher à la droite, la présidente de la Région a fustigé elle-même une proposition à ses yeux contradictoire. Elle a accusé à nouveau le gouvernement d'avoir supprimé 350 postes de policiers dans les transports - il s'agit d'une comparaison entre les effectifs actuels et ceux de 2015, avant l'élection d'Emmanuel Macron.
"De qui se moque-t-on ?" a renchéri Valérie Pécresse, dont l'agenda est également rythmé par des annonces sécuritaires. La patronne de l'exécutif régional, ex-LR, doit en effet détailler ses annonces pour renforcer la sécurité dans les transports en commun à l'occasion de la Conférence internationale sur la sécurité des mobilités, qui se tient jeudi 28 novembre. La Région compte notamment embaucher 785 agents supplémentaires sur le réseau francilien, généraliser les "caméras piétons" pour les 1000 agents de la sûreté RATP et renforcer la surveillance à La Défense, Châtelet et Opéra, les stations les plus marquées par la hausse de la délinquance.
J’aimerais comprendre: @CCastaner (LREM) a supprimé, en 2019, 350 postes de policiers dans les transports franciliens & @BGriveaux (candidat LREM à Paris) annonce qu’il veut mettre des agents de sécurité dans le métro...Ils se parlent? De qui se moque-t-on? Des voyageurs? https://t.co/Sidf5DshEv — Valérie Pécresse (@vpecresse) November 23, 2019
Selon le décompte de Pierre Liscia, élu du 18e arrondissement et lieutenant de Valérie Pécresse dans la capitale, la proposition de Benjamin Griveaux conduirait, "avec un total de 1.280 rames de métro et de RER", à embaucher "au moins 2.500 agents de sécurité supplémentaires".
"Proposition inopérante"
Un argumentaire repris en chœur par la majorité de gauche à la mairie de Paris, alliée de circonstance de la Région. "Alors que les élus régionaux ne cessent de dénoncer la décision du gouvernement de baisser les effectifs de police dans les transports en commun, le candidat LaREM tente de donner l'illusion de vouloir faire ce que ses propres amis ne font que défaire", a ainsi critiqué Maxime des Gayets, adjoint PS du 2e arrondissement.
Sollicité par LCI, Emmanuel Grégoire, premier adjoint d'Anne Hidalgo, se livre toutefois à une critique prudente de la sortie du candidat LaREM. "Nous sommes les premiers à reconnaître qu'il y a un problème de sécurité préoccupant dans les transports", assure-t-il. "Cependant, cette proposition nous semble inopérante. D'abord parce que cette compétence relève d'Ile-de-France Mobilités (l'autorité régulatrice des transports, NDLR) et non du maire de Paris. Nous préférons travailler, sur ce sujet, en bonne entente avec Ile-de-France Mobilités. Ensuite, parce que la majorité actuelle a décidé de réduire les effectifs de police dans le métro, et qu'elle vient de refuser de voter l'amendement à l'Assemblée nationale permettant la création d'une police municipale à Paris."
En outre, pour le premier adjoint à la maire de Paris, "la mission sécurité du métro relève de la RATP, assistée pour les délits les plus graves de la police nationale. Par exemple, Anne Hidalgo a alerté à plusieurs reprises le préfet de police sur la présence des consommateurs de stupéfiants dans la ligne 12 du métro. Benjamin Griveaux ment quand il laisse entendre qu'une police municipale pourrait se substituer à la police nationale sur ce sujet."
Renforcer les patrouilles mobiles
"Il y a bien entendu un sujet de sécurité dans le métro mais ce n'est pas la solution. Cela conduirait à recruter des milliers de policiers supplémentaires", juge également, sollicité par LCI, Gaspard Gantzer, candidat à la mairie de Paris et auteur d'une note récente sur la sécurité dans la capitale pour la fondation Terra Nova. "Il vaut mieux avoir des patrouilles mobiles de jour comme de nuit, dans les couloirs et wagons. Il y en a déjà un peu aujourd’hui mais il faut que la RATP en mette davantage et que la future police municipale puisse aussi y participer en renfort."
Parmi ses propositions, Benjamin Griveaux a également avancé l'idée de "sanctuariser" un wagon dans chaque rame de métro ou de RER, le soir, équipé d'un système de vidéosurveillance et d'alerte en cas d'agression. Une idée déjà développée en 2010 par Valérie Pécresse, qui suggérait de dédier certains wagons aux femmes. La proposition a toutefois été critiquée, elle aussi, par les opposants du candidat LaREM, le système d'alerte et de surveillance étant d'ores et déjà déployé dans les nouvelles rames de métro. De plus, ces dernières ne se composent plus de voitures séparées, mais de wagons reliés entre eux qui permettent de circuler librement d'un bout à l'autre de la rame, rendant apparemment impossible d'en "sanctuariser" une partie.