DIALOGUE DE SOURDS – En invoquant à nouveau l'article 49-3 mardi pour faire adopter le projet de loi Travail, Manuel Valls a accusé les frondeurs de gauche d'avoir "joué avec les institutions" en faisant obstruction à l'adoption du texte. Mais ses opposants assurent avoir proposé un compromis qui aurait permis d'éviter ce nouveau passage en force.
Le gouvernement a-t-il sciemment rejeté un compromis de dernière minute sur la loi Travail ? C'était l'accusation relayée mardi après-midi par les députés PS "frondeurs", mais aussi par des députés proches de Martine Aubry, quelques minutes après l'annonce du recours au 49.3 par Manuel Valls.
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L'amendement en question avait été proposé dans la matinée par Olivier Faure, député PS de Seine-et-Marne. Il proposait notamment de fixer un seuil minimal pour le montant des rémunérations des heures supplémentaires dans le cadre d'un accord d'entreprise. Le texte avait été cosigné, tout de même, par 130 députés socialistes (sur 291), selon l'élu qui se présente comme "un parlementaire qui fait son boulot et cherche à dénouer patiemment les fils de la discorde". "Ce matin il y avait moyen de trouver un accord", assure également Mathieu Hanotin (PS, Seine-Saint-Denis). "On aurait pu sortir un peu plus par le haut de cette histoire."
"A un moment il faut s'arrêter. Et ça s'arrête aujourd'hui"
L'amendement salvateur ? Ce n'est exactement le point de vue des députés pro-gouvernement, très remontés ce mardi contre les opposants au texte de loi, qui avaient initialement déposé près de 500 amendements la veille. "Certains proposaient encore d'annuler l'article 2 du projet de loi , assure Hugues Fourage, porte-parole du groupe socialiste à l'Assemblée nationale. On voit bien qu'il n'y avait pas de recherche de compromis." "Des compromis, j'en ai cherché à chaque fois et je n'ai pas eu de réponse", lance aussi Christophe Sirugue, le rapporteur du texte, totalement désabusé. "A un moment il faut s'arrêter. Et ça s'arrête aujourd'hui."
Le patron des députés PS, Bruno Le Roux, dénonce, de son côté, "la surenchère permanente d'une minorité". Quant à Philippe Doucet, député PS proche de Manuel Valls, il s'emporte contre le fameux "amendement de compromis" d'Olivier Faure, selon lui "écrit n'importe comment". "Une partie de ces députés a déjà les primaires de gauche en tête", assure-t-il. "Leur sujet, ce n'est plus la loi Travail."
"On aurait eu une majorité pour voter le texte"
Mais le camp adverse n'en démord pas. Proche de Martine Aubry, Jean-Marc Germain assure que les frondeurs "avaient pris des engagements publics". "On a appelé les 50 députés concernés un par un. Ce matin, il n'y avait pas 1.000, pas 500, mais un seul amendement. Si le gouvernement avait accepté ce compromis, il aurait eu une majorité pour voter le texte."
Seulement voilà : en transigeant sur ce simple amendement sur les heures supplémentaires, Manuel Valls prenait le risque de remettre en cause la primauté de l'accord d'entreprise, qui est la philosophie même de la loi Travail. Et de sembler lâcher du lest face aux "frondeurs". Il a donc opté pour le passage en force. S'expose-t-il pour autant à la "motion de censure de gauche" déjà signée par le Front de gauche et les écologistes ? Rien n'est moins sûr. Pour y parvenir, les opposants à Manuel Valls doivent réunir 58 signatures. Les frondeurs devaient se pencher sur la question "dans les prochaines heures". Faire chuter Manuel Valls ? "Ce n'est pas le sujet", évacue Jean-Marc Germain. En effet : le sujet, pour la gauche, c'est plutôt... comment aborder 2017 sans faire imploser le PS.
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