À LA LOUPE – Le député de Paris a tenté de justifier la nécessité d'une réforme des retraites "pour les générations qui viennent". Un statut quo, estime-t-il conduirait à la fin de notre système actuel "dans 15 ans, dans 20 ans, dans 30 ans". Un constat que ne partage pas le Conseil d'orientation des retraites.
Député du 19e arrondissement de Paris, Mounir Mahjoubi était invité sur France Info dimanche. Une interview durant laquelle il a soutenu le projet de Benjamin Griveaux pour les municipales à Paris, et durant laquelle il a réaffirmé son soutien à la réforme des retraites souhaitée par le gouvernement.
"Si on ne fait rien, il n'y a plus de système de retraite. Si on ne fait rien, si on accepte le statut quo, qu'on laisse tous les régimes spéciaux tels qu'ils sont, qu'on ne fait pas la retraite à points, qu'on ne trouve pas des mesures de financement, il n'y aura plus de système de retraite dans 15 ans, dans 20 ans, dans 30 ans, pour les générations qui viennent", a-t-il lancé.
Réforme des retraites : « Si on ne fait rien, il n’y a plus de système de retraites dans quinze ans et ce n’est pas acceptable », indique Mounir Majoubi député LREM de Paris et ancien secrétaire d’Etat au numérique pic.twitter.com/UNSr5viAc9 — franceinfo (@franceinfo) January 26, 2020
En désaccord avec le COR
Le constat très pessimiste de l'ancien ministre permet de justifier à ses yeux la nécessité de la réforme. Peut-on pour autant certifier que le système actuel est voué à disparaître à l'horizon 2035 sans un profond bouleversement ? Sur ce sujet, il faut se pencher sur les travaux du Conseil d'orientation des retraites, le COR, organisme de référence qui produit des rapports réguliers et réalise des projections à long terme.
Pour mesurer la pérennité du système actuel, il est courant d'observer les dépenses de retraites en pourcentage de PIB. Pour 2018, la France était ainsi à 13,8%, assez nettement au-dessus de la moyenne européenne. Cet indicateur, explique le COR, "est déterminant pour évaluer la soutenabilité financière du système de retraite dans la mesure où il exprime, de manière globale et synthétique, le niveau des prélèvements qu’il faut opérer sur la richesse produite par les actifs pour assurer l’équilibre du système de retraite à législation constante en matière de retraites".
Dans un rapport réalisé à la demande d'Édouard Philippe et publié en novembre dernier, le COR a réalisé une série de projections. Les experts ont retenu diverses hypothèses, plus ou moins optimistes concernant la situation économique du pays. Et abouti à un constat plutôt encourageant : "grâce notamment aux réformes entreprises depuis près de 30 ans, les dépenses de retraite ne sont plus sur une dynamique non contrôlée et l’évolution de leur part dans le PIB serait maîtrisée tant sur un horizon de 10 ans que de 50 ans", écrit le Conseil. Très loin du constat opéré par Mounir Mahjoubi.
Des projections jusqu'à 2070
En juin 2018, le COR avait déjà présenté des conclusions similaires, avec des projections réalisées jusqu'à 2070. En fonction des scénarios de gains de productivité horaire (de 1 à 1,8%), la part des retraites rapportée au PIB peut varier assez nettement. Pour autant, comme l'illustre le graphique qui suit présenté dans son rapport par le COR, seule l'hypothèse la plus pessimiste aboutirait en 2070 à une hausse des dépenses liées aux retraites par rapport à la richesse totale produite.
Quid des variations du chômage ? Le COR table en effet sur un taux de 7%, qui pourrait sembler optimiste au premier abord. Un expert contacté par LCI estime pour sa part que le Conseil se montre assez raisonnable, "les gouvernements ayant des objectifs de réduction du chômage plus ambitieux à long terme". Il précise par ailleurs que si l'emploi est une variable à prendre en compte, elle ne s'avère pas déterminante pour évaluer la pérennité du système.
Contrairement à ce qu'explique Mounir Mahjoubi, le système actuel des retraites n'est pas en danger dans les prochaines décennies. Cela ne signifie pas pour autant qu'un projet de réforme est de fait inutile : le gouvernement peut en effet estimer que la part actuelle des dépenses consacrées aux retraites est trop élevée, et qu'il est nécessaire de la réduire afin d'utiliser les sommes en jeu à d'autres postes de dépenses.
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