"La déprime totale" : LaREM se déchire lors d’un bureau exécutif tendu

RD avec AFP
Publié le 22 septembre 2020 à 7h16
"La déprime totale" : LaREM se déchire lors d’un bureau exécutif tendu

Source : Christophe ARCHAMBAULT / AFP

FRICTIONS - La République en marche a tenté lundi soir d'endiguer la crise dans laquelle elle s'enfonce depuis plusieurs semaines en présentant un nouvel organigramme, après la démission de son numéro deux, Pierre Person. Mais le bureau exécutif fut pour le moins houleux.

Quelques heures après que Pierre Person a démissionné de ses fonctions de numéro 2 du parti, La République en marche s'est déchirée lundi soir lors d'un "bureau exécutif", où les menaces de démission ont fusé, parfois mises à exécution, tout comme les amabilités en tout genre.

En annonçant sa démission dans Le Monde, lundi matin, le député de Paris Pierre Person avait expliqué quitter ses fonctions de délégué général adjoint "pour donner un nouveau souffle au parti". A 31 ans, l’ex-PS strauss-kahnien, cofondateur du mouvement "Les jeunes avec Macron" dès 2015, a également invité "tous ceux qui veulent bâtir les succès de demain à quitter eux aussi leurs fonctions à la tête du parti pour écrire une nouvelle page".

Le député de la Vienne, Sacha Houlié, a voulu répondre à cet appel, lundi soir, en annonçant lui aussi son départ de l'instance décisionnaire du parti. Problème : "Il n'en est pas membre de droit, mais simplement invité : en gros il arrêtera de répondre aux invitations...", moque un ponte du parti.

Quelques minutes plus tard, alors que le secrétaire d'Etat au numérique Cédric O relativisait les déboires de LaREM, selon lui propres à tout parti majoritaire, ce même Sacha Houlié l'a taclé : "J'espère que tu seras plus convaincant sur la 5G que tu l'as été ce soir". Commentaire d'un témoin de la scène : "Cette réunion, c'est l'horreur, la déprime totale..."

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Aurore Bergé démissionne du porte-parolat du parti

Face à cette crise qui n'en finit plus au sein du mouvement présidentiel, le patron de LaREM Stanislas Guerini a proposé que le renouvellement des membres du Bureau exécutif (BurEx), initialement prévu en novembre, soit reporté après les élections régionales, au printemps. "Si tu maintiens ce calendrier reporté, alors je ne resterai pas", a alors fustigé la députée Aurore Bergé, tenante de l'aile droite de la macronie, selon qui "le BurEx n'a pas la légitimité à mener les combats à venir".

Stanislas Guerini a par ailleurs proposé la nomination de nouvelles personnalités, "pour donner plus de résonance à l'aspect citoyen du mouvement", à commencer par un binôme pour remplacer Pierre Person : Marie Guévenoux (députée juppéiste) et Jean-Marc Borello (proche d’Emmanuel Macron, issu de la société civile et réputé appartenir à la branche gauche de la macronie).

Moue du député Jean-Baptiste Moreau, qui s'adresse à Marie Guévenoux : "Tu donnes de l'urticaire à certains députés..."

"Ils incarnent extrêmement bien ce qu'est LaREM, le ‘en même temps’", défend Stanislas Guerini), qui a également proposé Sibeth Ndiaye et Clément Beaune à la tête du "pôle idées", ou encore le député Roland Lescure à la communication du mouvement. 

Après quatre heures de réunion, les propositions de Stanislas Guerini ont finalement été adoptées par un vote : 18 pour, un contre, quatre abstentions. Aurore Bergé a alors annoncé qu'elle quittait le porte-parolat du parti.

Des législatives partielles catastrophiques pour LaRem

Salutaire clarification ou poursuite du délitement ? La démission de Pierre Person et le nouvel organigramme  interviennent au lendemain de six élections législatives partielles catastrophiques pour  LaREM, dont aucun candidat ne s'est qualifié pour le second tour, y compris dans une circonscription conquise il y a trois ans.

La déroute marque un énième épisode d'une annus horribilis pour LaREM, dont la stratégie d'alliances à géométrie variable aux élections municipales - défendue par Stanislas Guerini - s'est révélée perdante.

Pierre Person, dont les rapports avec ce dernier se sont peu à peu dégradés depuis, affirme toutefois que "le sujet n'est pas personnel mais politique". Stanislas Guerini lui a répondu : "Il y a deux manières de faire face aux responsabilités, soit on tient fermement la barre et on est à la hauteur des enjeux, soit on lâche la barre. Moi, j'ai choisi de tenir la barre".

Au-delà, c'est la ligne politique de La République en marche que Pierre Person interroge, critique d'une droitisation du mouvement en calque à celle du gouvernement, alors qu'il s'était toujours montré dubitatif sur les nominations d'Edouard Philippe puis de Jean Castex (deux ex-LR) à Matignon. Le "en même temps" macronien a par ailleurs déjà été ébranlé à l'Assemblée nationale, où le groupe LaREM a perdu sa majorité absolue, notamment après une scission d'une partie de son aile gauche.

Et le parti présidentiel s'attend à de nouvelles turbulences : le renouvellement du bureau exécutif promet déjà une âpre bataille entre plusieurs têtes de listes potentielles qui se préparent à contester la direction actuelle - même si Pierre Person a prévenu qu'il n'en serait pas.

Les élections régionales, en mars, doivent donner lieu à un autre casse-tête pour LaREM qui hésite à soutenir des sortants. Au risque de nourrir à nouveau un procès en incohérence politique.


RD avec AFP

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