Immigration : ces murs dont s'inspire Eric Zemmour

par Charlotte ANGLADE
Publié le 10 février 2022 à 16h47

Source : JT 20h WE

Mercredi soir, le candidat d'extrême droite a déclaré vouloir la construction d'un "mur" aux frontières de l'UE.
La mesure, selon lui, permettrait de lutter contre l'immigration.
D'autres hommes politiques, à l'image de Donald Trump, y avaient déjà songé avant lui.

"Build that wall", nouveau slogan des partisans d'Eric Zemmour ? Le candidat d'extrême droite a réclamé, mercredi 9 février, sur BFM TV, au soir la construction d'un "mur" à "toutes les frontières" extérieures de l'Union européenne pour lutter contre l'immigration.

"Les pays qui ont fait un mur comme la Hongrie défendent la civilisation européenne", a estimé le candidat de Reconquête! à la présidentielle. Favorable à "l'immigration zéro", Eric Zemmour veut un mur à "toutes les frontières européennes" extérieures terrestres. La France, du fait de sa géographie, ne serait pas concernée, a-t-il précisé.

En faisant cette proposition, l'ancien polémiste, qui fait de l'immigration le thème central de sa campagne, s'inscrit dans les pas d'autres chefs d'État qui ont fait de leurs rêves de murs une réalité.

Le mur de Donald Trump, de la promesse de campagne au fiasco

Le cas le plus emblématique est celui du président Américain Donald Trump, qui, en 2016, avait fait de la construction d'un mur entre les États-Unis et le Mexique l'un des fers de lance de sa campagne. "Quand le Mexique nous envoie ses gens, ils n'envoient pas les meilleurs éléments. Ils envoient ceux qui posent problèmes. Ils apportent avec eux la drogue. Ils apportent le crime. Ce sont des violeurs", affirmait-il lors de son discours de candidature à l'élection présidentielle de 2016. "Je vais construire un grand mur sur notre frontière sud et le Mexique paiera pour le construire. Prenez-en bien note", avait-il lancé.

Mais alors que Donald Trump avait déjà hérité de ses prédécesseurs d'un mur de 1052 kilomètres, celui-ci n'a finalement été agrandi que de 83 kilomètres. En cause, notamment : les permis de construire, très difficiles à obtenir dans l'État du Texas, qui compte près des deux tiers de la frontière. Plus d'une centaine d'éleveurs, un diocèse catholique et plusieurs institutions religieuses ont fait barrage au projet, refusant de céder leurs terres. Le financement du projet a également été un gros point de blocage, le Mexique ayant toujours refusé de payer. Les 15 milliards d'euros qu'ont nécessités les travaux de construction sont donc tout droit sortis de la poche du contribuable américain. Pour un résultat à l'heure actuelle contesté.

Si, selon les statistiques fournies par la CBP, le Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis, le nombre d'arrestations de migrants à la frontière a effectivement diminué, le centre de recherche Américain Pew Research Center attribue cette baisse à l'épidémie de Covid-19. Depuis quelques mois, les chiffres des arrestations augmentent à nouveau. Plus de 67.000 arrestations ont eu lieu en octobre et en novembre 2020, soit plus qu'en octobre et novembre 2016, juste avant que Donald Trump ne prenne le pouvoir et ne lance son projet de mur.

Les barricades de Benyamin Netanyahou, de la protection à l'obsession

En 2017, le premier ministre israélien de l'époque, Benyamin Netanyahou, avait largement salué la décision de Donald Trump de construire un mur à la frontière Mexicaine. Le chef du gouvernement de l'État hébreu, fervent amateur de barricades, en avait lui-même initiées quelques-unes dans son pays. En 2014, sous son impulsion, Israël avait donné son feu vert pour la construction d'une "barrière de sécurité" de 30 kilomètres le long de sa frontière avec la Jordanie. Le but était d'empêcher l'entrée de migrants clandestins ou d'assaillants sur son sol.

Cette barrière, la quatrième dans le pays, se trouve dans le prolongement de celle érigée à la frontière avec l'Égypte. Celle-ci, initiée en 2010, toujours sous Benyamin Netanyahou, est faite d'acier et cerclée de pans de béton et de barbelés à lames. Achevée en 2013, elle court de la bande de Gaza à la mer Rouge, soit sur une distance de plus de 200 km. Elle doit empêcher la venue de migrants depuis le continent africain. Ce mur a été construit avec l'accord des autorités égyptiennes, qui ont simplement réclamé que la construction n'empiète pas sur son territoire.

Lors du premier mandat de Benyamin Netanyahou, en 1996, le pays avait aussi achevé la construction d'une barrière de métal et de béton qui ceinture la bande de Gaza à ses frontières. Cette installation est, depuis, progressivement renforcée. Début décembre, le ministère de la Défense israélien a ainsi annoncé la fin de la construction d'un mur de béton autour du territoire palestinien. Long de 65 kilomètres et haut de 6 mètres, il compte une barrière souterraine avec des capteurs, une barrière maritime comprenant des moyens de détection d'intrusions en mer et un système d'armes contrôlé. Le mur est également équipé de radars et de caméras, ainsi que de salles de commande et de contrôle.

L'État hébreu a également construit en 2002, alors qu'Ariel Sharon était Premier ministre du pays, une barrière composée par endroits de larges sections bétonnées pour séparer son sol de la Cisjordanie, un autre territoire palestinien, occupé depuis 1967 par l'armée israélienne. Aujourd'hui achevée aux deux tiers, la "barrière" doit s'étendre à terme sur environ 712 km, selon l'ONU.

Les palissades de Victor Orban, un outil parmi tant d'autres de l'arsenal hongrois anti-migrants

Pour en finir avec l'afflux de migrants à ses frontières, le chef du gouvernement hongrois, Victor Orban, a lui aussi fait le choix d'ériger un mur à sa frontière avec la Serbie. Car selon lui, 95% des réfugiés s'introduisent en Hongrie par cette frontière. Dès 2015, les autorités ont fait construire deux palissades métalliques, hautes de 4 mètres et espacées de 6 mètres l'une de l'autre, chacune coiffée d'une épaisse couche de barbelés. Cette barricade court sur 175 kilomètres. La frontière est, en plus de cela, émaillée de miradors équipés de puissants projecteurs, de détecteurs de mouvement, de caméras thermiques et de haut-parleurs.

En complément, le pays a mis en place, depuis 2016, un arsenal législatif qui empêche les réfugiés d’avoir accès au territoire et de demander l’asile. Face à cette situation, additionnée aux dérives hongroises, Frontex, l’agence de surveillance des frontières de l'UE, a annoncé en janvier 2021 qu’elle suspendait ses opérations dans le pays. "Nos efforts communs pour protéger les frontières extérieures de l’UE ne peuvent réussir que si nous veillons à ce que notre coopération et nos activités soient pleinement conformes aux lois de l’UE", avait déclaré à l'AFP Chris Borowski, le porte-parole de Frontex.

En décembre, la Cour de justice de l’Union européenne a constaté de nombreuses failles dans les procédures d’asile de la Hongrie, notamment l'expulsion illégale de migrants en provenance de Serbie. Elle a également déclaré que les lois interdisant aux demandeurs d’asile de demeurer en Hongrie pendant que leur appel devant la justice était examiné étaient illégales et a critiqué la détention de migrants dans des "zones de transit".

Une clôture en Pologne pour en finir avec la crise entre Varsovie et Minsk

Fin janvier, la Pologne a entamé la construction d'une nouvelle clôture à sa frontière avec le Bélarus pour bloquer la pénétration de migrants illégaux, à l'origine d'une crise entre Varsovie et Minsk l'an dernier. Longue d'environ 186 km, soit près de la moitié de la longueur totale de la frontière de 418 km, la barrière métallique sera haute de cinq mètres et demi, a indiqué  à l'AFP une porte-parole des gardes-frontières, la capitaine Krystyna Jakimik-Jarosz. Le mur sera aussi équipé de caméras et de détecteurs de mouvement pour aider les gardes-frontières à empêcher les passages en fraude, a-t-elle encore précisé. La fin des travaux, dont la facture s'élève à 353 millions d'euros, est attendue pour le mois de juin.


Charlotte ANGLADE

Sur le
même thème

Tout
TF1 Info