Emmanuel Macron minimise le recours à des cabinets de conseil par l’État français.Nos voisins feraient appel "4 à 5 fois plus" à ces services privés.C’était bien le cas en 2018, d’après un rapport sénatorial.
À dix jours de l’élection, l’exécutif tente d’éteindre le début d’incendie provoqué par l’affaire McKinsey. Désignée par le nom d’un des plus prestigieux cabinets de conseil au monde, cette affaire renvoie à l’utilisation de consultants externes par le gouvernement, de la crise sanitaire aux grandes réformes du quinquennat. Si la pratique n’est pas nouvelle, elle s’est accrue sous le mandat d'Emmanuel Macron, pour atteindre plus d’un milliard de dépenses en 2021.
En visite en Charente-Maritime, le président-candidat a été interrogé sur le sujet. Cherchant à minimiser l’ampleur du travail des ministères avec ces cabinets privés, Emmanuel Macron a dressé un comparatif avec l’étranger : "Ce qui ne me semblerait pas normal, c'est si l'État français ferait 4 à 5 fois plus que les voisins. Il se trouve que quand on regarde les voisins, on fait 4 à 5 fois moins. Pourquoi ? Parce que précisément, on a plus de fonctionnaires". Qu’en est-il ? D’où vient cette comparaison ?
Il se trouve que le chef de l’État a lu avec attention le rapport sénatorial, qui est à l’origine du scandale politique. Publié le 17 mars dernier par la commission d’enquête sur l’influence des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques, le rapport revient sur le quinquennat Macron et l’évolution croissante des dépenses en faveur des missions de consultants. Dans une sous-partie, il s’intéresse aux habitudes de nos voisins en la matière, en particulier en Allemagne et au Royaume-Uni.
657 millions d'euros en 2018
Renvoyant aux données de la Fédération européenne des associations de conseil en organisation (FEACO), le rapport souligne que "par rapport aux autres pays européens, le conseil au secteur public apparaît historiquement limité en France : le chiffre d'affaires réalisé par les cabinets de conseil s'élevait à 657 millions d'euros en 2018 contre, par exemple, 3143 millions d'euros en Allemagne et 2640 millions d'euros au Royaume-Uni".
Ces sommes sont donc 5 fois plus élevées en Allemagne et 4 fois plus au Royaume-Uni, ce qui correspond aux proportions évoquées par Emmanuel Macron. Mais ces montants ne sont pas tout récents. En réalité, les derniers chiffres réunis par la FEACO remontent à 2019 et sont contenus dans un autre rapport parlementaire. En janvier 2022, la commission des finances rend ses conclusions sur les "différentes missions confiées par l’administration de l’État à des prestataires extérieurs". Et elle se base aussi sur les données de la FEACO, qui "permettent de donner une bonne vision macro du recours aux cabinets de conseil par l’ensemble des acteurs publics".
En 2019, l’administration française a dépensé 814 millions d’euros en matière de consultants privés, "un niveau de dépense très modéré" par rapport à ses voisins européens, juge la commission des finances : "Le niveau de dépenses publiques en conseil en France est aujourd’hui beaucoup plus faible qu’au Royaume-Uni (2,5 milliards de livres sterling) ou l’Allemagne (3,4 milliards d’euros)".
Ce recours à des cabinets de conseil s’est donc accru partout, mais de manière plus ou moins importante. Les ordres de grandeur évoqués par Emmanuel Macron en déplacement ne sont plus les mêmes d'une année sur l'autre. Ainsi, l’utilisation de consultants privés est toujours plus conséquente chez nos voisins, mais de l’ordre de 4 fois plus en Allemagne et de 3,5 fois plus au Royaume-Uni. Depuis, la FEACO n’a pas donné matière à comparaison et les bilans faits par chaque pays demeurent très opaques.
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