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Un élu peut-il consulter ses administrés avant de donner son parrainage ?

Publié le 29 janvier 2022 à 13h42
Un élu peut-il consulter ses administrés avant de donner son parrainage ?
Source : iStock

Un maire du Var a souhaité demander ses administrés qui il devait parrainer pour le scrutin présidentiel.
Selon la préfecture, ce procédé de consultation est illégal.
À trois mois de l’élection, d’autres élus ont pourtant pris la même initiative.

Pour certains élus, donner son parrainage à un candidat afin qu’il participe à l’élection présidentielle est un choix cornélien. Le maire d’une commune du Var a donc trouvé la parade en demandant à ses administrés de choisir pour lui. Olivier Hoffman, élu sans étiquette la ville de Sainte-Anastasie-sur-Issole, organise une consultation les samedis 29 janvier et 5 février pour que les quelque 2000 habitants votent pour la personnalité politique en lice de leur choix. Mais cela est-il réalisable ? 

Une consultation à titre d'avis

Non, selon l’État. Si l’initiative est présentée par le maire comme un acte démocratique, elle n’est pas du goût de la préfecture, qui argue qu’un élu d’une collectivité territoriale ne peut demander à ses administrés de décider à sa place. Dans un communiqué, la préfecture du Var fait savoir qu’"une consultation ne peut porter que sur une demande d’avis" et qu’"il est fait interdiction à l'administration de renoncer à son pouvoir de décision en se liant à son résultat". Une décision fondée sur l’article L.1112-15 du code général des collectivités territoriales (CGCT), selon lequel "les électeurs d'une collectivité territoriale peuvent être consultés sur les décisions que les autorités de cette collectivité envisagent de prendre pour régler les affaires relevant de la compétence de celle-ci".

Un autre argument est avancé par la préfecture, qui a donc demandé à la commune d’annuler la consultation. Ainsi, le fait de parrainer un candidat, prérogative réservée à tous les élus de collectivités territoriales, doit être "un acte personnel et volontaire du maire, qu’il ne peut pas déléguer". Or, le maire Sainte-Anastasie-sur-Issole a décidé ici de "s’en remettre au choix des électeurs" et s’est même engagé à "respecter le résultat de la consultation… quel qu’il soit", peut-on lire dans Var-Matin. Malgré le communiqué préfectoral, la consultation a été maintenue ce samedi 29 janvier, d'après le quotidien. Sollicitée, la mairie n'est pas revenue vers nous pour le moment.

"C'est un sondage, pas un vote"

Olivier Hoffmann n’est pas seul à avoir voulu partager cette prise de décision avec ses 251 administrés. Non loin de là, dans l’Aveyron, le maire de Comprégnac a opté pour la même stratégie en indiquant vouloir une consultation citoyenne à propos de son parrainage. Ce qui a déclenché là aussi l'opposition de l’État. Auprès de Midi Libre, la sous-préfecture de Millau a menacé l’élu de saisir le tribunal administratif pour obtenir un arrêté suspensif, estimant que "c'est au maire de choisir, pas à la commune". Mais au-delà du souhait de rendre la démocratie à la population, les élus en faveur de cette consultation veulent redonner goût en la politique. C’est le cas d’Antoine Valentin, maire de Saint-Jeoire, en Haute-Savoie, qui a lancé une consultation en ligne avant de donner son parrainage.

"Il est urgent de pouvoir faire vivre la démocratie et le débat d'idée, je vous propose donc de choisir ensemble pour quel candidat, ne disposant pas encore des parrainages, je dois donner ma signature !", mentionne-t-il sur le site ouvert à cet effet. Contacté, l’édile nous précise d'abord être "ultra sollicité depuis le mois de janvier" par les équipes des différents candidats. Disant "subir le désengagement que certains de (ses) concitoyens ont envers la politique", Antoine Valentin voit dans ce geste un moyen "d’être à l’écoute" de sa population tout en orientant sa décision.

Informé de l’illégalité pouvant frapper son initiative, l’élu connait les subtilités de la loi pour y échapper : "C’est un sondage, pas un vote. Je ne fuis pas mes responsabilités, bien au contraire. Ce sera ma décision seule et assumée, mais pour la prendre je fais appel aux citoyens". La consultation doit être close le 7 février, afin que les résultats soient présentés le lendemain. 

En résumé, un élu local ne peut s'en remettre au choix populaire pour décider de parrainer ou non un candidat. En revanche, sonder ses administrés avant de faire un choix en son âme et conscience ne semble pas être interdit par la loi. 

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Caroline QUEVRAIN

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