Réforme des retraites : de la validation à la censure totale, que peut décider le Conseil constitutionnel ?

Publié le 12 avril 2023 à 13h48, mis à jour le 14 avril 2023 à 15h35

Source : JT 13h Semaine

Le Conseil constitutionnel décide ce vendredi 14 avril s'il juge tout ou partie du projet de loi réformant les retraites conforme à la Constitution.
De la censure totale à la validation du texte, quelles sont les options sur la table ?

Que va dire le Conseil constitutionnel ? Le gouvernement et les oppositions sont suspendus aux décisions que rend l'institution ce vendredi 14 avril vers 18h, saisit de plusieurs recours sur la constitutionnalité du projet de loi réformant les retraites. Au lendemain d'une nouvelle journée de mobilisation, l'avis des Sages pourrait être déterminant pour la suite du mouvement et du parcours du texte largement décrié. Plusieurs scénarios sont possibles, le Conseil constitutionnel ayant le choix entre quatre options. Quelles sont-elles ?

Conformité ou non-conformité totale du texte

La première pourrait être la conformité totale du texte. Dans ce cas-là, après examen du projet de loi et audition des parlementaires ayant déposé des recours, les Sages n'auraient rien trouvé à redire sur le fond du texte et sur les moyens législatifs utilisés pour le faire adopter. 

Le Conseil constitutionnel pourrait également déclarer non-conforme la totalité de la loi. C'est ce que réclament les opposants au texte, notamment les sénateurs de gauche, les députés de la Nupes et du groupe Liot. Ils invoquent un détournement de l'esprit de la Constitution par l'exécutif, ce dernier ayant utilisé un budget de loi de finances rectificatif et recouru à l'article 47.1 de la Constitution pour accélérer les débats. Les constitutionnalistes sont sceptiques sur la possibilité que cette option soit choisie par l'institution. "Il faudrait en quelque sorte que le Conseil aille scruter la conscience du gouvernement, ce qu'il s'est toujours refusé à faire", a indiqué à l'AFP Elina Lemaire, professeure de droit public à l'Université de Bourgogne. "Ce n'est pas parce que la procédure est inhabituelle qu’il faudrait la censurer", ajoute le constitutionnaliste Didier Maus. 

Reste l'hypothèse d'un acte fort des Sages, qui pourraient interpréter comme un détournement de la Constitution le recours à un projet de loi de finances pour faire adopter cette réforme. Mais les juristes constatent qu'aujourd'hui l'institution fait preuve d'une certaine mollesse, voire bienveillance, envers les gouvernements et leurs choix politiques. "Il pourrait y avoir à nouveau l'occasion d'un coup institutionnel, en se plaçant en gardien de la Constitution face à l'exécutif", avance Elina Lemaire, sans trop y croire.

Censure partielle du projet de loi

Il s'agit de l'hypothèse la plus probable, celle à laquelle s'attendent à la fois les partisans et les opposants de la réforme. Plusieurs dispositions de la loi sont menacées, de l'aveu même du président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius. En janvier 2023, il avait alerté sur le risque de "cavalier budgétaire" qui menace toutes les dispositions du texte qui se retrouveraient "hors champ financier", comme l'index senior. L'expérimentation d'un nouveau CDI en fin de carrière est également menacée. Toutefois, elles pourraient être réintégrées dans un futur projet de loi.

Le gouvernement pourrait s'accommoder d'une censure partielle tant que le Conseil constitutionnel valide sa mesure phare : le report de l'âge légal de départ à 64 ans. "Le Conseil irait dans le sens où il a toujours été", à savoir "ne pas contrer les grandes réformes sociales ou sociétales", constate Lauréline Fontaine, professeure de droit constitutionnel et autrice du livre "la Constitution maltraitée".

La réserve d'interprétation

Aussi, le Conseil constitutionnel pourrait émettre une réserve d'interprétation. Elle permet au Conseil constitutionnel de déclarer une disposition conforme à la Constitution, mais à condition qu’elle soit interprétée ou appliquée par l'exécutif de la façon qu’il indique. Cette technique permet de valider une disposition qui, sans cette réserve, pourrait ou devrait être censurée.


Justine FAURE

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