SERPENT DE MER - Dans une lettre adressée à Emmanuel Macron, Modem, RN, EELV et UDI appellent le chef de l'État à instaurer le scrutin proportionnel dès les élections législatives de 2022. Une promesse présidentielle malmenée par la crise sanitaire et un calendrier bien chargé.
Emmanuel Macron, confronté à la plus grande crise sanitaire et sociale du siècle, doit-il se détourner un peu de ses impératifs pour honorer un vieil engagement ? C'est ce que lui demandent plusieurs responsables de partis politiques, Modem, RN, UDI et EELV, dans une lettre inspirée par François Bayrou.
Le patron du Modem et les autres leaders appellent le chef de l'État à instaurer le scrutin proportionnel à l'occasion des élections législatives de 2022. Un engagement pris par Emmanuel Macron durant la campagne de 2017, et plusieurs fois renouvelé. Dénonçant "la brutalité d'un scrutin intégralement majoritaire", ils jugent que "nous avons plus que jamais besoin, non seulement d'une représentation juste et pluraliste, mais aussi d'un changement de culture politique qui permette, entre les différents courants politiques, chaque fois que possible, dialogue et coresponsabilité".
"Une telle réforme", explique la lettre, "peut être décidée par voie parlementaire, relevant d'une loi simple et d'application immédiate", ou bien adoptée "par un référendum de l'article 11" de la Constitution.
Serpent de mer de Sarkozy à Macron
Instaurée une seule fois sous la Ve République, en 1986 - loi organique du 10 juillet 1985 -, et sitôt abrogée, la proportionnelle est revenue à plusieurs reprises dans le débat pour être systématiquement mise au placard. En 2006, Nicolas Sarkozy avait soumis l'idée à un comité conduit par l'ancien Premier ministre Edouard Balladur. Mais la proposition de ce dernier d'instaurer une timide dose de 5% de proportionnelle avait été abandonnée, dans un contexte de progression du FN, qui avait profité de l'aubaine pour obtenir une trentaine d'élus lors du scrutin de 1986.
En 2012, François Hollande s'était engagé à faire cette réforme. Une commission confiée cette fois à l'ancien Premier ministre Lionel Jospin avait abouti à la proposition, moins modeste, d'instaurer une proportionnelle dosée à 10% des députés. Là encore, la crainte d'un succès foudroyant du parti de Marine Le Pen aux législatives - François Hollande pronostiquait l'arrivée de 100 à 150 députés FN au Palais Bourbon, avait calmé les ardeurs de l'ancien président socialiste.
Si la promesse ne figurait pas formellement dans le projet d'En Marche, Emmanuel Macron s'y était engagé en 2017, sous la forme d'un pacte scellant son alliance avec le patron du Modem François Bayrou, dont c'est depuis longtemps le mantra. Face aux parlementaires réunis en Congrès, le 3 juillet 2017, le chef de l'État avait couplé ce projet de scrutin proportionnel avec une autre promesse visant à réduire d'un tiers le nombre de parlementaires, députés comme sénateurs, mais également à les limiter à trois mandats successifs.
Les grands partis d'opposition pas très chauds
En avril 2018, l'ancien Premier ministre Edouard Philippe avait présenté les contours d'un projet visant à coupler la réduction de 30% du nombre de parlementaires avec une dose de proportionnelle à hauteur de 15% des effectifs. Ce qui aurait conduit à une Assemblée nationale de 404 députés, dont 60 élus à la proportionnelle. Un cap confirmé fin 2018 par Emmanuel Macron, qui voulait "que soient posées les questions qui touchent à la représentation et à la possibilité de voir les courants d'opinion mieux entendus dans leur diversité".
Avant même que n'éclatent la crise des Gilets jaunes, puis celle du Covid-19, le projet de réforme institutionnelle du chef de l'État ne coulait pas de source. Qu'il s'agisse de la droite, et tout particulièrement du Sénat, ou du PS, l'idée de mettre en œuvre ce scrutin qui, par nature, affaiblirait la représentation des grands partis, a rencontré une certaine hostilité, non démentie jusqu'à ce jour. "Je suis extrêmement réservé sur ce sujet", expliquait ainsi sur France Inter, il y a encore deux semaines, le patron du PS Olivier Faure, jugeant "impossible" de mener une telle réforme dans l'urgence.
Le dosage de proportionnelle a fait l'objet également de longs débats, le patron du Sénat, Gérard Larcher, refusant par exemple d'envisager plus de 10% des députés élus à la proportionnelle, quand Français Bayrou en réclamait 30%.
Un débat malgré la pandémie ?
Le mouvement des Gilets jaunes avait bien relancé le sujet. La question figurait d'ailleurs parmi les thèmes du "grand débat national" voulu par le chef de l'État début 2019 pour tenter une sortie de crise. La concertation avait abouti à un nouveau projet, détaillé par Emmanuel Macron lors d'une allocution le 25 avril 2019, visant à instaurer une dose, cette fois, de 20% de proportionnelle aux prochaines législatives. Le sujet a ensuite été remis de côté, avant d'être balayé par la crise sanitaire. L'entourage présidentiel confiait encore, en juin 2020, que cette réforme pourrait être conduite, mais sans donner de calendrier. Fin janvier 2021, changement de ton : "Étant donné la priorité donnée à la gestion de la crise et à la relance, et le calendrier parlementaire bien rempli, cette réforme n'est pas une priorité à ce stade", a fait savoir le même entourage.
"Il n'y a pas de désaccord avec le Modem sur la proportionnelle, il y a une question de calendrier", expliquait un cadre LaREM à LCI, mardi 9 février. "La balle est dans le camp des partis. Est-ce qu'on est capables de créer du consensus ?" se demandait-il, s'inquiétant qu'une telle réforme n'entraîne des soupçons de "manipulation électorale".
"Le président de la République a indiqué que c'était un débat important et qu'il devait se poursuivre, notamment entre les forces politiques", a estimé de son côté le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, le 10 février à l'issue du conseil des ministres. "Les réflexions se poursuivent" mais "il semble compliqué d'isoler une mesure par rapport aux autres", a-t-il ajouté, faisant référence au projet global de réforme constitutionnelle.
En adressant cette lettre ouverte à Emmanuel Macron, François Bayrou rappelle expressément une promesse que lui avait fait l'ancien candidat. La lettre s'apparenterait même à une forme de surenchère, puisque le patron du Modem y plaide désormais non pas pour une simple dose, mais pour la proportionnelle intégrale, sur le modèle de celle mise en œuvre en 1986.
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