Réforme des retraites : le "zadisme parlementaire" que redoute le gouvernement

Publié le 12 janvier 2023 à 12h15, mis à jour le 12 janvier 2023 à 20h38

Source : JT 20h Semaine

Le texte sur la réforme des retraites arrivera le 6 février prochain au Parlement.
Alors que l'opposition pourrait multiplier le dépôt d'amendements pour ralentir les débats, le gouvernement craint et dénonce déjà le "zadisme parlementaire".

Il l'a répété à plusieurs reprises mercredi, au lendemain de la présentation de la réforme des retraites par la Première ministre. Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran craint le "zadisme parlementaire" qui s'annonce à l'Assemblée nationale, où le texte arrivera le 6 février prochain. Début 2020 déjà, il utilisait les mêmes mots pour dénoncer les 19.000 amendements déposés par LFI lors de l'étude d'une réforme des retraites en commission spéciale - avant que celle-ci soit finalement abandonnée à cause du Covid. Pourquoi reprend-il ce même vocabulaire trois ans plus tard ?

75.000 amendements déposés par LFI ?

"Ce que je crains c'est que les conditions du débat ne soient pas réunies", a déclaré Olivier Véran mercredi matin sur franceinfo, avant d'expliquer qu'il faisait référence aux propos de "madame Panot à la présidence du groupe La France insoumise" et à "la présidente du parti écolo" Marine Tondelier. Cette dernière, lors d'un meeting contre la réforme qui s'est tenu mardi soir à l'initiative de François Ruffin, a promis une "Assemblée nationale transformée en ZAD", pour Zone à défendre. Quant à Mathilde Panot, elle a prévenu que son groupe pourrait déposer 75.000 amendements, à raison de 1000 par députés. Ils sont 74 à siéger sur les bancs insoumis.

"Le zadisme parlementaire c'est ce qui consiste à empêcher les débats, à vous inonder d'amendement", a estimé Olivier Véran. "Ne me dites pas que ce sont des amendements qui visent à discuter du fond du texte", a-t-il poursuivi à propos des 1000 amendements promis par députés LFI. "Ce sont des amendements dont le nombre vise à interdire le débat."

Les propos de Marine Tondelier ont été largement critiqués par la majorité sur les réseaux sociaux. "Non, l'Assemblée nationale n'est pas et ne sera jamais une ZAD. Représenter la Nation, voter la loi, contrôler l'action du gouvernement : tel est son rôle qui doit être respecté par chacun. J’y veillerai", a tweeté la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. Le ministre chargé des Relations avec le Parlement Franck Riester a jugé cette tactique "affligeante"

La majorité pratique elle aussi l'obstruction

Chaque amendement déposé est défendu par son auteur ou autrice dans l'hémicycle puis soumis au vote de l'assemblée, leur multiplication peut donc faire perdre beaucoup de temps aux débats. Dans le cas où ils sont utilisés pour faire de l'obstruction parlementaire, il s'agit par exemple d'en déposer des dizaines ou centaines identiques en changeant un seul mot dans leur énoncé. Cette tactique est particulièrement efficace lorsque les débats sont limités dans le temps, lors des niches parlementaires notamment. Et la dernière fois que de l'obstruction parlementaire a été dénoncée, elle visait la majorité. Lors de la niche parlementaire LFI, le dépôt d'amendements par le gouvernement avait empêché Caroline Fiat de soumettre au vote sa proposition de loi visant la réintégration des soignants non-vaccinés.

Dans le cadre de la réforme des retraites, si le gouvernement craint que le débat n'ait pas lieu, il sait que cela ne l'empêchera pas de faire voter son texte dans les temps. En effet, il a prévu de le faire voter via un projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificatif, qui limite à 50 jours les débats au Parlement. Si à l'issue les parlementaires ne se sont pas prononcés, l'exécutif sera alors en mesure de mettre en œuvre les dispositions du projet par ordonnance, comme le veut l'article 47-1 de la Constitution.


Justine FAURE

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