La Première ministre a eu recours au 49.3 pour adopter le projet de loi controversé sans vote à l'Assemblée nationale.Elle prend ainsi le risque d'être éjectée de Matignon si une motion de censure est votée par une majorité de députés.Elle-même admet être "un fusible".
Jamais depuis 1992 une femme n'avait accédé au poste de Première ministre. Mais Élisabeth Borne va-t-elle vraiment rester à Matignon plus longtemps que sa lointaine prédécesseure, Édith Cresson ? La question se pose, au lendemain de l'utilisation de l'article 49.3 de la Constitution pour adopter la réforme des retraites à l'Assemblée nationale. Au sein du palais Bourbon, sa démission était évoquée quelques instants plus tard par plusieurs ténors de la classe politique, Marine Le Pen en premier lieu, suivie de Jean-Luc Mélenchon ce vendredi. Va-t-elle tenir ?
D'abord, Élisabeth Borne et son gouvernement peuvent être renversés. Si l'utilisation du 49.3 permet d'adopter un texte sans vote, il place aussi l'exécutif sur un siège éjectable : en cas de motion de censure votée par une majorité de députés, le gouvernement quitte ses fonctions. Un tel scénario ne semble pas le plus probable sur le papier à ce jour, certes. Mais au cours d'une mandature sans majorité absolue, un certain suspense s'installe.
Le groupe Liot, soutenu par la Nupes, va déposer une motion de censure transpartisane. Le RN a annoncé qu'il les voterait toutes. Ainsi, si une partie des députés LR fait faux bond aux consignes de la direction du parti, le gouvernement pourrait être mis en minorité. Ce qui forcerait Élisabeth Borne à faire ses valises.
"Elle est abimée", confie un ministre
Si l'ex-ministre du Travail franchit cet obstacle, sa position ne serait pas assurée pour autant. Car la contestation, politique et syndicale, ne devrait guère cesser. Elle-même admet être un "fusible". D'après une figure de la macronie à l'AFP, Élisabeth Borne "a dit au président que cette réforme était 'utile, nécessaire. C'est moi le fusible, à moi d'assumer'". "Elle est abimée", confie un ministre au service politique de TF1-LCI. "Nous sommes tous fragilisés, elle singulièrement", martèle un autre.
Devant les micros, elle reste soutenue par ses ministres. Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a indiqué ce vendredi matin sur France inter avoir "confiance" en elle. Tout comme Gabriel Attal, invité de LCI. Le ministre des Comptes publics assure qu'elle "tient bon". "Elle a fait un choix courageux", vante-t-il.
En coulisses, Emmanuel Macron sait qu'il peut relancer son quinquennat en changeant le patron de la majorité. Et il ne manque pas de le faire savoir. "Parmi vous tous, je ne suis pas celui qui risque sa place ou son siège", a-t-il notamment déclaré lors du Conseil des ministres réuni en urgence à l'Élysée, jeudi en début d'après-midi, selon un participant. Le chef de l'État avait aussi nommé Élisabeth Borne à Matignon pour son sens du compromis. La fronde unie des syndicats sur les retraites, additionnée à l'absence d'accord total avec les Républicains sur ce sujet, la fragilisent aussi sur ce point.
Mais Élisabeth Borne compte s'accrocher. "Je pense que ce n'est pas une question de personne", a-t-elle répondu jeudi soir sur le plateau du 20H de TF1. "J'ai engagé ma responsabilité et celle de mon gouvernement. À la fin, il y aura un vote sur les motions de censure." Probablement dès le début de la semaine prochaine. D'ici là - et peut-être après -, sa place restera fragilisée. À moins que le temps fasse son effet. "En politique, on a tous vu des résurrections", affirme un ministre cité plus haut. C'est sans doute ce qu'espère Élisabeth Borne.
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