"On l'a fait à l'Assemblée, faites-le" : les sénateurs appelés à abandonner leur régime spécial de retraite

Publié le 6 février 2023 à 12h55

Source : TF1 Info

Alors que la réforme des retraites entame son parcours législatif, des députés et ministres continuent d'appeler les sénateurs de revenir sur leur régime spécial.
"Ce que je dis à nos homologues au Sénat c'est 'on l'a fait à l'Assemblée, faites-le au Sénat'", lance ainsi la cheffe des députés Renaissance Aurore Bergé ce lundi.
Le gouvernement y est favorable, mais rappelle qu'il ne peut rien imposer en raison de la séparation des pouvoirs.

Les appels à la suppression du régime autonome de retraite des sénateurs se multiplient. Ils émanent principalement de leurs collègues députés, qui se vantent d'avoir abandonné le leur en 2018 pour s'aligner sur le régime général de la fonction publique. Ce lundi, c'est la cheffe des députés Renaissance qui en a remis une couche, les enjoignant à mettre fin à leur régime spécial. "Ce que je dis à nos homologues au Sénat c'est 'on l'a fait à l'Assemblée, faites-le au Sénat'", a déclaré Aurore Bergé sur franceinfo, estimant qu'il s'agissait d'"une question de cohérence et de justice".

"En 2017, quand on est arrivé en tant que majorité, il y avait une double cotisation, donc on garantissait [aux députés] une meilleure retraite", qu'à l'ensemble des Français, a expliqué la députée des Yvelines. "On l'a supprimé, donc notre régime est aligné", a-t-elle poursuivi, en référence au fait que depuis le 1er janvier 2018 les règles du régime de pensions des députés reprennent celles de la fonction publique d'État. 

Les sénateurs, eux, jouissent toujours de cette "super cotisation" grâce à une caisse de retraite autonome, créée en 1905. Après six ans de mandat, elle leur permet de toucher une pension de près de 2200 euros nets mensuels, contre 684,38 euros pour un député après cinq ans de mandat. 

"Le régime des sénateurs est équilibré"

Les élus du palais du Luxembourg se défendent en assurant que leur système est équilibré. "Le régime des sénateurs est équilibré tandis que l'Assemblée doit compenser le déficit très élevé du sien par la participation de l'État qui s'élève chaque année à plusieurs dizaines de millions d'euros", avait indiqué Philippe Bas à Politico la semaine dernière, quand le député LR Pierre-Henri Dumont avait déposé, sans succès, un amendement visant à supprimer ce régime sénatorial. "Les sénateurs et le Sénat financent eux-mêmes les prestations de leur régime sans faire appel à des transferts financiers en provenance de l'État ou des autres régimes sociaux. Il n'y a ni dotation d'équilibre ni subvention d'équilibre ni transfert financier venant de l'extérieur", lit-on également sur le site de l'institution. 

Si les députés, notamment de la majorité, mettent autant la pression sur leurs collègues de la chambre haute, c'est parce qu'ils ne peuvent rien faire seuls, sans que l'initiative ne vienne des sénateurs eux-mêmes. "Il faut que ce soit une décision du bureau du Sénat qui décide de modifier son régime parce que c'est financé sur la caisse du Sénat. C'est à eux de prendre cette décision, on n'a pas le droit de prendre cette décision à leur place", "constitutionnellement, on ne peut pas", a expliqué Aurore Bergé.

"C'est aux parlementaires de s'en saisir"

Interrogée à ce sujet dans le Journal du dimanche du 5 février, la Première ministre a confirmé que cette disposition ne faisait pas partie du projet de loi car "cela relève de la loi organique". "C'est aux parlementaires de s'en saisir. Sur le fond, nous supprimons les principaux régimes spéciaux. Les parlementaires ont toutes les cartes en main pour voir s'il faut aller plus loin", a fait valoir Élisabeth Borne. "Je n'ai pas de doute sur le fait que, s'il reste des écarts, ils auront à cœur de les corriger."

"En vertu de la séparation des pouvoirs, le gouvernement ne peut pas décider pour les députés et les sénateurs", avait également expliqué le porte-parole du gouvernement Olivier Véran vendredi dernier. "Il faudrait une loi organique, ce qui n’est pas du tout le même texte, et donc le plus logique, le plus simple, le plus raisonnable, c’est que les parlementaires décident, après l’adoption de la loi, de s’appliquer ce régime." 

Aurore Bergé a souligné que si une telle décision devait être prise par la chambre haute, les sénateurs Renaissance la voteraient. Mais elle a également rappelé que la majorité était détenue par Les Républicains, manière de rejeter la responsabilité sur ses adversaires.


Justine FAURE

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