BARRAGE A FILLON ? - Au premier tour, 9 à 15% des votants de la primaire étaient des électeurs de gauche, selon plusieurs estimations. Certains soutiens de François Fillon, à l'image de Valérie Boyer, se sont indignés de la participation de sympathisants de gauche au scrutin.
La plupart des observateurs l'admettent : après son premier tour fulgurant (44% des voix), François Fillon est aujourd'hui le grand favori du second tour de la primaire de la droite et du centre. Et l'amertume d'Alain Juppé, dimanche matin avant son vote, en dit long sur la fébrilité de celui qui fut, de longs mois durant, le grand favori des sondages.
Et pourtant... L'élection est-elle faite ? Dans ce scrutin inédit - c'est la première fois que la droite détermine son champion à la présidentielle au moyen d'une primaire ouverte - où la participation s'affichait en nette hausse à la mi-journée, toutes les hypothèses doivent être envisagées. Et parmi elles, la mobilisation des électeurs de gauche.
Des acteurs décisifs au premier tour
Si leur participation dimanche dernier ne peut pas être mesurée précisément, les sympathisants de gauche étaient nombreux à se rendre aux urnes. Selon les estimations des instituts de sondages, ils représentaient 9 à 15% des 4.2 millions d'électeurs du 20 novembre. Soit, dans la fourchette haute, largement plus que l'écart entre Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. Et selon une étude Harris Interactive, pas moins de 42% des ces électeurs ont voté dimanche dernier avec l'objectif de faire éliminer l'ancien chef de l'Etat, ce qui crée de nombreuses inconnues pour la suite.
Le comportement de ces électeurs pour le second tour est totalement imprévisible. Iront-ils à nouveau voter ? Resteront-ils chez eux, estimant avoir rempli leur objectif en participant à l'élimination de Nicolas Sarkozy ? Ou bien seront-ils plus nombreux, répondant à des appels sur les réseaux sociaux (mais aussi dans le camp d'Alain Juppé) à contrecarrer le projet de François Fillon, qui ambitionne notamment de supprimer 500.000 postes de fonctionnaires, de remettre en cause le système de Sécurité sociale ou de déplafonner à 48 heures la durée hebdomadaire du travail ?
Un vote de "barrage" contre Fillon ?
Ce qui est sûr, c'est que ces électeurs, s'ils venaient en masse, pourraient combler à eux seuls l'écart de près de 665.000 voix entre Alain Juppé et François Fillon. En outre, certaines catégories professionnelles se sentant mises en cause par le projet de ce dernier pourraient également se décider à aller voter. Le politologue et enseignant Thomas Guénolé estimait ainsi dans Le Figaro que rien n'empêche les fonctionnaires d'aller voter ce dimanche pour "faire barrage" à François Fillon.
Ce scénario a quelque peu tendu certains soutiens de François Fillon et d'anciens soutiens de Nicolas Sarkozy dans la journée. Valérie Boyer, porte-parole de François Fillon, a tweeté : "Comment peut-on se dire 'de gauche' et signer une charte des valeurs de droite ? Où est passée l'honnêteté intellectuelle ?". Le député Thierry Mariani a ironisé sur l'éventuelle participation d'électeurs de gauche, les remerciant de participer au financement du parti et de la campagne présidentielle. Pierre Lellouche a lui affirmé avoir croisé des socialistes dans des bureaux de vote parisiens. "Electeurs de droite et du centre : ne vous laissez pas voler votre primaire" a-t-il ajouté.
Comment peut-on se dire "de gauche" et signer une charte des valeurs de droite ? Où est passée l'honnêteté intellectuelle ? — Valérie Boyer ن (@valerieboyer13) 27 novembre 2016
Merci aux électeurs de Gauche qui participent à nos #Primaires : aucun impact sur le résultat mais leur 2€ financeront nos présidentielles — Thierry MARIANI ن (@ThierryMARIANI) 27 novembre 2016
Après l ancien maire du 9e, un ancien conseiller municipal socialiste croisé dans un autre bureau de vote... 1/2 — Pierre Lellouche (@LellouchePierre) 27 novembre 2016
Électeurs de Droite et du Centre ne vous laissez pas voler votre #Primaire2016 — Pierre Lellouche (@LellouchePierre) 27 novembre 2016
Pour autant, d'autres inconnues doivent être prises en compte lors de ce second tour. Parmi elles, l'attitude des électeurs centristes, qui n'étaient que 14% à participer au premier tour, toujours selon Harris Interactive, et qui pourraient décider de se mobiliser ce dimanche pour aller soutenir leur candidat naturel, Alain Juppé.