Résultats présidentielle 2022 : jusqu'où Emmanuel Macron peut-il élargir sa majorité et son gouvernement ?

Publié le 25 avril 2022 à 17h07

Source : TF1 Info

Depuis le lendemain du premier tour, Emmanuel Macron, réélu dimanche, promet d'élargir sa majorité actuelle à d'autres sensibilités.
Quelles sont les pistes possibles pour son prochain gouvernement et pour une nouvelle majorité présidentielle ?

Emmanuel Macron en avait déjà fait sa marque de fabrique en 2017. Cinq ans plus tard, le président fraîchement réélu s'apprête à composer un nouveau "gouvernement d'ouverture", une promesse faite dès le lendemain du premier tour et qu'il a confirmée dimanche soir.

"Ouvrir" et "élargir", des mots prononcés à plusieurs reprises au cours de sa campagne, consisterait à faire venir dans son gouvernement des personnalités issues de sensibilités différentes, afin de tenir compte d'une part du poids des électeurs du premier tour - notamment ceux de Jean-Luc Mélenchon et de Yannick Jadot -, d'autre part de cette frange importante de l'électorat qui a voté pour lui ce 24 avril non par adhésion, mais pour empêcher Marine Le Pen d'accéder au pouvoir. Cette ouverture, théorisée et popularisée en son temps par Nicolas Sarkozy, consisterait aussi à intégrer des personnalités venant de la société civile ou connues pour leur domaine d'expertise. 

"Si nos compatriotes me font confiance, il est clair que j'aurai une responsabilité d'élargir et de réunir", a expliqué le candidat le 22 avril sur TF1. "Élargir, je n'ai cessé de le faire durant ce quinquennat en prenant deux Premiers ministres qui n'avaient pas été à mes côtés il y a cinq ans, mais je suis convaincu qu'il faut associer très largement forces politiques, forces économiques et sociales, dans la manière de faire à l'avenir", a-t-il indiqué. 

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Un cercle de fidèles reconduits ?

La première question est de savoir dans quelle mesure les macronistes de la première comme de la deuxième heure seront réintégrés au sein du nouvel exécutif, en cours de réflexion. Si le départ du Premier ministre Jean Castex est plus que probable, on ignore pour l'heure ce qu'il adviendra de ses ministres et de ses soutiens les plus proches. Les noms de certains d'entre eux, comme Stanislas Guerini, compagnon de route d'avant 2017 et actuel patron de LaREM, de Richard Ferrand, ex-socialiste à la tête de l'Assemblée nationale et soutien historique, du ministre de l'Agriculture Julien Denormandie, cofondateur d'En Marche ou encore d'Elisabeth Borne, la fidèle ministre du Travail, circulent pour un hypothétique nouveau gouvernement. 

On peut également citer le nom de Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, mais également de la campagne présidentielle qui vient de s'achever, comme candidat naturel à une promotion au sein de l'exécutif. Pour autant, l'ampleur du remaniement que semble annoncer cette promesse d'élargissement rend ce dosage particulièrement difficile à anticiper. 

Achever le siphonnage de la droite ?

Le second chantier se situe à droite. Il a débuté dès 2017, s'est poursuivi au compte-goutte au cours du quinquennat et pourrait s'achever à l'aune des élections législatives de juin. Alors que Les Républicains font encore le deuil d'une élection présidentielle catastrophique pour leur candidate, Valérie Pécresse, voilà des mois que des ponts continuent d'être dressés avec les derniers LR Macron-compatibles. Une nécessité d'autant plus grande que, contrairement à 2017, Emmanuel Macron est loin d'être assuré de bénéficier d'une majorité absolue à l'Assemblée. 

Plusieurs chevilles ouvrières sont à l'œuvre. La première, c'est Edouard Philippe, l'une des personnalités politiques favorites des Français, et qui, avec son nouveau mouvement, Horizons, entend peser fortement dans la constitution de la nouvelle majorité. L'ancien LR laboure le terrain depuis de longs mois pour trouver de nouveaux soutiens au sein de la droite compatible et, pourquoi pas, préparer dès à présent l'horizon 2027. Alors que les plus droitiers des LR se préparent à "un rassemblement des électeurs de droite dans l'opposition au Président", selon les mots d'Eric Ciotti, des personnalités qui n'avaient pas encore quitté LR pourraient être tentées à l'inverse de franchir le Rubicon en vue des législatives et de se rapprocher de la Macronie. 

L'autre cheville ouvrière, c'est François Bayrou, dont l'influence n'a pas décru au cours du quinquennat écoulé, comme en témoigne la nomination de plusieurs ministres issus de sa formation politique. Le fondateur du Modem a, lui aussi, activement labouré les territoires, bien décidé à sceller un nouveau pacte avec Emmanuel Macron. "La société française est aujourd'hui explosée. La fracture la plus importante est celle entre la base sociale et le prétendu sommet. Pour cicatriser ces fractures, il faut représenter toutes les sensibilités et expressions des Français", jugeait à ce titre l'intéressé avant le second tour. 

Emmanuel Macron peut-il imaginer élargir jusqu'à l'UDI, restée jusqu'ici fidèle à ses alliances avec LR ? Le patron des centristes, Jean-Christophe Lagarde, n'a en tout cas ni ouvert ni fermé la porte. Dans sa déclaration, au soir du second tour, ce dernier a plaidé pour "un rééquilibrage des pouvoirs" à l'occasion des législatives, ne s'inscrivant pas d'emblée dans une opposition frontale au président réélu. 

Marges restreintes à gauche

Si Emmanuel Macron avait largement siphonné les courants modérés du PS en 2017, la marge de manœuvre à gauche semble beaucoup plus réduite cinq ans plus tard. Avec une candidate, Anne Hidalgo, tombée à 1,75% des suffrages, pas sûr qu'un débauchage au sein de l'ancien parti de François Mitterrand soit encore perçu comme un signal d'ouverture. 

Dans l'entre-deux-tours, le regard d'Emmanuel Macron s'est surtout porté vers les écologistes (4,63% pour Yannick Jadot au premier tour) et les Insoumis (21,95% pour Jean-Luc Mélenchon). Citant à loisir leurs slogans lors de son meeting écolo-compatible à Marseille, le président-candidat avait fait, à travers ses propositions, des appels du pied assez clairs dans leur direction. Il s'est notamment engagé à mettre en œuvre des planifications écologique et énergétique au sein de son futur gouvernement, des propositions formulées par Jean-Luc Mélenchon. 

Pour autant, rien n'indique qu'Emmanuel Macron pourra élargir plus loin à gauche son hypothétique majorité. Avant même le second tour, Jean-Luc Mélenchon a repris son bâton de premier opposant, comme en 2017. Quant aux écologistes, ils se focalisent, comme l'ex-candidat LFI, sur ce "troisième tour" des élections législatives, appelant "toutes les forces de gauche et écologistes à se rassembler". Reste la possibilité de débauchages individuels, par essence difficiles à prédire. 

Enfin, le président réélu pourrait bien se tourner vers des personnalités extérieures au monde politique, comme il l'a fait à plusieurs reprises depuis 2017 avec Nicolas Hulot, Eric Dupond-Moretti, Élisabeth Moreno ou encore Roxana Maracineanu. C'est peut-être là que la marge de manœuvre est la plus large pour constituer un gouvernement renouvelé. 


Vincent MICHELON

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