Elle a beau réunir plusieurs partis de gauche, Jean-Luc Mélenchon est bien la tête d'affiche et la locomotive de la Nupes.Mais en vue du second tour, la majorité présidentielle cherche à en faire le bouc-émissaire qui lui permettra d'obtenir les votes des électeurs de droite pour faire élire ses candidats.
Son score au premier tour de l’élection présidentielle l’avait convaincu : unie, la gauche pourrait imposer une cohabitation à Emmanuel Macron. À la fin du mois d'avril, avec son entourage, Jean-Luc Mélenchon s’était employé à convaincre les socialistes, les écologistes et les communistes des bienfaits d’une alliance en vue des élections législatives. Dans ce processus, fort de ses 21,95% recueilli le 10 avril, le chef de file des Insoumis a eu un rôle prépondérant. Jusqu’à imposer dans les conditions de l’accord le fait de faire campagne avec le slogan "Jean-Luc Mélenchon Premier ministre".
Mais s’il a été le principal artisan de l’union de la gauche et l’une des raisons de son succès ce dimanche 12 juin, il pourrait aussi être celui qui l’empêchera de remporter autant de sièges qu’espéré au second tour. Car à six jours du deuxième round des élections législatives, un front anti-Jean-Luc Mélenchon se dessine du côté de la majorité présidentielle, montrant les limites de la personnification de la campagne de la Nupes. L'alliance réunissant quatre forces de gauche est très souvent résumée au seul Insoumis, invisibilisant les écologistes, socialistes et communistes. D'ailleurs dimanche soir, ces derniers se sont effacés derrière Jean-Luc Mélenchon, le seul à avoir pris solennellement la parole pour commenter les résultats.
Ce dernier est donc le seul à recevoir les attaques. Dès dimanche soir, les représentants de La République en marche s'en sont pris à Jean-Luc Mélenchon et le programme de la Nupes, qualifié de dangereux, parfois mis au même plan que celui du Rassemblement national. "La réalité, c’est qu’il y a un projet, le nôtre, qui est européen, et puis un projet, le leur, qui s’éloigne de l’Union européenne. Un projet, le nôtre, qui est républicain, et un projet, le leur, qui s’éloigne à bien des égards de la République", a déclaré le ministre des Comptes publics Gabriel Attal.
Borne le qualifie de "premier menteur"
Ce lundi, face à des candidats de la majorité, la cheffe du gouvernement Elisabeth Borne a qualifié Jean-Luc Mélenchon, qui "prétend vouloir être Premier ministre", de "premier menteur". "Dès hier, Jean-Luc Mélenchon a montré à nouveau ses pires travers : quand il n’est pas en tête, il accuse les chiffres", a-t-elle regretté, allusion au fait que la Nupes accuse l'Intérieur de ne pas avoir comptabilisé sous son étiquette tous les candidats qu'elle avait investis, minimisant ainsi son résultat. Selon Elisabeth Borne, "quand on ment à ce point aux Français, on ne les respecte pas". "Quand on est prêts à toutes les contre-vérités et toutes les compromissions pour atteindre le pouvoir, on ne peut pas laisser passer", a-t-elle encore exhorté.
Avec Jean-Luc Mélenchon, la majorité a trouvé le bouc-émissaire parfait pour mobiliser les électeurs de droite et les enjoindre de voter pour leur candidat dans les circonscriptions dans lesquelles auront lieu des duels entre Ensemble! et la Nupes. Une manière facile d'obtenir le report de voix qui devrait permettre au camp présidentiel de remporter plus de sièges que ses adversaires dimanche prochain, malgré des scores quasi similaires au premier tour.
Les consignes de vote de la majorité présidentielle ont également pour objectif de diaboliser le camp insoumis, et de le mettre sur le même plan que le Rassemblement national. "Notre position c'est : 'Aucune voix pour le Front national'. Ensuite, quand on a des candidats Nupes, très clairement, si on a affaire à un candidat qui ne respecte pas les valeurs républicaines, qui insulte nos policiers, qui demande de ne plus soutenir l'Ukraine, qui veut sortir de l'Europe, nous n'appelons pas à voter pour lui", a déclaré Elisabeth Borne lundi. "Si on a affaire à un candidat qui respecte les valeurs républicaines, alors nous le soutenons. C'est par exemple ce que j'ai eu l'occasion de dire s'agissant de Fabien Roussel", a-t-elle ajouté.