Valérie Masson-Delmotte, la vulgarisation du changement climatique pour tous

Après les membres du gouvernement, elle sensibilisera les députés au changement climatique. Ce mercredi, la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte interviendra à l'Assemblée nationale à la demande de sa présidente Yaël Braun-Pivet, qui souhaite offrir aux parlementaires les connaissances nécessaires sur ce sujet ainsi que sur la biodiversité. Après le séminaire gouvernemental cet été, une fois de plus, la majorité a fait appel à la scientifique pour sensibiliser les siens sur le sujet.

En août, la membre du Giec était intervenue devant les ministres et les secrétaires d'État. Pas par conviction politique, mais parce qu'elle croit à la formation et l'éducation sur ses sujets, et que la France a vécu un été marqué par la sécheresse, les incendies, les pluies torrentielles. Après 30 minutes d'exposé, elle avait pu échanger avec les ministres et répondre à leurs questions sur "les enjeux de réindustrialisation, le rôle des grands émetteurs comme la Chine et l’Inde ou les bénéfices politiques qui peuvent être tirés à court terme d’une action environnementale de long terme", indiquait Le Monde dans un portrait consacré à la scientifique et publié en septembre dernier.

En parallèle de son rôle d'éducatrice, Valérie Masson-Delmotte aurait pu être sur le banc des ministres. Après la réélection d'Emmanuel Macron, elle a été approchée pour intégrer le gouvernement. Elle décline. "Je ne veux pas être un prête-nom et, surtout, je ne pense pas avoir les compétences nécessaires. Peut-être aussi que je ne suis pas assez hypocrite", explique-t-elle alors au Monde. De la politique, elle en a pourtant fait un peu, à petite échelle, en tant que conseillère municipale sans étiquette de Villejust (Essonne) entre 2008 et 2014. 

Si dans son quotidien, elle privilégie les circuits courts, évite de se déplacer en avion, roule à vélo électrique et est devenue végétarienne sous l'impulsion d'une de ses deux filles, elle évite de dévoiler ses opinions politiques. Mais elle n'hésite pas à se montrer parfois critique, par exemple lorsqu'elle estime que "les mesures de la convention citoyenne pour le climat qui portaient sur la sobriété ont été écartées" ; ou encore que "baisser pour tous la fiscalité sur les carburants avantage ceux qui en consomment le plus". 

La médiatisation entraînant la médiatisation, ces derniers mois, l'avis de Valérie Masson-Delmotte est de plus en plus sollicité. Alors lorsqu'on l'interroge sur les déplacements du PSG en jets privés et la réaction de Kylian Mbappé, elle estime sans se montrer trop sévère qu'il a raté une opportunité d'apparaître comme un "excellent ambassadeur" pour promouvoir de meilleures pratiques. En revanche, elle enjoint le monde du sport à "monter en puissance" afin de prendre en compte les "transformations profondes" qu’entraîne le réchauffement climatique. 

Désignée comme l'une des 100 personnes les plus influentes du monde par le magazine Time en 2022, Valérie Masson-Delmotte est une spécialiste de l'évolution des climats passés et de l'impact du climat futur. Elle a ainsi participé à la reconstitution de la concentration en gaz à effet de serre de l'atmosphère sur les 800.000 dernières années, et a travaillé sur l'impact du réchauffement climatique sur l'Antarctique en 2070. 

Tout au long de sa carrière, l'autrice de Climat. Le vrai et le faux s'est attaché à lutter contre le climatoscepticisme, lançant par exemple en 2010 un appel avec 400 spécialistes du climat à critiquer et à réagir face aux climatologues remettant en cause ou niant la responsabilité humaine dans les changements climatiques, parmi lesquels Claude Allègre. Aujourd'hui, cette féministe doit encore batailler face aux sceptiques, beaucoup d’hommes "qui font des calculs de coin de table et m’expliquent pourquoi je me trompe, avec une forme de mansplaining". 

Toujours dans cet effort de vulgarisation et de formation, Valérie Masson-Delmotte a écrit plusieurs livres à destination des enfants. En 2018, elle réclamait au ministre de l'Éducation nationale une meilleure représentation des sciences et du climat dans les programmes du secondaire. Elle-même a dû se battre pour s'orienter vers une carrière scientifique, face à des parents professeurs d'anglais réticents.