Allocations : faut-il imposer des contreparties aux bénéficiaires du RSA ?

MM
Publié le 17 juin 2021 à 10h09

Source : JT 20h Semaine

ÉLECTIONS DÉPARTEMENTALES - Il est versé chaque mois à 2 millions de personnes. Certains conseils départementaux ont décidé de fixer des conditions au versement du RSA. C'est le cas par exemple de l'Aisne, où la mesure divise.

L'Aisne, département encore très rural, est l'un des territoires les plus pauvres de France : selon les données 2018 de l'Insee, 18,4 % de la population y vit sous le seuil de pauvreté. L'organisme public a également calculé qu'en 2021, plus de 30% de la population de l'Aisne n'a aucun diplôme. Par ailleurs, le département affiche 13% de chômage et plus de 17.000 foyers au Revenu de solidarité active (RSA). Alors le département propose de financer, pour les bénéficiaires de cette aide, une préparation au Code de la route et de nombreuses autres formations. 

Dans le même temps, alors qu'à l'échelle nationale, il faut s'engager à chercher un emploi pour toucher le RSA, le président du conseil départemental, Nicolas Fricoteaux, a proposé il y a deux ans d'aller plus loin : en contrepartie de l'allocation, il a fixé un objectif aux bénéficiaires, à savoir de consacrer 35 heures par semaine à des démarches d'insertion, comme passer son permis de conduire, effectuer un stage ou une formation.

Chiffres à l'appui, l'élu UDI explique à TF1 qu'en dix ans, le budget du département consacré au RSA a presque doublé : de 64 à 118 millions d'euros. Dans le même temps, l'État a diminué sa dotation. "Il nous a baissé nos ressources de 22 millions. Depuis 2014, cela représente un manque à gagner de 137 millions d'euros", précise-t-il dans la vidéo en tête de cet article.

En 2019, après sa proposition de demander aux allocataires du RSA de consacrer 35 heures par semaine à des démarches d'insertion, il listait quelques-uns des avantages de la mesure auprès de L'Aisne Nouvelle : "L’accélération de l’amélioration des conditions sociales et d’accès à l’emploi des allocataires puisque davantage de temps serait consacré à leur accompagnement, la fin des polémiques sur l’assistanat, la motivation accrue pour retrouver un emploi, de fait plus rémunérateur que les minima sociaux pour un même temps d’occupation".

"C'est quand même nous qui payons à travers nos impôts"

Mais la mesure avait instantanément fait polémique. "Les Axonais ne demandent qu’une chose : pouvoir vivre dignement de leur travail. Encore faut-il que chacun puisse y avoir accès", dénonçait alors Aurélien Gall, le secrétaire départemental du Parti communiste, dans des propos rapportés par La Voix du Nord.

Néanmoins, si le RSA est censé être versé en échange de contreparties, rien n'est obligatoire. Une jeune femme interrogée par TF1 a passé sept mois au RSA. Et dans son contrat d'allocataire, aucune référence n'est faite aux 35 heures de démarches d'insertion. "Je n'en avais pas du tout entendu parler. Et, pour ma part, je n'avais pas 35 heures à fournir dans les recherches de travail", nous dit-elle.

L'équipe de TF1 est donc retournée voir le président du département. Lui-même le reconnait : il n'a pas les moyens d'obliger les allocataires à effectuer des démarches d'insertion en contrepartie du RSA. "Aujourd'hui, on n'est pas en capacité de proposer suffisamment de solutions. Je pense que, le jour où on aura assez de solutions, on pourra être davantage incitatifs", souligne Nicolas Fricoteaux.

Droits et devoirs sont liés
Franck Briffaut, maire RN de Villers-Cotterêts

Dans l'Aisne, à l'occasion des départementales des 20 et 27 juin, 72 binômes de candidats se présenteront dans les 21 cantons du département. Toutes les sensibilités politiques sont donc représentées. En atteste la position des uns et des autres sur le RSA.

Ainsi, du côté du RN, le débat est tranché : il faut des contreparties obligatoires à l'allocation. Franck Briffaut, maire RN de Villers-Cotterêts, chef de file du parti pour les élections départementales, et conseiller du département, demande par exemple "un quota d'heures par semaine ou éventuellement une obligation de résultats par rapport à une prestation particulière. Droits et devoirs sont liés".

La gauche, en revanche, dénonce une opération de démagogie. "Remettre des gens au boulot, ce n'est pas si évident que ça. Il y a beaucoup de demandes d'emplois pour peu d'offres", estime Thierry Delerot, candidat DVG dans le canton de Laon 2.

Reste que le RSA absorbe un quart du budget du département, qui ne dispose que d'une enveloppe limitée pour réaliser des investissements ou rénovations. 


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