Le gouvernement a indiqué ce mercredi réfléchir à l'élaboration d'une nouvelle loi "anti-casseurs" pour mieux "s'adapter" à leurs "nouveaux usages" lors des manifestations.Il avait déjà adopté un texte "visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations" en 2019 après la crise des Gilets jaunes, dont une mesure avait été censurée par le Conseil constitutionnel pour atteinte à la liberté individuelle.
Il y "réfléchit". Après les manifestations du 1er mai et les violences qui ont émaillé les cortèges, le gouvernement a relancé l'idée d'un arsenal législatif destiné à "s'adapter" aux "nouveaux usages" des casseurs. "Il y a l'obligation de garantir la sécurité de celles et ceux qui manifestent" et de mettre "hors d'état de nuire" "ceux qui viennent pour tuer ou casser", a déclaré le porte-parole du gouvernement ce mercredi à l'issue du Conseil des ministres. "Est-ce que la loi permet de le faire ? Est-ce qu'il faut rouvrir ce dossier ?", "je n'ai pas de réponse ferme à vous apporter", mais les ministres de la Justice et de l'Intérieur Eric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin y réfléchissent, a confirmé Olivier Véran. Le premier avait indiqué un peu plus tôt qu'il rencontrerait son collègue vendredi pour "travailler ensemble" sur le sujet.
Mais des obstacles pourraient se mettre sur la route de l'exécutif pour aboutir au texte souhaité, comme dans le passé. Olivier Véran a d'ailleurs rappelé "qu'en 2019, on a adopté un texte important qui a permis d'avoir des améliorations" mais "on n'était pas allé complètement au bout". Une référence à la loi promulguée en avril 2019 "visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations" après plusieurs mois de contestation violente lors de la crise sociale des Gilets jaunes.
En 2019, une loi censurée par le Conseil constitutionnel
Elle instaurait le délit de dissimulation du visage sans motif légitime en manifestation et autorisait les fouilles de sacs et de véhicules, dans et aux abords des cortèges. Aussi, selon le principe du "casseur payeur", le texte prévoyait la possibilité pour l’État de se retourner contre les auteurs des dommages. En revanche, le Conseil constitutionnel avait censuré la mesure permettant aux préfets de prononcer des interdictions administratives de manifester, sur le modèle des interdictions administratives de stade sanctionnant les supporters de foot violents. Il avait estimé que cette disposition portait "au droit d'expression collective des idées et des opinions une atteinte qui n'est pas adaptée, nécessaire et proportionnée".
Pourtant, cet aspect a été remis sur la table récemment, notamment par le syndicat Unité-SGP après les violences lors du 1er mai. "Combien de blessés et de drames dans nos rangs, avant de doter les policiers d'outils légaux interdisant à ces criminels d'accéder à toute manifestation ou rassemblement ?", a-t-il demandé. Au moment des manifestations contre les mégabassines de Sainte-Soline, le syndicat Alliance, classé à droite, avait réclamé à Gérald Darmanin "les moyens juridiques et techniques de prévenir les violences lors des manifestations et de sanctionner leurs auteurs". "Oui, il faudra revenir sur la loi anticasseurs", avait alors approuvé le ministre de l'Intérieur.
Mardi, le locataire de Beauvau avait renouvelé sa volonté d'écrire un nouveau texte, réclamant "les sanctions pénales les plus fermes contre ceux qui s'en prennent aux forces de l'ordre". À défaut de pouvoir leur interdire l'accès aux cortèges ?
Une nouvelle loi inutile selon les magistrats et juristes
Du côté des magistrats et des juristes, l'utilité d'une loi apparaît moins évidente. Le Syndicat de la magistrature, classé à gauche, estime que l'arsenal législatif est suffisant et rappelle que depuis 2010, une loi réprimant la participation à un groupement en vue de commettre des dégradations, initialement votée pour lutter contre les bandes violentes, "constitue le délit sur lequel repose l'essentiel des interpellations des dernières manifestations". "On est déjà surarmés, sur-outillés", a souligné Nicolas Hervieu, juriste en droit public. "Si on va plus loin, on risque de porter atteinte à la liberté de manifester."
La première loi "anti-casseurs" date de 1970. Après 1968, elle instituait notamment le principe controversé d'une responsabilité pénale et pécuniaire collective des manifestants, y compris ceux qui étaient étrangers aux violences. François Mitterrand avait alors fustigé une loi qui "interdit le droit de manifester et de se réunir", et sitôt élu président de la République en 1981, il l'avait abrogée.
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