TENSIONS - En marge d'une visite au CHU de Rouen sur l'autisme, le président a eu un vif échange avec des soignantes au sujet des moyens alloués à l'hôpital public.
En déplacement à Rouen, Emmanuel Macron s'est confronté, pour la première fois depuis le début du mouvement social, à des manifestants en colère. Se rendant dans la matinée du jeudi 5 avril dans un centre de détection d'enfants autistes, il a été accueilli par bon nombre de manifestants, composés de cheminots, d'étudiants ou de personnels hospitaliers. Un accueil houleux devant le CHU, où à côté des drapeaux des centrales syndicales on pouvait également lire des pancartes hostiles à l'endroit du Président : "Manu, tu descends ?" ; "Macron, dégonflé !"
Après cet accueil tendu, Emmanuel Macron s'est rendu, en compagnie de la Première dame et de la ministre de la Santé Agnès Buzyn, à une réunion où on lui a présenté le service de détection de l'autisme, à la veille de la présentation du 4e plan autisme par son Premier ministre. Et c'est à la sortie de cette réunion qu'il a pris quelques minutes pour échanger avec deux femmes membres du personnel hospitalier.
"Il n'y a pas de coupes budgétaires, il ne faut pas dire de bêtises"
Ces dernières l'ont ainsi interpellé sur le manque de moyens alloués aux hôpitaux : "On n'est pas contre le modernisme, mais pour se moderniser - il y a des gens formidables qui se donnent un mal de chien - pour bien travailler, il faut des moyens. [...] Là, ça bouge dans tout le pays parce qu'il y a des coupes budgétaires dans tous les services publics."
"Non, je crois pas, répond Emmanuel Macron. Il n'y a pas de coupes budgétaires, il ne faut pas dire de bêtises. Là, je suis venu annoncer des investissements dans l'autisme [il annoncera, en marge du déplacement, 340 millions d'euros sur cinq ans, ndlr]". Une somme insuffisante pour ses interlocutrices : "Mais il n'y a pas que dans l'autisme, monsieur, c'est partout que les gens se démènent." "Vous avez tout à fait raison, répond le chef de l'Etat. C'est pour ça qu'il faut faire bouger les choses." Et de citer une prochaine réforme : la fin de la tarification à l'acte "qui ne récompense pas les bonnes pratiques".
Les deux soignantes ne se sentent pas entendues : "Mais là, le problème, c'est le manque de personnel pour accueillir les patients : il manque des lits, il faut des lits, il faut du personnel." Emmanuel Macron, lui, continue de rassurer : "Faites-moi confiance : il y aura des moyens. Mais mettre les moyens sans moderniser, sans y mettre du bon sens, c'est pas aider les gens. Parce qu'à la fin, les moyens, c'est vous qui les payez aussi. Il n'y a pas d'argent magique."
"Il y a des patients dont on ne peut pas s'occuper !"
"De l'argent, il y en a", le reprend l'une des soignantes. Et le Président de lui répondre : "Oh la la, vous savez, un pays qui n'a jamais baissé son déficit public [...] et qui va vers les 100% de PIB de dette, faut pas croire. Vous savez, c'est vos enfants qui le paieront." Mais quand son interlocutrice lui dit que "le déficit public, c'est beaucoup les hôpitaux [et] pas les cheminots ou les hôpitaux", le chef de l'Etat ne laisse pas passer : "Pardon de vous le dire, mais vous dites des bêtises. Nous, aujourd'hui, nous vivons à crédit, ça fait des décennies que ça dure. Si nous ne faisons rien, ce sont nos enfants qui n'auront pas le choix de savoir s'il faut payer ou pas. Et on peut être sûr qu'ils n'auront plus le même hôpital."
S'ensuit un dialogue de sourds entre le Président et Agnès Buzyn d'un côté, qui mettent en avant la hausse des budgets pour l'hôpital public, face aux deux soignantes qui voient leurs conditions de travail se dégrader : "Il n'y a pas une baisse d'activité, il y a des patients dont on ne peut pas s'occuper ! Dans certains services, on ne remplace pas un départ sur deux en retraite." Et alors que le ton monte légèrement, le Président conclut, sec : "Ecoutez, j'ai eu la courtoisie de vous répondre alors que vous ne m'avez pas serré la main. Moi je suis courtois. Vous, non. Ayez la courtoisie, pour les familles, et les soignants de l'autisme, de laisser parler d'autres gens." L'échange se conclut avec la voix d'une des deux soignantes : "Je suis là tous les jours, dès 5h du matin pour ces gens-là, moi."
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