INQUIÉTUDE - Apaisante, anti-inflammatoire, cicatrisante, malgré toutes ses propriétés, l'huile essentielle de lavande pourrait basculer dans la catégorie des produits chimiques et toxiques suite à une nouvelle réglementation européenne. Un coup dur pour les producteurs Français qui ne cachent pas leur inquiétude.
Installée à Chamaloc, un petit village de la Drôme provençale, la famille Aubanel cultive la lavande et fabrique de l'huile essentielle depuis trois générations. Cette huile aux nombreuses propriétés, commercialisée de père en fils, pourrait bientôt être considérée comme des produits chimiques et toxiques à cause des molécules qui la composent.
"Dès qu'on parle assemblage de molécules, on se retrouve avec toutes les discriminations liées à toutes les molécules. Par exemple dans la lavande, on a du Linalol, du Limonène, deux molécules considérées comme potentiellement allergène par Bruxelles", explique Alain Aubanel, dans la vidéo en tête du papier, qui a repris l'exploitation familiale.
Une nouvelle réglementation européenne qui doit être votée en fin d'année pourrait classer leurs huiles essentielles dans la catégorie "produits chimiques". Cette règlementation doit analyser les molécules mises sur le marché et les répertorier comme allergènes, cancérigènes ou perturbateurs endocriniens, comme pour les produits chimiques.
Pour Alain Aubanel, il est tout simplement impossible d'évaluer les produits chimiques et les huiles essentielles de la même manière. "Ils veulent que toutes les molécules soient analysées avant d'être mises sur le marché pour vérifier qu'elles ne sont pas allergènes, cancérigènes, ou qu'elles ne sont pas des perturbateurs endocriniens. Mais le problème, c'est qu'ils réfléchissent molécule par molécule, alors que dans les huiles essentielles de lavande par exemple, il y a plus de 600 molécules ! Ils refusent de considérer les huiles essentielles comme une substance globale", se désole-t-il, au micro de France Bleu.
"Des produits naturels vont se retrouver sur liste noire"
Pour Alain, l'huile essentielle est certes irritante pour les yeux, mais on ne peut pas la qualifier de produit chimique. "La distillation, c’est juste une extraction avec de la vapeur d'eau, on fait traverser de la vapeur dans le végétal, ça va récupérer l'huile essentielle, on passe dans les refroidisseurs et on récupère en bas par différence de densité de l'huile essentielle."
Si les contours de la loi ne sont pas encore définis, les producteurs craignent qu'une mention obligatoire dissuade les fabricants de cosmétiques d'utiliser ces huiles essentielles dans leurs produits. Avec cette loi, "des produits naturels vont se retrouver sur liste noire et, même si légalement il n'y a pas d'interdiction de les utiliser, aucun fabricant de cosmétique, de parfumerie ou de produits alimentaires ne les utilisera", redoute Alain Aubanel.
Un lourd travail administratif
En plus de l'inquiétude suscitée, cette règlementation nécessite un lourd travail administratif puisque les distilleries doivent remplir des dossiers pour chaque variété de lavande produite. Un coup de plusieurs milliers d'euros que certains producteurs craignent de ne pas pouvoir assumer seuls.
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En tout cas, ce n'a pas l'air d'inquiéter les passants venus visiter la distillerie d'Alain Aubanel." Il faut faire attention, il ne faut pas les utiliser n'importe comment, il faut vérifier le dosage, mais de là à considérer ça comme des produits chimiques, c'est du grand n'importe quoi", s'étonne un visiteur.