REVERS - Elles sont illégales mais pourraient bien redorer leur image. Des drogues comme le LSD, l'ecstasy ou les champignons hallucinogènes intéressent de près les chercheurs pour leurs capacités à soigner des personnes atteintes de dépression ou encore de chocs post-traumatiques.
Au Canada et dans la majeure partie des États-Unis, la consommation de cannabis à usage thérapeutique fait déjà partie des us et coutumes. Il est utilisé pour apaiser les douleurs, soulager l’anxiété ou encore atténuer les troubles du sommeil. Dans ces pays, une nouvelle étape vers l’utilisation de drogues pour des traitements médicaux est en train d’être franchie.
Selon le journal québécois Le Devoir, des psychiatres travaillent actuellement sur le développement de traitements recourant au LSD, à l’ecstasy, ou encore aux champignons hallucinogènes pour soigner des troubles de santé mentale. Contrairement aux médicaments déjà existants qui ne font qu’apaiser les symptômes, ces substances visent à "réparer" le cerveau.
Des effets réels sur la gestion des émotions
D'après une étude parue en mai dernier dans The Lancet Psychiatric, la MDMA, principe actif de l'ecstasy, s’avère être très intéressante pour soigner les chocs post-traumatiques. Elle est capable de provoquer la libération d'ocytocine, une hormone impliquée dans la capacité à éprouver de l'empathie, et agit aussi sur la sérotonine, un neurotransmetteur qui régule nos humeurs. L'activité cérébrale dans l'amygdale gauche, région associée à la peur, est aussi diminuée. Cette substance permet ainsi de repenser à l'événement traumatique sans en ressentir les effets négatifs.
En 2017, la MDMA a bénéficié, pour ses capacités à combattre le stress post-traumatique, du statut de "traitement révolutionnaire" de la part de la Food and Drugs Administration (FDA) américaine, qui permet d’accélérer les procédures réglementaires pour une possible mise sur le marché. Des études cliniques de phase 3, soit les dernières avant la mise en marché, sont actuellement en cours dans plusieurs villes du monde, et notamment à Montréal, précise Le Devoir.
Fin octobre, la psilocybine, la molécule psychoactive qui confère aux champignons hallucinogènes leurs propriétés psychédéliques, a elle aussi bénéficié de ce statut pour ses capacités à soigner la dépression récalcitrante. Elle est en effet capable d’augmenter la concentration de sérotonine dans le cerveau, ce qui provoque une euphorie et un optimisme prompt à soulager le patient dépressif.
"Plusieurs de nos patients ont décrit un sentiment de réinitialisation après le traitement, employant souvent des analogies d'ordre informatique. L'un d'eux a par exemple expliqué qu'il avait senti son cerveau comme 'défragmenté', tandis qu'un autre a parlé de 'redémarrage'", expliquait en 2017, dans un communiqué, le neuropsychologue de l'Imperial College of London Robin Carhart-Harris. Il avait mené, avec son équipe, des travaux sur les effets de la psilocybine avec l'aide de dix-neuf patients atteints de dépression et résistants aux traitements.
La recherche sur le LSD, elle, s'était nettement ralentie après qu'il ait été déclaré illégal. Mais depuis quelques années, les essais cliniques se multiplient à nouveaux à son sujet afin d'évaluer son efficacité sur les dépressions réfractaires à répétition. Selon Marie-Eve Morin, fondatrice et directrice d'une clinique spécialisée dans les soins aux personnes dépendantes à la drogue, ou encore à l'alcool, à Montréal et interviewée par Radio Canada, une mise sur le marché pourrait avoir lieu prochainement.
Des substances administrées sous surveillance médicale
Lors des essais cliniques réalisés, la MDMA, le LSD et la psilocybine sont administrés aux patients lors de séances de psychothérapie longues de plusieurs heures. "La MDMA et la psilocybine facilitent la psychothérapie parce qu’elles permettent au patient d’être davantage connecté à ses émotions", explique dans les colonnes du Devoir Gabriella Gobbi, professeure au Département de psychiatrie de l’Université McGill. Elle précise cependant que la prise de ces substances ne se substitue pas à la psychothérapie.
En théorie, seule une à trois séances suffisent pour que le malade soit guéri. Et l’utilisation de ces drogues est d’autant plus intéressante que le patient ne subit pas d’effets secondaires, contrairement à un traitement médicamenteux conventionnel. Ces drogues psychédéliques ne produisent de plus pas de dépendance psychologique, et rarement psychique.
En revanche, les médecins s'appliquent à adapter les doses à chaque patient afin d'éviter tout risque de psychose. D'autant que les personnes atteintes de troubles mentaux sont d'autant plus fragiles à ce genre de dérapage. Ainsi, si des résultats spectaculaires ont déjà été remarqués, les médecins qui participent aux essais cliniques sont sur la réserve quant à une utilisation à grande échelle. "Personnellement, je ne crois pas qu’on devrait encourager la thérapie psychédélique pour les maladies pour lesquelles on dispose déjà d’un traitement efficace, comme l’anxiété ou la dépression, indique au journal québécois Gabriella Gobbi, professeure au Département de psychiatrie de l’Université McGill, à Montréal. Cependant, pour les états de stress post-traumatique ou l’alcoolisme sévère, envers lesquels rien ne fonctionne vraiment, ça peut être plus intéressant."
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