Le Propecia, ce médicament contre la chute des cheveux toujours en vente malgré la controverse

Publié le 24 janvier 2019 à 18h06
Le Propecia, ce médicament contre la chute des cheveux toujours en vente malgré la controverse

Source : iStock

MÉDICAMENTS - Depuis plusieurs années, les victimes du Propecia se mobilisent. Elles dénoncent le fait que ce médicament contre l'alopécie masculine accumule les effets indésirables graves, que ce soit sur leur vie sexuelle ou sur leur état psychologique. Certains suicides pourraient y être liés.

"Je suis passé d’hypersexuel à asexué.... Mon ancien moi est un lointain souvenir.... Je me réveille au milieu de la nuit avec des palpitations cardiaques à la suite de mon cauchemar quotidien... dont je ne me souviens jamais... Je suis devenu obèse en raison de la dépression... C'est là que j’en suis arrivé maintenant...." Voici l’un des témoignages mis en ligne par l’association Aide aux victimes du finastéride (AVFIN). Le finastéride, c’est la molécule active du Propecia, ce médicament qui vise à lutter contre la perte des cheveux chez les hommes.

Depuis plusieurs années, cette association fondée par Sylviane Millon-Mathieu, dont le fils se serait suicidé à la suite de la prise de Propecia, se bat pour le retrait du marché de ce médicament. Parmi les effets secondaires listés au fil des années : des troubles sexuels, musculaires et du comportement. Une action collective en justice contre le laboratoire a récemment été autorisée par la Cour d'appel québécoise.

30.000 Français sous prescription

Initialement indiqué pour traiter l’hypertrophie bénigne de la prostate, le finastéride a obtenu l’autorisation en 1999, en France et en Europe, d’être utilisé pour lutter l’alopécie androgénétique, qui mène à la calvitie. Son mode d’action ? Inhiber la production de testostérone dans le corps, alors que des "taux élevés de dihydrotestostérone (DHT) sont retrouvés au niveau des follicules pileux du cuir chevelu des sujets concernés", indiquait en 2012  dans une note d'information l’Agence nationale de sécurité du médicament. Indiqué chez les hommes de 18 à 41 ans, il était prescrit cette année-là à 30.000 hommes en France. "Un chiffre plutôt à la baisse", précise Le Monde, qui consacre un article à cette molécule.

Une liste d'effets indésirables qui s'allonge

Depuis son autorisation de mise sur le marché, les effets indésirables sexuels (baisse de la libido, troubles de l’érection et troubles de l’éjaculation) ont été identifiés, précisait, toujours en 2012, l’ANSM. S'ils peuvent se déclencher pendant le traitement, il peuvent aussi perdurer. "Il est possible d’observer une persistance de troubles sexuels après l’arrêt d’un traitement par finastéride", écrivait ainsi l'autorité de santé.

Les troubles de l’humeur, eux, ont mis plus de temps à être reconnus. Fin 2015, l'Agence canadienne du médicament faisait déjà état, sur la base de différentes études, d’une possible survenue de pensées ou comportements suicidaires. Une alerte relayée par la revue médicale indépendante Prescrire l’année suivante. Ce n’est qu’en 2017 que l’Agence européenne des médicaments (EMA) demande d’ajouter, sur les notices, la possibilité d’une survenue de changements d’humeur, d’idées suicidaires et de dépression. A la suite de quoi l’ANSM alerte : "Le traitement par finastéride devra ainsi être interrompu devant tout symptôme psychiatrique." Selon Le Monde, elle devrait adresser dans les prochaines semaines une lettre aux 100.000 professionnels de santé afin de leur rappeler ces éventuels effets secondaires.

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En juin 2018, les autorités de santé canadiennes ont d'autre part ajouté aux effets indésirables connus "de rares cas de troubles musculaires tels que la rhabdomyolyse, la myopathie, la myalgie, la myasthénie et la hausse du taux de créatine kinase". "Dans certains cas, ces effets étaient réversibles à l'arrêt du traitement avec le finastéride", précisent-elles. Un mois plus tard, la Cour d'appel du Québec a autorisé le dépôt d'une action collective contre la filiale canadienne de l'entreprise Merck. Elle vise à indemniser les hommes qui auraient souffert d'effets secondaires persistants après avoir consommé les médicaments.

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Une seule alternative, peu efficace

Pour l’Agence cependant, il n’est pour l’heure pas question de retirer le Propecia du marché. "La balance bénéfice-risque est considérée pour l’instant comme favorable", estime dans le Monde la docteure Caroline Semaille, de la direction des médicaments anti-infectieux de l’ANSM. Un avis qui n’est pas partagé par Sylvaine Millon-Mathieu : "La question du bénéfice-risque se pose différemment pour ce médicament, car il n’est prescrit que pour une visée esthétique pour des hommes en bonne santé", explique-t-elle.

Actuellement, très peu d’alternatives existent au Propecia, commercialisé en France par le laborare MDS, filiale de l’américain Merck. "Il n’existe que deux traitements, le Minoxidil, une lotion qui ne marche pas très bien, et le Propecia, qui fait repousser les cheveux ou stoppe leur chute dans 30 % à 40 % des cas", note ainsi dans les colonnes du quotidien le professeur Jean-Luc Schmutz, chef du service de dermatologie au CHRU de Nancy-Brabois.


La rédaction de TF1info

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