Cancer : le retour au travail, un autre combat difficile

Publié le 4 février 2014 à 10h20
Cancer : le retour au travail, un autre combat difficile

SANTE - Perte de l’estime de soi, peur de la récidive… autant d’incertitudes qui peuvent compliquer une réintégration socioprofessionnelle pour les anciens malades d'un cancer. Aujourd'hui encore, trop peu de dispositifs leurs permettent de se préparer en amont à cette étape cruciale pour la reconstruction.

"Au début, j'étais dans le déni, mais j'ai réalisé que ce n'était pas possible de reprendre mon travail comme avant". Dix mois après l'annonce de son cancer du sein, Laurence s'apprête à retrouver son poste de DRH. En rémission, elle voulait reprendre les mêmes habitudes qu'avant, avant de comprendre que cela ne serait pas aussi facile. "J'ai eu la chance d'avoir un employeur très compréhensif, j'ai pris un mi-temps thérapeutique . Au début je me suis sentie coupable mais après je me suis remerciée car maintenant je sais que je peux vraiment y retourner".

Comme elle, 80 % des patients qui avaient arrêté leur travail pendant leur cancer, reprennent leur activité professionnelle, selon un récent sondage de l'Institut Curie . Pour les patients, cette initiative est vue comme un moyen de tourner la page, de vivre de nouveau normalement. Pour les médecins, le retour au travail participe à la phase cruciale de reconstruction. Mais d'après le même sondage, 60 % d’entre eux confient "avoir du mal à retrouver leur place". Or, si cette phase ne se déroule pas dans les meilleures conditions, elle peut compromettre la réinsertion socioprofessionnelle dans son ensemble.

"La principale préoccupation est la fatigue"

En France, environs deux millions de personnes vivent en ayant eu un jour un cancer. Le deuxième Plan Cancer 2009-2013 avait fait de "l’après-cancer" l’un de ses axes prioritaires pour s’attaquer "au sentiment de solitude" que les patients peuvent endurer lors du retour à la vie active : il prévoyait de personnaliser la prise en charge après la maladie. Mais selon l'Institut Curie, "le manque d’anticipation du retour au travail, le dialogue insuffisant avec le médecin du travail, l’incompréhension de la hiérarchie et des collègues sont des obstacles toujours aussi présents".

Pour Monique Sevellec, psychosociologue à la Maison des patients et des proches de l’Institut Curie, "ce retour dans le monde professionnel reste difficile car le corps est modifié par les traitements et la principale préoccupation du malade est la fatigue. Et puis, les patients prennent conscience qu'ils ont changé et angoissent en se demandant s'ils seront à la hauteur." À ce sujet, le ministère du Travail précise que "si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l’emploi qu’il occupait, l’employeur est tenu de lui proposer un emploi approprié à ses capacités".

Des progrès attendus

"Sauf que même s'ils sont très angoissés, les patients n'osent pas prendre contact en amont avec leur entreprise, leur médecin du travail", souligne Monique. "Les patients sont tellement pris par le désir de tourner la page qu'ils oublient de se remettre complètement de leur convalescence. Moi j'ai dû avoir un accompagnement personnalisé pour en prendre conscience", précise Laurence. Beaucoup de spécialistes citent l'exemple de l'Allemagne, où le dialogue entre spécialistes et médecin du travail est mieux instauré et où le salarié conserve pendant un certain temps le statut de malade.

Comment alors passer définitivement du statut de malade à celui d'employé en rémission ? Monique le reconnaît : "il y a tout un travail à faire sur l'accompagnement pour combler le vide entre l'hôpital et l'entreprise. Pourquoi ne pas mettre en place des structures dédiées ?". Le troisième plan cancer, officiellement lancé en 2014 sera axé sur les inégalités face à la maladie. "La vie pendant et après le cancer" est de nouveaux l'un des axes majeurs, et aborde notamment la question de l’accessibilité aux prêts et aux assurances pour les malades.


La rédaction de TF1info

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