Comment transformer votre voix en arme dans les situations conflictuelles

Publié le 18 avril 2019 à 18h24
JT Perso
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Source : Sujet JT LCI

THIS IS YOUR VOICE - Au quotidien, dans le métro, avec les enfants ou lors d’une réunion de travail, comment votre voix peut-elle vous aider à désamorcer des situations conflictuelles ? Le docteur Christophe Haag nous répond.

La Journée mondiale de la voix, qui se tient chaque année le 16 avril, a pour objectif d’encourager les individus à utiliser leur voix autant de fois qu’ils le peuvent, tant celle-ci contribue à entretenir une communication efficace et saine entre les individus. Selon le docteur Christophe Haag, auteur de "La contagion émotionnelle" (Albin Michel), la voix constitue un réel outil de socialisation : "Ce qui est intéressant, nous dit-il, c'est que nous avons tendance, lors d'une conversation, à imiter inconsciemment l'accent, le débit, l'intensité et la fréquence fondamentale de la voix de notre interlocuteur, pour être accepté par lui. Et c’est en imitant les vocalisations d'autrui que nous imitons son état émotionnel." Preuve que la voix a un pouvoir en bien des circonstances.

Christophe Caupenne, ancien négociateur du RAID dont le surnom était justement "La voix", se servait de la sienne comme d’un instrument d’influence pour faire tomber les armes de preneurs d’otages ou autres forcenés, en travaillant sur une "fréquence d'intimité", comme par exemple prendre le même accent que son interlocuteur. Soit la théorie de l’accommodation, une manière de se mettre au même niveau acoustique que l’autre pour réduire la distance sociale, augmenter l’empathie.

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Au quotidien, est-il aussi possible d'apaiser une tension par le simple pouvoir de la voix ? Christophe Haag assure que celle-ci peut "faire office de casque bleu dans des situations compliquées, quand ça 'bulle' émotionnellement, et donc véhiculer des émotions calmantes, apaisantes." Il prend ainsi l'exemple d'un enfant qui refuse de manger son repas ou de se brosser les dents : "En tant que parent, ce qui est important face à un petit enfant, récalcitrant ou en colère, c'est d'essayer de respirer un grand coup (en pratiquant par exemple la cohérence cardiaque) de sorte à pouvoir formuler votre demande calmement, en baissant le ton de sa voix. Car si les deux protagonistes vocifèrent, la colère ambiante n'en est que renforcée. L'un des d'eux doit donc émotionnellement 'décrocher', comme disent les pilotes de chasse, et c'est précisément le rôle du parent censé être plus mature sur ce registre."

Il est alors important de se mettre alors à la hauteur de son enfant, "afin de casser la représentation 'haut' (grondeur-oppresseur tout puissant) vs 'bas' (grondé-oppressé victime) que se fait l'enfant de la situation, et qui en de telle circonstance fait grossir le sentiment d'injustice", poursuit-il. "Il faut alors lui demander, sur un ton rassurant toujours, de respirer calmement et de décrire sa colère (grosse, moyenne ou petite). En cherchant à décrire son état émotionnel, l'enfant commencera à s'auto-réguler. Et, là, la discussion se rouvre." 

Une situation familiale qui se résout plus facilement, par une autorité naturelle et un contrôle de la situation, que d'autres situations de la vie de tous les jours, beaucoup moins maîtrisables...

Utiliser sa voix pour négocier

Prenons une altercation dans le métro : est-il réellement possible de l'apaiser simplement grâce à sa manière de s'exprimer ? "C'est exactement comme pour une négociation au RAID", assure Christophe Haag. "Résoudre un conflit requiert d’être totalement disponible pour la personne en face et d’écouter exactement ce qu'elle dit. Il faut être disposé à mettre de côté tous ses carcans éthiques, culturels, religieux ou sociologiques. Il faut s’oublier et faire du cas par cas, en s’efforçant d’avoir un œil neuf à chaque nouvelle affaire. Cette phase d’écoute permet à la partie archaïque du cerveau de capter et d’interpréter les modulations de la voix, les infimes variations de vibrato, les balbutiements de stupeur, les trémolos atones, les souffles courts de la tension émotionnelle, pour y détecter les prémices d’un accès de violence, ou tout autre indice chez l’autre."

Je ne suis pas sûr que l’on fasse un bon négociateur si l’on n’aime pas foncièrement les gens

Christophe Haag, docteur

Et après cette phase d'observation, que faire ? "Une fois cette phase de capture terminée, il convient de reprendre la parole pour impacter, corriger l’état émotionnel de l’autre, avec l’objectif par exemple de faire redescendre la tension chez lui. Il est alors important de contrôler le son de sa voix et, pour y arriver, il faut rechercher une forme de sincérité, de générosité, qui montrera que vous vous sentez concerné par ce que dit votre interlocuteur. Cette posture produit toujours des résultats positifs car l’empathie 's’entend' et rend crédible tout le discours. D’ailleurs, je ne suis pas sûr que l’on fasse un bon négociateur si l’on n’aime pas foncièrement les gens et si on ne leur veut pas du bien."

La voix devient alors une arme qui s'utilise partout, en famille comme dans le monde du travail, où chacun doit trouver sa voie : "Les managers ou les chefs d’entreprise ont à gérer de nombreuses situations difficiles. Prenez l’exemple de la réunion de travail qui dérape. Le conflit est inhérent au travail en équipe. L’important n’est donc pas de chercher à l’éviter à tout prix, mais de savoir le transformer en une dynamique positive et non dommageable pour les relations interpersonnelles dans l’entreprise. L’une des qualités requises est d’être capable de désamorcer un conflit en réunion avant qu’il ne dégénère."

Christophe Haag prend en exemple la confession que lui a faite un grand dirigeant qui, face à des salariés en colère le séquestrant, s'en est sorti grâce à la manière dont il leur a parlé : "Plus encore que les mots, c’est la manière dont sa voix se posait dans les graves, son affirmation, sa profondeur, les silences, qui lui ont permis de se tirer de ce mauvais pas. Sa voix ne tremblait pas, elle retranscrivait de manière sincère ce qu’il ressentait à cet instant et ça, les syndicalistes le sentaient bien. Son ton était autoritaire, mais sans pour autant donner le sentiment qu’il ne les entendait ou ne les respectait pas. Cette espèce d’alchimie, qui s’opère entre les convictions profondes et la compréhension de la détresse des salariés, passe à travers la voix. Ça ne dure pas longtemps, votre voix doit intuitivement trouver sa juste hauteur et la bonne coloration pour retranscrire tout cela. Mais c’est bien parce qu’il s'est imposé par la voix qu’on l’a libéré."


Romain LE VERN

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