Plusieurs instances scientifiques et médicales s'opposent à la réintégration des soignants non vaccinés contre le Covid-19.Le Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de Genève et fervent défenseur de la vaccination, milite de son côté pour leur retour.Auprès de TF1info, il explique les raisons de sa prise de position.
C'est un débat qui revient depuis plusieurs jours : le personnel soignant non vacciné contre le Covid-19 - et donc suspendu - doit-il être réintégré ? Si une partie de la classe politique le réclame, les scientifiques sont beaucoup moins enthousiastes. L'Académie de médecine estime par exemple qu'un "revirement" à ce sujet nuirait au "climat de confiance" entre les soignants et les soignés, et a affirmé cette semaine sa "ferme opposition" à leur réintégration.
Le Conseil scientifique, l'instance chargée de conseiller le gouvernement et dont la mission s'arrêtera au cœur de l'été, est plus mesuré. "Le Conseil scientifique est réservé" quant au retour des soignants non vaccinés, explique, ce jeudi 21 juillet, son président, Jean-François Delfraissy, qui note que toute la stratégie de contrôle de la saturation hospitalière "repose sur la vaccination". De son côté, le ministre de la Santé, François Braun, indique avoir saisi la Haute autorité de santé.
À l'inverse, le directeur de l'Institut de santé globale de Genève (Suisse), Antoine Flahault, fervent défenseur de la vaccination dans les médias et sur les réseaux sociaux depuis le début de la pandémie, souhaite voir les soignants ayant refusé le vaccin revenir dans les couloirs des hôpitaux. Sur Twitter, il a estimé que leur suspension n'était "plus fondée". Entretien.
1/3 - Le maintien de la suspension des soignants non vaccinés n’est plus fondé sur le plan scientifique. Il n’y a en effet pas de raison d’exiger le vaccin chez les soignants car il n’évite pas ni ne réduit suffisamment les contaminations avec les nouveaux variants du #SARSCoV2 — Antoine FLAHAULT (@FLAHAULT) July 20, 2022
Dans une série de tweets, vous plaidez pour la réintégration des soignants non vaccinés contre le Covid-19. Pourquoi ?
Le monde vit une crise sanitaire sans précédent qui a conduit à des prises de positions très clivantes. Sans fondement scientifique, des personnels soignants ont rejeté les vaccins à une époque où ils protégeaient efficacement de la transmission et des formes graves. Désormais, les données scientifiques nous montrent qu'ils ne nous protègent plus beaucoup contre les transmissions. La preuve avec les vagues répétées d'Omicron, malgré une très forte couverture vaccinale de la population.
En revanche, les vaccins protègent toujours contre le risque de formes graves...
Oui, mais la vaccination obligatoire des soignants avait été fondée sur la protection vaccinale contre les transmissions et le risque de propagation du virus à l'hôpital et auprès des personnes vulnérables. Aujourd'hui, cette obligation vaccinale n'a plus lieu d'être.
Ces personnels se sont égarés, mais les pouvoirs publics doivent reconsidérer leur position
Pr Antoine Flahault
L'Académie de médecine et le Conseil scientifique recommandent de leur côté le statu quo. Ils se trompent ?
Nous avons besoin d'apaiser les tensions. Je ne suis pas sûr que nous puissions y parvenir par l'exclusion d'une catégorie de personnels dont nous avons le plus grand besoin dans le système de santé. Il faut restaurer un climat plus apaisé entre les soignants, mais aussi entre soignants et patients, et je pense que cela passera par la réintégration de ces personnels qui, à un certain moment de la pandémie, se sont égarés par leurs positions blâmables. Désormais, Omicron a changé la donne et les pouvoirs publics, tout comme les experts, y compris ceux de l'Académie de médecine (dont je suis membre correspondant), se devraient de reconsidérer leur position.
Plusieurs vaccins sont déjà obligatoires pour les soignants. Pourquoi celui contre le Covid-19 ne doit-il pas entrer dans cette catégorie ?
Il faut une raison pour justifier une obligation vaccinale. Le seul fait d'éviter les formes graves ne suffit pas. L'obligation vaccinale des soignants se concevait très bien à l'époque où le vaccin était un outil efficace et puissant contre les transmissions à l'hôpital. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et tant que les vaccins ne réduiront pas mieux la transmission, alors l'obligation vaccinale n'aura plus grand sens.
Le gouvernement ne souhaite pas réintégrer les soignants non vaccinés tant que le virus circule à forte intensité. Votre demande est-elle conditionnée à un seuil de circulation virale ?
Par rapport au vaccin, le port du masque FFP2 par les soignants a beaucoup plus d'effet contre la propagation hospitalière du virus, ainsi que la ventilation adéquate des espaces clos. Réintégrer des soignants non vaccinés n'aurait donc qu'un très faible impact sur la circulation du virus à l'intérieur des services de soins.
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