INTERVIEW - Alors que le Premier ministre Édouard Philippe présente le plan de déconfinement mardi 28 avril, une question se pose : comment retrouver une partie de nos libertés sans relancer l'épidémie ? Arnaud Banos, chercheur du CNRS, nous éclaire.
À partir du 11 mai, le quotidien des Français va de nouveau être chamboulé. Si ce n'est pas le retour à la vie d'avant, comme le répète l'exécutif, de nombreux établissements vont rouvrir. Une partie des élèves va retourner à l'école, certains salariés au travail, et les commerces, à l'exception des bars et des restaurants, pourront accueillir des clients.
Pourtant, par rapport à l'avant-confinement, une chose ne changera pas : le coronavirus est toujours en circulation. La pandémie, qui a déjà causé la mort d'au moins 22.000 personnes en France, a été contrôlée grâce au confinement. Mais la fin progressive de cette mesure laisse craindre un rebond épidémique et l'arrivée d'une deuxième vague, à l'instar des pays d'Asie, qui voient émerger depuis quelques jours de nouveaux cas de Covid-19.
En France, la courbe des entrées en réanimation, en baisse constante depuis près de trois semaines, va-t-elle repartir à la hausse après le 11 mai ? Quand observerons-nous les potentiels effets de déconfinement progressif ? Un deuxième confinement est-il envisageable ? LCI a posé ces questions à Arnaud Banos, chercheur du CNRS et spécialiste de la modélisation.
LCI : Le nombre de patients en réanimation va-t-il de nouveau augmenter après le 11 mai ?
Arnaud Banos : Tout dépend de la façon dont cela se déroule. Aujourd'hui, si tout le monde sort dans la rue et que nous recommençons comme avant, un rebond épidémique est certain, il n'y aurait aucune raison que la deuxième vague n'arrive pas. À partir du moment où nous sortons du confinement, nous relâchons la contrainte. Cependant, une certaine éducation a été mise en place et une grande partie de la population a conscience de l'importance des gestes barrières et de la distanciation sociale. Nous pouvons donc imaginer que nous allons atteindre une dynamique épidémique intermédiaire entre celle de la période de confinement et celle de la vie d'avant.
Quand risquons-nous d'observer les effets de la fin progressive du confinement ?
Il y aura une période de latence, entre quatre et six jours, puisqu'il y a toujours un décalage entre une nouvelle mesure et son effet. Cela pose un problème : si la population commence à sortir la semaine du 11 mai et s'aperçoit que cela ne change rien dans les chiffres, il risque d'y avoir un relâchement, et le nombre de cas dans l'ensemble de la population va se remettre à croître. Celui des personnes en réanimation augmentera alors.
Est-ce envisageable de concilier la fin progressive du confinement et l'absence de rebond épidémique ?
Oui, à condition d'être capable de maîtriser très finement la sortie du confinement, et de pouvoir revenir à une telle mesure si nécessaire. L'Allemagne, par exemple, a mis en place un principe selon lequel le confinement peut revenir à tout moment. Nous sommes sur du pilotage à vue, car nous ne disposons pas de modèles qui nous permettraient de dire précisément : "Attention, si vous continuez de sortir, dans 3 jours, la courbe épidémique remonte".
Après le 11 mai, il faudra être très vigilant et surveiller en permanence le nombre d'entrées en réanimation
Arnaud Banos, chercheur du CNRS
Pourquoi la sortie du confinement est-elle si difficile à organiser ?
La phase de confinement était guidée par des objectifs sanitaires afin de maîtriser l'épidémie. Pour le déconfinement, il faut garder en tête la priorité sanitaire, tout en essayant de satisfaire d'autres objectifs : économiques, sociaux, éducatifs... Mais ils ne sont pas tous cohérents les uns avec les autres. Par exemple, d'un point de vue éducatif, il y a plutôt intérêt à remettre les enfants à l'école, mais pas d'un point de vue sanitaire.
Nous entrons donc dans une zone de brouillard...
Oui, nous ne savons pas exactement ce qu'il va se passer, il y a de l'incertitude. Nous ne connaissons pas l'impact des mesures prises, des moteurs que nous sommes en train de rallumer. Par exemple, les enfants du primaire ont-ils vraiment la même capacité à véhiculer le virus que les lycéens ? Nous ne savons pas. Il faut donc être très vigilants et surveiller en permanence plusieurs indicateurs, dont le nombre d'entrées en soins intensifs. Avec l'effet de latence, si nous ne réagissons pas vite, nos capacités hospitalières risquent d'arriver à saturation. Il faut l'éviter, car ce sont forcément des pertes humaines, et ce n'est pas acceptable.
Vous évoquez un possible deuxième confinement, arrivons-nous dans une stratégie de "stop and go", qui consiste à enchaîner les périodes de confinement et les périodes de retour à une vie plus normale ?
À ma connaissance, le "stop and go" n'a pas été envisagé par la plupart des gouvernements. Ce n'est pas une option facile à faire avaler à la population, car le confinement ne fonctionne que si la population est en sa faveur. Les études montrent que la majorité des Français ont accepté le confinement parce que c'était la seule option possible. Le "stop and go" est une stratégie sur une période longue, jusqu'à la disponibilité du vaccin. Tout le monde connaît désormais le coût individuel et collectif du confinement. Même si ce n'est pas la stratégie envisagée, je pense qu'à tout moment, nous devons pouvoir revenir à une période de confinement si nous perdons le contrôle de l'épidémie.
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