À LA LOUPE – Les découvertes de virus encore inconnus ou de contaminations nouvelles peuvent inquiéter, alors que le coronavirus Covid-19 oblige les autorités chinoises à prendre des mesures drastiques. Devons-nous pour autant craindre ces agents infectieux et s'en prémunir à tout prix ? Pas forcément.
Malgré un taux de guérison annoncé en forte hausse par les autorités chinoises, l'épidémie de coronavirus reste sous haute surveillance. Entre les craintes de contamination et l'absence de traitement, c'est dans un climat anxiogène que se propagent de nombreuses informations. Parmi elles : la découverte d'un nouveau virus au Brésil, dont au moins 90% du génome n'a jamais été observé.
Dans le même temps, des médias rapportent qu'au Nigeria, les autorités de santé s'inquiètent d'une "étrange épidémie" qui a déjà causé 15 décès et infecté une centaine de personnes. Les premiers tests effectués permettent d'écarter l'hypothèse d'une forme de fièvre hémorragique déjà connue. Il ne s'agit pas non plus de cas de coronavirus, indiquent les autorités de santé locales.
De nouveaux virus découverts chaque jour
Après le coronavirus, faut-il s'attendre à voir se propager de nouvelles épidémies ? Doit-on s'inquiéter à la lecture de ces informations ? Sommes-nous armés pour nous défendre face aux virus ? Ces questions, LCI les a posées à Marc Eloit, responsable du laboratoire de découverte de pathogènes au sein du département de virologie de l'Institut Pasteur.
La probabilité qu'un virus soit pathogène est extrêmement faible
Marc Eloit, responsable de laboratoire à l'Institut Pasteur
Avant toute chose, il fait remarquer que de nouveaux virus identifiés, "il y en a tous les jours". Des découvertes qui n'ont donc rien de surprenant : "Dès qu'on analyse de nouveaux animaux, on en trouve. Partir de la découverte d'un virus pour spéculer, cela n'a pas de sens." "La probabilité qu'un virus soit pathogène est extrêmement faible", rappelle-t-il, soulignant d'ailleurs que sur "la surface de notre peau, on compte au moins 25 virus qui ne sont pas pathogènes". Certains nous sont d'ailleurs utiles, à l'instar d'une partie des bactéries. Ils peuvent notamment aider à la cicatrisation de la peau.
Le Yaravirus découvert au Brésil, "déroutant" et qui fascine les scientifiques, ne ressemble pas à des familles de virus déjà connues. Cela ne signifie pourtant pas qu'il faille s'en méfier particulièrement. En effet, il s'agit d'un virus qui touche les amibes, des micro-organismes vivant dans l'eau. Conséquence logique, c'est dans un lac que ce "Yaravirus" a été découvert. "On recense des virus chez les mouches, les amibes, les champignons… Mais ils ne sont pas pathogènes pour des espèces qui sont loin d'elles dans l'arbre de la vie", note Marc Eloit.
Les conséquences d'une vigilance accrue
Les travaux des chercheurs nous permettent aujourd'hui de mieux comprendre les virus et leur fonctionnement. En parallèle, les dispositifs d'alerte mis en place par les autorités sanitaires ont effectué d'importants progrès. "Si on n'avait pas des organismes mondiaux comme l'OMS, on ne se rendrait sans doute pas compte de l'existence de virus comme celui de la grippe aviaire", glisse Marc Eloit. L'expert en virologie estime que l'on peut même "se poser la question pour le coronavirus". Sans les procédures de vigilance aujourd'hui en place, "peut-être parlerait-on simplement d'une grippe virulente en Chine".
Pour le spécialiste, il faut garder à l'esprit que "les virus sont des parasites". Et le propre d'un parasite, poursuit-il, "est de ne pas tuer son hôte. Cela explique que la plupart des virus ne soient pas pathogènes". Toujours est-il que si les virus qui passent à l'Homme sont généralement inoffensifs, une petite minorité peut toutefois se révéler hautement pathogène.
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Prudent lorsqu'il analyse la situation actuelle et les craintes liées au coronavirus, Marc Eloit rappelle que la grippe saisonnière, due à un virus propre à l'homme, tue "chaque année 300.000 à 500.000 personnes par an à l'échelle de la planète". S'il ne faut pas sombrer dans la crainte, le spécialiste concède qu'une fois un virus apparu, il "n'est pas forcément évident de lutter contre". Le fait que ce soit la Chine qui ait été touchée par le coronavirus serait presque un mal pour un bien, le pays disposant "de connaissances importantes et de spécialistes", ainsi que d'infrastructures pour prendre en charge les personnes contaminées. Sans compter un pouvoir coercitif non négligeable dès lors qu'il s'agit de décréter le confinement d'une population.
Une épidémie de cette nature aurait été plus inquiétante si elle était survenue en Afrique. En effet, l'identification du virus, préalable à la recherche d'un vaccin, n'aurait pas été aussi rapide. "Un tel virus qui circulerait en Afrique, à part dans les pays les plus développés, ce pourrait être beaucoup plus grave", résume Marc Eloit.
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