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Non, le taux de survie du Covid-19 n'est pas de 99,95%

Publié le 13 novembre 2020 à 11h07
Le taux de mortalité de l'épidémie est assez plus proche des 1%.

Le taux de mortalité de l'épidémie est assez plus proche des 1%.

Source : FREDERICK FLORIN / AFP

MINORÉ - Des calculs trompeurs sont utilisés par des internautes qui cherchent à minorer le danger du virus en assurant que son taux de létalité est très faible. LCI est parti en quête de chiffres fiables.

Mise à jour du 13/11 : une précédente version de cette article entretenait une confusion entre taux de mortalité et de létalité. Si les données présentées sur le taux de mortalité sont globalement correctes, le taux de survie qui en découle s'avère quant à lui trompeur.

 

Relayée par près de 5.000 personnes sur Facebook, une publication incite à "arrêter d'avoir peur". En photo : une affiche, présentée comme collée à la vitrine d'une pharmacie et censée prouver que les mesures contre le Covid-19 sont disproportionnées par rapport au danger réel de l'épidémie. L'argument utilisé ? Qu'avec 35.000 décès enregistrés pour 67 millions d'habitants, le taux de mortalité du virus n'est que de 0,05%, ce qui aboutit selon les auteurs à un taux de survie de 99,95%. Une démonstration hasardeuse et, in fine, trompeuse. 

Des calculs à revoir

Les chiffres ici avancés sont partiellement trompeurs. Le calcul du taux de mortalité (comparant le nombre de décès à la population) est assez proche de la réalité, celui-ci étant de 0,063%, mais il est totalement faux d'affirmer que le taux de survie du Covid est de 99,95%. Ce chiffre ne serait en effet valable qu'à une seule condition : que toute la population soit ou ait été contaminée, ce qui n'est évidemment pas le cas aujourd'hui. Ce taux de survie induit dont de connaître le taux de létalité, beaucoup plus compliqué à estimer. 

L'OMS elle-même l'explique, "le véritable niveau de transmission est souvent sous-estimé car une large part des personnes infectées ne sont pas détectées, soit parce qu'elles sont asymptomatiques, soit parce qu'elles n'ont que des symptômes légers et ne se présentent donc généralement pas dans les établissements de soins".  Puisqu'il n'est pas d'actualité de procéder à des tests massifs pour l'ensemble de la population, seuls des travaux de modélisation peuvent être réalisés afin de connaître le véritable taux de létalité. 

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Fin février, "l’Organisation mondiale de la santé a estimé grossièrement que le taux de létalité était de 3,8 % parmi les cas confirmés", fait remarquer le magazine Pour la science. Des estimations revues à la baisse ces dernières semaines, grâce à une série d'études scientifiques. Le véritable taux de létalité avoisinerait plutôt 1%, indique Le Point, qui mentionne les travaux d'une "équipe de chercheurs de l'Imperial College de Londres". Celle-ci "s'est basée sur pas moins de 175 études publiées dans le monde. Dans les pays à revenu élevé comme la France, les scientifiques situent le taux de mortalité après infection par le Sars-CoV-2 à 1,15 %, tandis que, dans les pays à revenu faible, il avoisinerait plutôt les 0,23 %".

Ces différences ne sont pas encore bien expliquées, mais des hypothèses sont formulées pour tenter de les comprendre. La jeunesse des populations dans certains pays, en Afrique notamment, pourrait conduire à cette amplitude importante. L'impact du climat peut lui aussi être avancé comme une cause probable.

L'impact majeur de l'âge

S'il est trompeur de calculer un taux de survie en incluant des personnes non contaminées dans les calculs, il est au contraire essentiel d'examiner les données rapportées à l'âge des patients. En effet, si l'on parle d'un taux moyen pour l'ensemble de la population, il convient de se focaliser sur des classes d'âge spécifiques, qui font émerger d'immenses disparités. 

Les estimations de l'Imperial College de Londres sont très claires : plus on vieillit, plus le taux de létalité du Covid-19 augmente. Il est par exemple 90 fois supérieur pour une personne de 84 à 89 ans que par rapport à une autre de 35 à 39 ans. Le graphique ci-dessous permet de visualiser ces différences majeures.

Les conclusions que l'on peut tirer de ces données sont assez simples : si l'on a entre 0 et 40 ans, le risque de mourir du Covid-19 est très faible suite à une contamination. Un risque qui va croissant à mesure que l'on vieillit, et qui se révèle majeur pour les personnes les plus âgées. Près d'un nonagénaire sur 5 décède en effet lorsqu'il contracte le virus. Notons aussi que l'évolution de la prise en charge des patients peut avoir une influence. La meilleure compréhension du virus a ainsi permis de réduire sa létalité par rapport à la première vague, dans les services de réanimation notamment.

En résumé, il est donc totalement faux d'affirmer que le taux de survie du Covid est de 99,95%. Les travaux menés par les chercheurs montre qu'il avoisine plutôt les 99%. Néanmoins, il convient de souligner qu'il s'agit là de taux moyens, qui méritent d'être analysés plus finement, en fonction par exemple de l'âge des patients ou des pathologies et comorbidités dont ils pourraient souffrir par ailleurs.  

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Thomas DESZPOT

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