Quelle est aujourd'hui la part des médicaments "made in France" ?

Publié le 16 juin 2020 à 18h08
La France reste très dépendante de l'Asie en matière de production de médicaments.
La France reste très dépendante de l'Asie en matière de production de médicaments. - Source : Illustration Volodymyr Hryshchenko on Unsplash

À LA LOUPE - Emmanuel Macron souhaite que des médicaments stratégiques voient leur production relocalisée en France. L'énorme majorité des médicaments est aujourd'hui importée.

Relocaliser pour reprendre la main. En visite ce mardi sur un site Sanofi Pasteur à Marcy-l'Etoile (Rhône), Emmanuel Macron a plaidé pour une forme de souveraineté sanitaire, annonçant la mise en place d'une "initiative de relocalisation de certaines productions critiques", de médicaments notamment. "Tout le monde a vu, durant cette crise, que certains médicaments usuels n'étaient plus produits en France et en Europe", a souligne le chef de l'Etat, assurant notamment qu'à l'avenir "on pourra, par exemple, pleinement reproduire, conditionner et distribuer du paracétamol en France". 

Le président de la République entend voir l'Etat "financer des infrastructures de production pharmaceutique comme de recherche et développement", et a mis sur la table "une première enveloppe de 200 millions d'euros". Une annonce qui survient dans le contexte sanitaire que l'on connaît, après plusieurs mois d'une épidémie aux conséquences majeures. Une crise qui interroge sur la capacité de production de médicaments en France, notre pays étant aujourd'hui très dépendant de l'Asie. 

20% de la production effectuée dans l'Hexagone

Qu'en est-il véritablement de la production de médicaments en France ? Pour le savoir, LCI a contacté Les Entreprises du médicament (LEEM), principal syndicat du milieu pharmaceutique. Il renvoie à des "repères sur la production pharmaceutique", un document édité en janvier 2018 et qui permet de faire le point sur cette question. Si la production de médicaments concerne dans l'Hexagone un peu plus de 44.000 emplois, on observe qu'une très grande majorité des médicaments remboursés (78%) sont produits hors de nos frontières. 

On constate par ailleurs que 30% des génériques sont produits en France, tout comme 50% des médicaments non remboursés, 27% des vaccins ou 17% des principaux médicaments utilisés à l’hôpital. C'est encore plus critique pour les anticorps monoclonaux (seulement 3%), que l'on utilise notamment dans des traitements contre des maladies inflammatoires chroniques , des cancers et encore des rejets de greffe.

Cap sur l'Asie

La dépendance française en la matière s'explique par de multiples facteurs. Le LEEM souligne que "la production industrielle française est essentiellement consacrée à la fabrication de produits chimiques matures. Elle est aujourd’hui fragilisée par le
manque d’attractivité de la France pour la production de nouveaux médicaments."
Le syndicat regrette qu'en 2017, alors que "l’agence européenne du médicament a autorisé 91 nouveaux médicaments", seuls "6 sont ou seront produits en France".

Médicaments : quid de la production dans l'Hexagone ?Source : JT 20h WE

"Il faut remonter à une vingtaine d'années en arrière" pour expliquer cette situation, rappelait l'an passé LCI. À l'époque, "la France, qui souhaite maîtriser les dépenses publiques en santé, choisit de tout miser sur le développement des médicaments génériques. Il s'agit des traitements qui contiennent les substances actives dont les brevets ont pris fin. Les génériques reviennent moins cher à la vente et donc à rembourser pour la Sécurité sociale. Un mouvement similaire d'un plus large recours aux génériques a lieu dans les autres pays développés."

Nous voici donc désormais dans un contexte ou la dépendance vis-à-vis d'autres pays producteurs s'est accrue. En particulier par rapport à l'Asie. Ce sont la Chine et l'Inde qui assurent à elles deux une grande partie de la production mondiale de médicaments et de substances actives. Aujourd'hui, l'Inde représente 60% de la production mondiale de vaccins. Le pays assure environ la moitié de la demande des vaccins DPT (diphtérie, tétanos et coqueluche) et BCG (bacillus calmette guérin) et 90% de la demande de l'OMS pour le vaccin contre la rougeole. Mais le vrai laboratoire pharmaceutique du monde reste la Chine, qui fournit 80% des besoins de l'Inde en ingrédients pharmaceutiques actifs. 

Certaines des molécules les plus courantes sont aujourd'hui produites à 100% à l'étranger. On peut ainsi citer l’aspirine, importée pour moitié depuis la Chine.  "On n’en produit plus en France. La dernière usine européenne, était située en Isère, elle a fermé en 2008", rappelait France Info en février. 

L'initiative du président de la République est donc à mettre en rapport avec la structuration du marché du médicament en France. Malgré la présence de 271 sites de production dans l'Hexagone, une grosse majorité de la production est aujourd'hui importée. Une forme de dépendance s'est ainsi mise en place lors des dernières décennies, vis-à-vis de la Chine en particulier, ou bien encore de l'Inde.  

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Thomas DESZPOT

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