RISQUE - Face au nombre de contaminations qui augmente dans les établissements scolaires et aux fermetures qui s'enchainent, l'inquiétude prend le dessus chez les professeurs, de plus en plus nombreux à exercer leur droit de retrait. Mais que disent les études du potentiel danger qu'ils encourent ?
Les professeurs des écoles comptent-ils parmi les plus exposés face à l'actuelle flambée épidémique ? Dans l’Éducation nationale, les témoignages s'enchaînent pour relater les craintes et les difficultés grandissantes à faire fonctionner les établissements scolaires, les personnels enseignants et administratifs étant eux-mêmes touchés par le Covid-19. En une semaine, le nombre de personnes infectées a ainsi augmenté de 1809 à 2515, soit un taux de 0,22%.
Au point que nombre d'entre eux s'estiment, plus encore que ces derniers mois, actuellement en première ligne face aux toux et nez qui coulent des plus jeunes. À tort ou à raison ? Si tout semble indiquer que le Sars-Cov-2 circule effectivement activement à l’école, peut-on pour autant en déduire qu'il s'agit d'un lieu de super contamination et donc d'un lieu de travail à risque ? On fait le point.
Que nous enseigne l'étude ComCor ?
Selon les résultats actualisés le 2 mars de l'étude ComCor, menée par l'Institut Pasteur, les professions les plus à risque sont celles qui s’exercent en milieu clos, avec des contacts fréquents avec d’autres personnes. Si ces caractéristiques correspondent à l'exercice des métiers de professeur des écoles et d'instituteur, ces derniers figurent en quatrième position parmi les professions les moins exposées au risque des contaminations derrière les agriculteurs, les professeurs et les professions scientifiques puis les professions intermédiaires administratives et commerciales de l’entreprise. Toujours selon ce classement, les enseignants seraient ainsi plus épargnés que les policiers et les militaires, les employés administratifs des entreprises mais aussi les employés civils et les agents de service de la fonction publique, tous considérés comme étant peu exposés. Ce qui n'est pas le cas en revanche des chauffeurs de taxi et de VTC, particulièrement à risque, mais aussi des cadres de la fonction publique, des ingénieurs et des cadres techniques d’entreprise, des cadres administratifs et des commerciaux d’entreprise ou encore des chefs d’entreprise de 10 salariés ou plus et des professions intermédiaires de la santé et du travail social.
À noter tout de même que l'évaluation de l'exposition au risque des enseignants semble avoir évolué ces derniers mois, puisque dans le premier volet de l'étude menée par l'institut Pasteur, publié en décembre dernier, la profession figurait en tête des métiers les moins à risque face au Covid.
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Vaccination prochaine des enseignants : qu’en pensent-ils ?
Dans un éditorial publié dans le British medical Journal signé par le professeur Arnaud Fontanet, l'épidémiologiste à l'Institut Pasteur et membre du conseil scientifique explique qu'il n'est pas question de nier la transmission du virus dans les établissements scolaires : elle existe bien, selon lui. Mais ces derniers "ne jouent pas le rôle d'amplificateur" de l'épidémie, les enseignants n'ayant par conséquent pas plus de risques d'être infectés que des personnes du même âge et du même sexe. "Plus une personne est symptomatique, plus elle est contaminante - or les enfants sont asymptomatiques, ils ne sont donc pas plus transmetteurs que les autres", analyse pour Les Echos Pascal Crepey, enseignant chercheur a l'École des Hautes Études en Santé Publique de Rennes.
Et en dehors de nos frontières ?
Nos voisins Outre-Manche semblent conforter cette analyse. D'après le Bureau national des statistiques britannique, entre le 28 décembre et le 9 mars derniers, il n'a en effet pas été constaté de hausse du taux de décès liés au Covid-19 chez les personnels enseignants hommes et femmes du secondaire. "Les chiffres n'ont pas statistiquement significativement augmenté par rapport aux taux observés dans la population des personnes du même sexe en âge de travailler", conclut l'étude.
Sur le front de la vaccination, alors qu'en France, les syndicats réclament depuis plusieurs semaines une priorité pour le personnel éducatif face au risque de contamination à l'école, plusieurs pays ont eux déjà commencé à vacciner leurs enseignants. C'est notamment le cas en Espagne, en Italie ou au Portugal, mais également dans 30 des 50 États des États-Unis, où les enseignants font bien partie des personnes prioritaires, après le personnel soignant et les maisons de retraite. En Allemagne, où l'enseignement est du ressort des États régionaux, le ministre de la Santé et ses collègues des Länder se sont mis d'accord pour que les enseignants des écoles primaires soient prioritaires dans la vaccination. Dans le Land de Meckembourg-Poméranie antérieure, la vaccination générale des enseignants a débuté. Alors qu'en Basse-Saxe, elle est limitée aux enseignants du premier degré. Mardi dernier, lors d'une visite dans un centre de vaccination à Valenciennes (Nord), Emmanuel Macron a assuré que les professionnels exposés, dont les enseignants, pourraient se faire vacciner à partir de la mi-avril dans l'Hexagone.
À titre de repère, au sein du foyer, avoir un enfant scolarisé représente un sur-risque d’infection pour les adultes, notamment ceux gardés par une assistante maternelle (+39%), et ceux qui vont au collège (+27%) et au lycée (+29%). Avec une exception toutefois : avoir un enfant scolarisé en primaire n’a pas été jusqu’à maintenant associé à un sur-risque d’infection pour les adultes vivant dans le même foyer. On note cependant depuis janvier une augmentation des infections intra-domiciliaires vers les adultes dues à des enfants de moins de 11 ans.