La parosmie toucherait des centaines de milliers de malades, rien qu'au Royaume-Uni.Ce trouble engendre une modification des odeurs, notamment de celles des aliments, qui deviennent souvent désagréables.Selon une étude britannique, il est spécifiquement dangereux pour les enfants, qui refuseraient de s'alimenter par dégoût.
Si votre enfant refuse de terminer son assiette, ce n’est peut-être pas un caprice : après l’anosmie, la perte d’odorat, certaines personnes pourraient aussi souffrir d’une distorsion des odeurs, un trouble particulièrement handicapant, voire dangereux, pour les plus jeunes.
Selon une récente étude d’experts britanniques, l’épidémie de Covid-19 rendrait de plus en plus d’enfants difficiles au sujet de la nourriture, car ceux qui sont contaminés seraient susceptibles de voir leur odorat altérer. Et ainsi avoir l’impression que le chocolat a une odeur d’essence ou le citron celle de chou pourri, par exemple.
L'université d'East Anglia et l'association dédiée aux troubles de l'odorat et du goût Fifth Sense, implantés au Royaume-Uni, font ainsi un lien entre difficulté à s’alimenter, en refusant des plats que l’on aimait auparavant et la parosmie, ce trouble handicapant de distorsion des odeurs. Dans une étude publiée le 18 janvier et relayée par le site Bloomberg, le professeur Carl Philpott explique ainsi "la parosmie est due au fait que les récepteurs olfactifs sont moins nombreux et qu'ils ne peuvent capter qu'une partie des composants d'un mélange d'odeurs".
Des plats chauds qui sentent la poubelle et les excréments
Dans un reportage réalisé par Brut America, Federica Genovese, experte du Monell Chemical Senses Center, un institut scientifique américain dédié à la recherche sur le goût et l'odorat, explique que ce trouble peut directement découler d'une perte totale d'odorat. "Lorsque le virus attaque les cellules de l'odorat, cela détruit des neurones, ce qui provoque l'anosmie", indique-t-elle. "Heureusement, d'autres neurones les remplacent, mais se reconnectent mal. Ainsi, pour certains patients, une pêche peut sentir... le basilic. Dans le meilleur des cas. Car cela peut vite dégénérer et les odeurs peuvent vraiment être désagréables."
"It smelled like putrid death." After being sick with COVID, these people are reporting an unusual new symptom. And it stinks ... pic.twitter.com/6X7EvbtYK8 — Brut America (@brutamerica) January 20, 2022
Elle relève notamment que la nourriture chaude peut aggraver le phénomène, parce que la cuisson dégage davantage de nourriture : "La chaleur rend les molécules plus volatiles, donc elles sont plus nombreuses à atteindre notre nez", détaille la spécialiste. Un plat chaud peut alors sentir la poubelle ou les excréments.
Des cas de dénutrition chez les enfants, qui ne parviennent plus à manger
Un calvaire pour un grand nombre de personnes contaminées. "Environ 250.000 adultes au Royaume-Uni" ont souffert de parosmie après avoir été infectés par le virus, rapporte quant à lui Carl Philpott, qui s’inquiète désormais de l’incidence de ce trouble sur la santé des enfants, en particulier ces derniers mois, depuis la diffusion de plus en plus massive du Covid-19 dans les écoles. Ce trouble "empêche les enfants de manger", alerte-t-il, estimant que "c'est un problème qui, jusqu'à présent, n'a pas vraiment été reconnu par les professionnels de la santé, qui pensent simplement que les enfants sont des mangeurs difficiles sans se rendre compte du problème sous-jacent".
"Nous avons entendu certains parents dont les enfants souffrent de problèmes nutritionnels et ont perdu du poids, mais les médecins ont mis cela sur le compte d'une simple alimentation capricieuse", abonde le président et fondateur de Fifth Sense, Duncan Boak.
Cette distorsion peut pourtant provoquer des nausées et vomissements, alerte l’étude, citant le cas d’un jeune garçon de 11 ans, qui a été contaminé au coronavirus en septembre et ne parvenait plus à manger ensuite, rapidement saisi de nausées : tout sentait "l’excrément et l’œuf pourri", raconte-t-il. Hospitalisé d’urgence en novembre, l’adolescent avait perdu deux kilos et était déshydraté. Si son état commence à s’améliorer, il souffre toujours de parosmie plusieurs mois après l’infection.
Milkshakes protéinés sans goût et parcours de senteurs
Les enfants doivent donc être écoutés et crus, appellent les experts, qui lancent un guide pour aider les parents et les professionnels de la santé à mieux reconnaître ce trouble. Le Pr Carl Philpott encourage par exemple les familles à tenir un registre des aliments sûrs, et de ceux qui provoquent un dégoût. "Il y a beaucoup de déclencheurs communs, par exemple la cuisson de la viande, les oignons ou l'ail, l'odeur du café frais, mais ils peuvent varier d'un enfant à l'autre", explique-t-il. Pour les repérer, il recommande de miser sur des "aliments aux saveurs moins fortes comme les pâtes, les bananes ou le fromage doux".
En attendant de pouvoir s’alimenter correctement à nouveau, le spécialiste préconise aussi de préparer par exemple des "milkshakes protéinés à la vanille ou sans saveur" pour garantir un apport en nutriments aux enfants qui ont le plus de mal à manger. Ou encore utiliser "un pince-nez souple" au moment de goûter les aliments pour éviter de les rejeter.
L’odorat peut aussi être sollicité, pour les enfants comme les adultes, par un rituel quotidien : sentir au moins quatre odeurs différentes (comme le café, la lavande, la rose ou la cannelle) deux fois par jour, et ce tous les jours pendant plusieurs mois. Les effets de la parosmie peuvent en effet durer de six mois à un an, voire plus selon les patients.
Quant aux traitements, l’université et l’association énumèrent dans leur guide plusieurs techniques, du simple lavage nasal à des opérations chirurgicales, pour déplacer la cloison nasale par exemple, en passant par des sprays ou des comprimés nasaux à base de stéroïdes. Les scientifiques restent toutefois prudents sur ce dernier traitement : le professeur Carl Philpott lui-même alertait sur les effets secondaires de ces substances anti-inflammatoires dans une étude à laquelle il a pris part, publiée en mars dernier dans la revue scientifique International Forum of Allergy & Rhinology et relayée par le Guardian.
Il soulignait que son efficacité dans le cas de disparition totale de l’odorat n’était pas encore vérifiée, et que les stéroïdes pouvaient provoquer "une augmentation de la tension, de la rétention d’eau et des troubles de l’humeur et du comportement".
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